Elèves délinquants : l'école doit-elle savoir ?
Alors qu'un camarade d'Agnès a été mis en examen pour le viol et l'assassinat de l'adolescente en Haute-Loire, collèges et lycées sont divisés : doivent-ils être informés des antécédents judiciaires de leurs élèves ?
La direction du collège-lycée du Chambon-sur-Lignon, en Haute-Loire, a assuré ne pas avoir été informée du passé de violeur présumé d'un de ses lycéens de 17 ans. Ce dernier est soupçonné d'avoir violé et assassiné Agnès, une de ses camarades âgée de 13 ans, le 16 novembre. Le garde des Sceaux Michel Mercier a ordonné l'ouverture d'une enquête pour déceler une éventuelle défaillance dans le suivi judiciaire de l'adolescent.
A la suite de ce drame, une question divise le monde de l'éducation : faut-il alerter les proviseurs et les principaux lorsqu'un mineur délinquant est présent dans leurs salles de classe ? FTVi a recueilli trois points de vue.
• "Les chefs d'établissement souhaitent être informés"
Il n'y a pas d'obligation légale à ce jour mais les chefs d'établissement veulent être tenus au courant, affirme Michel Richard. Pour le secrétaire général adjoint du principal syndicat des personnels de direction de l'éducation nationale, le SNPDEN, il y a, de plus, un devoir moral des familles et des institutions judiciaires à le faire.
• "Ça stigmatise les jeunes"
La justice devrait-elle révéler systématiquement le casier judiciaire d'un élève au directeur de son école ? Non, estime Maria Inès, de la Protection judiciaire de la jeunesse. L'éducatrice et secrétaire nationale du SNPESPJJ-FSU, syndicat des personnels de l'éducation et du social, explique que, les proviseurs ayant le droit de refuser une inscription, ils pourraient s'opposer à l'arrivée dans leur lycée d'un mineur délinquant.
• "On n'a pas à savoir"
"L’Education nationale et la justice, ce sont deux mondes différents. D’un point de vue éthique, on n’a pas à savoir si un élève a eu des problèmes", déclare Catherine Manciaux, proviseure et secrétaire générale du syndicat FSU des chefs d'établissement (SNUPDEN-FSU). "Imaginez une salle des profs où tous les enseignants seraient au courant, tout le monde se méfierait de [cet élève]. Il ne serait jamais considéré comme un élève normal."
Quelquefois, les parents évoquent les ennuis que leurs enfants ont ou ont eu avec la justice, précise Catherine Manciaux. "Souvent parce qu’ils sont démunis face à leur enfant. On discute avec eux et on leur demande si on peut prendre contact avec les éducateurs". D'autres fois, explique la syndicaliste, "c’est la justice qui voit l’opportunité d’en parler. Si elle le décide, les éducateurs prennent contact avec nous. Quand l'élève fait des bêtises à l’intérieur de l’établissement, on leur en parle. On travaille en bon intelligence avec le juge chargé du suivi."
Il en va de l'intérêt de l'enfant, souligne la proviseure : "Les jeunes délinquants qui ont plus de 16 ans, en général, sont sages à l’école parce qu’ils savent que c’est dans leur intérêt. Et un juge qui constate que ça se passe bien est moins tenté de sortir le jeune du circuit scolaire. Une partie de leur réhabilitation consiste à leur montrer qu’ils peuvent être bien."
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