Procès des viols de Mazan : "Ce n'était pas volontaire", affirme Lionel R., l'un des hommes accusés d'avoir violé Gisèle Pelicot

L'homme de 44 ans fait partie des 14 accusés à avoir reconnu les faits. "Je n'ai jamais eu l'intention de le faire, mais n'ayant pas eu le consentement de Madame Pelicot, je ne peux que constater que je l'ai fait", a-t-il déclaré.
Article rédigé par Juliette Campion
France Télévisions
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Le tribunal judiciaire d'Avignon (Vaucluse), le 11 septembre 2024. (ANNA MARGUERITAT / HANS LUCAS / AFP)

Dans le procès des viols de Mazan, Lionel R., 44 ans, est le premier accusé à être entendu devant la cour criminelle du Vaucluse pour des faits concernant Gisèle Pelicot, jeudi 19 septembre, deux jours après l'interrogatoire de Dominique Pelicot. Il fait partie des 14 accusés, sur 51, à avoir reconnu les faits. Il s'avance à la barre et maintient sa position. "Je n'ai jamais eu l'intention de le faire, mais n'ayant pas eu le consentement de Madame Pelicot, je ne peux que constater que je l'ai fait", dit le quadragénaire en préambule. 

Toute la ligne de la défense est contenue dans cette déclaration. Selon les conseils des différents accusés, leurs clients affirment qu'ils n'ont pas eu l'intention de violer la septuagénaire, endormie au préalable par son mari à l'aide de puissants anxiolytiques. Pourtant, Lionel R. ne semble pas chercher de circonstances atténuantes. A la demande du président, il revient sur son passé d'alcoolique, reconnaît qu'il a beaucoup fait souffrir son ex-femme. Il assume également avoir exposé, sans le vouloir, ses enfants à des vidéos pornographiques, qu'il regardait en état d'ébriété. "Je n'ai pas d'excuses", répète-t-il à plusieurs reprises.

L'accusé évoque aussi une agression sexuelle qu'il aurait subie "à 12, 13 ans", précise l'assesseure, qui l'interroge à ce sujet. "Je jouais à la pétanque. Le président du club me ramenait à la maison après les entraînements et m'a masturbé", relate Lionel R., précisant avoir "atténué les choses" lorsqu'il en a parlé à ses parents à l'époque. "Par honte."

"J'aurais dû partir bien avant" 

Son interrogatoire se poursuit sur le jour des faits, le 2 décembre 2018, qu'il détaille à la demande de la cour, toujours dans cette volonté d'assumer, de ne rien nier. Il présente d'ailleurs ses excuses à Gisèle Pelicot. "Je peux comprendre que vous puissiez ne pas les entendre, et que c'est trop tard, je n'ai jamais voulu vous faire du mal. Mais je l'ai fait", déclare-t-il en regardant la victime. "Je n'ai jamais voulu vous faire de mal", répète-t-il. 

Pourtant, "je lui avais dit que j'avais drogué ma femme au petit déjeuner", assure Dominique Pelicot, interrogé à son sujet. Avec des cachets de Temesta dans son café. Lionel R. fait partie des rares accusés à avoir agi de jour. Entre 12h30 et 13h04, selon l'horodatage des vidéos retrouvées sur le disque dur au domicile du retraité. "Il m'a même demandé comment ça se passait, il se garde bien de le dire", souligne Dominique Pelicot, très incisif. 

"Je ne me sers d'aucune excuse, mais à ce moment-là, j'ai une personne en face de moi [Dominique Pelicot] qui devient très directive, qui n'a pas le même regard, je perds complètement pied, j'exécute ce qu'il me dit de faire", déroule Lionel R. Au cours du viol, la victime bouge à plusieurs reprises. Dominique Pelicot fait signe au quadragénaire de sortir de la pièce. "A ce moment-là, je reprends un peu mes esprits. Et j'aurais dû partir bien avant, j'aurais dû réagir bien avant, mais je n'y arrive pas", relate Lionel R.

"On peut commettre un viol sans le vouloir ?"

Avant les faits, Dominique Pelicot était passé, accompagné de son épouse, au supermarché Leclerc dans lequel son coaccusé travaillait. Il s'était alors approché discrètement de Lionel R., laissant sa femme à l'écart, et lui avait demandé : "Comment tu la trouves ?" Pourtant, quand l'employé a découvert l'affaire dans les journaux, avant son interpellation, il s'est dit : "Ce n'est pas possible, ça ne peut pas être mon histoire, je ne fais pas partie de ça."

"Pour vous, on peut commettre un viol sans le vouloir ?", lui demande Stéphane Babonneau, l'un des avocats de Gisèle Pelicot et de sa famille. "Ce jour-là oui, car quand j'ai pris ma voiture, je ne me suis jamais dit : 'je vais violer cette dame'", assure-t-il. "Aujourd'hui, vous continuez à dire que c'est un viol involontaire ?", poursuit l'avocat. Réponse de Lionel R. : "Ce n'était pas volontaire, mais j'aurais dû partir bien avant, réagir bien avant."

Son avocat, Louis-Alain Lemaire, l'interroge sur ce point. "Vous confirmez que vous n'aviez pas l'intention de commettre un viol ?" "Non, bien sûr", soutient l'accusé. "Le seul reproche qu'on peut vous faire, c'est le temps de réaction avant votre prise de conscience ?", poursuit son conseil. "Oui", répond Lionel R.

A la sortie de l'audience, Louis-Alain Lemaire déplore "la polémique" qu'a suscitée la phrase de son confrère, Guillaume de Palma, qui avait déclaré la semaine dernière : "Il y a viol et viol." "Ce qu'il voulait dire, c'est qu'il n'y avait pas d'intention criminelle", martèle l'avocat de la défense.

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