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Attaque contre des militaires à Levallois-Perret : pourquoi l'opération Sentinelle pose question

Après qu'une voiture a foncé sur six soldats mercredi, le débat est relancé à propos de ce dispositif créé en janvier 2015 après l'attentat contre "Charlie Hebdo". 

Article rédigé par franceinfo
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Des soldats français patrouillent près de la tour Eiffel, à Paris, dans le cadre de l'opération Sentinelle, le 3 mai 2017.  (CHRISTIAN HARTMANN / REUTERS)

Les soldats de l'opération Sentinelle sont une nouvelle fois la cible d'une attaque. Une voiture a renversé six militaires de ce dispositif peu après 8 heures du matin, mercredi 9 août, à Levallois-Perret (Hauts-de-Seine). Le suspect a été interpellé plus tard dans la journée, sur l'autoroute A16 près de Marquise (Pas-de-Calais). 

Il s'agit de la sixième attaque contre des soldats de l'opération, depuis son lancement à la suite des attentats contre Charlie Hebdo et l'Hyper Cacher, en janvier 2015. Depuis ces attaques, entre 7 000 et 10 000 militaires sont déployés à travers le territoire afin de "protéger, dissuader, rassurer", rappelle Libération. Leur mission : protéger des sites sensibles, comme les lieux de culte, des gares ou des sites touristiques. 

L'attaque de Levallois-Perret ravive le débat sur l'efficacité et la pertinence du dispositif, lancé dans le cadre du plan Vigipirate. Pourquoi est-il régulièrement décrié ? Eléments de réponse. 

Les militaires sont devenus des cibles

Depuis les débuts de l'opération Sentinelle, en janvier 2015, les attaques contre les militaires chargés de cette mission se multiplient en France. Le 3 février 2015, moins d'un mois après le lancement du dispositif, trois militaires situés devant un centre communautaire juif à Nice (Alpes-Maritimes) sont agressés au couteau. Une nouvelle attaque a lieu deux mois plus tard, le 10 avril, à l'aéroport d'Orly (Val-de-Marne). Armé d'un couteau, un homme porte un coup au visage à un militaire patrouillant à l'aéroport. Début 2016, une voiture fonce à plusieurs reprises sur quatre militaires basés devant la mosquée de Valence (Drôme). L'un d'entre eux est blessé dans l'attaque, menée par une jeune Française d'origine tunisienne.

Les agressions se sont multipliées ces derniers mois, comme le retrace Libération. Le 3 février, quatre autres militaires de l'opération Sentinelle sont pris pour cible par un homme armé d'une machette au Carrousel du Louvre, à Paris. L'assaillant, un Egyptien de 29 ans, crie "Allah Akbar" en les attaquant. Moins de deux mois plus tard, le 18 mars, une patrouille militaire à l'aéroport d'Orly est agressée par un homme de 39 ans, qui leur crie "Posez vos armes, je suis là pour mourir pour Allah". L'assaillant est abattu.

L'attaque de Levallois-Perret ravive les inquiétudes sur ces agressions récurrentes. "Le bouclier qu'ils étaient censés représenter s'est transformé en paratonnerre", regrette Stéphane Albouy dans un éditorial du Parisien, jeudi 10 août. "A chaque fois ou presque qu'ils ont dû intervenir face à des terroristes, ils étaient eux-mêmes la cible de l'attaque." 

Les conditions de travail sont déplorables

Plusieurs militaires travaillant pour l'opération Sentinelle, ainsi que leurs proches, témoignent de conditions de travail et de vie familiale particulièrement difficiles. "Ils sont fatigués. Les nuits, le militaire se dit : 'Je vais dormir 5 heures.'", dénonce Laetitia, qui mène le mouvement Femmes de militaires en colère, au micro de franceinfo. Cette épouse de militaire évoque des logements "où on ne mettrait même pas des animaux". "On a des hommes qui sont mangés par des punaises de lit. Il y a des militaires qui passent un mois et demi dans l'année chez eux. Ce n'est pas possible !" condamne-t-elle, évoquant aussi une "peur au ventre" du fait des attaques répétées contre les militaires.

D'autres voix s'élèvent pour critiquer le manque de sens et la frustration liée à ces missions pour les soldats. "Avec Sentinelle, on est dans le cadre d’une mission dont le sens apparaît de plus en plus lointain, de plus en plus incompréhensible", relève l'historienne Bénédicte Chéron, spécialiste des relations armées-société, interrogée par franceinfo

L'ancien général Vincent Desportes, interrogé par L'Obs, évoque quant à lui des soldats qui "n'ont plus le temps de s'entraîner". "Nos soldats sont des mères et des pères de famille. Ils n'ont plus de vie, entre les déploiements à l'étranger et les missions Sentinelle en France. Le moral de l'armée est fragile", s'inquiète-t-il. 

L'efficacité de l'opération est incertaine

L'ancien général, cité par Le Parisien, explique encore que l'opération Sentinelle représente pas moins d'"un tiers des déploiements de l'armée". Pour autant, son efficacité est aujourd'hui remise en cause."Certes, l'opération Sentinelle peut avoir un effet psychologique sur nos concitoyens. Mais aujourd'hui, on se retrouve avec des soldats blessés. Elle est inefficace", regrette Vincent Desportes dans L'Obs. "Sentinelle n'a jamais déjoué, ni empêché, ni entravé, aucun attentat en France depuis sa mise en œuvre", martèle Jean-Charles Brisard, du centre d'analyse du terrorisme, interrogé par France 3.

Selon les chiffres avancés par l'ancien ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian, l'opération Sentinelle coûtait un million d'euros par jour en 2015, rapporte LCI. Ce dernier a finalement estimé le coût du dispositif à 176 millions d'euros en 2015, et 145 millions d'euros pour 2016. 

Faut-il, alors, réformer cette opération ? Dans un discours aux Armées, le 13 juillet, Emmanuel Macron a appelé à "une revue en profondeur" du dispositif dès le mois de septembre. Cette réforme sera lancée "afin d'avoir une plus grande efficacité opérationnelle et de prendre en compte l'effectivité et l'évolution de la menace", a assuré le chef de l'Etat.

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