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Disparues de Perpignan et de Nîmes : y a-t-il eu une faille dans l'enquête ?

Les enquêteurs privilégient désormais la piste criminelle pour les deux dossiers. Les proches de Simone, l'ancienne maîtresse du suspect, disparue en 2004, estiment que les enquêteurs "n'ont pas fait leur travail".

 
Article rédigé par Vincent Daniel
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6min
Des amis d'Allison Benitez, disparue avec sa mère mi-juillet, tractent dans les rues de Perpignan (Pyrénées-Orientales) pour alerter les passants, le 7 août 2013. (RAYMOND ROIG / AFP)

Les proches de Simone sont tristes et amers. L'information judiciaire ouverte en 2004 après la disparition de la maîtresse de Francisco Benitez, le père et mari des deux disparues de Perpignan (Pyrénées-Orientales), a été rouverte pour "enlèvement et séquestration", jeudi 8 août au soir par le parquet de Nîmes (Gard). Simone de Oliveira Alves a disparu le soir du 29 novembre 2004 à Nîmes à l'âge de 28 ans, alors qu'elle entretenait une relation avec Francisco Benitez. 

A l'époque, Francisco Benitez était déjà marié avec Marie-Josée, avec laquelle il avait eu Allison. Le couple battait de l'aile (ils étaient en instance de divorce en 2013). Et les proches de Simone disent qu'elle entretenait une "relation suivie" avec Francisco, ignorant que celui-ci était marié jusqu'à ce qu'elle le découvre et qu'elle souhaite se séparer de lui. Après la disparition de Simone de Oliveira Alves, Francisco Benitez n'avait pas été inquiété. Même si les deux dossiers (la mère et la fille à Perpignan et Simone à Nîmes) ne sont pas joints pour l'instant, ils seront rapprochés si nécessaire, selon une source judiciaire. Le SRPJ de Montpellier, qui va entendre à nouveau les témoins de la disparition de Nîmes, est toutefois saisi des deux affaires. Et la piste criminelle est désormais retenue pour les deux dossiers. Y a-t-il eu négligence des enquêteurs à Nîmes ? Aurait-on pu éviter les disparitions de Perpignan ?

Au cœur des soupçons : les similitudes entre les deux affaires

Comme Marie-Josée Benitez et Allison Benitez, Simone de Oliveira Alves a disparu du jour au lendemain. "Elle n'avait pas non plus de raison apparente de fuir et d'abandonner ses quatre enfants, selon ses proches", écrit Le Figaro. Comme lors de la disparition, en juillet, de sa femme et de sa fille, Francisco Benitez était la dernière personne à avoir vu cette Brésilienne. Et comme pour les disparues de Perpignan, le dernier signe de vie de Simone est un SMS reçu par Francisco, lui annonçant son départ. 

Autre point commun entre les deux dossiers, Francisco Benitez a tardé à signaler les disparitions. "Je ne connaissais pas la tête de Benitez, juste son nom. Quand j’ai vu qu’il était mêlé à l’histoire de Perpignan, ça a tout de suite fait tilt dans ma tête", raconte Claude, ancien compagnon de Simone et père de ses quatre enfants, interrogé par Le Parisien (article payant). Et il ajoute : "Ça ressemblait trop à ce qui s’était passé avec Simone pour que ça soit du hasard."

Ce que reproche la famille de Simone aux enquêteurs

Faute d'éléments probants, l'enquête judiciaire sur la disparition de Simone de Oliveira Alves a été classée fin 2007. Le dossier n'est pas totalement clos, un avis de recherche subsistait, mais il n'avançait plus. "Si les enquêteurs avaient fait leur travail, on n’en serait pas là aujourd’hui", regrette l'une des sœurs de la disparue auprès du Parisien (article payant). Après sa disparition en 2004, le beau-frère de la disparue oriente les enquêteurs sur la piste de Benitez car "curieusement, l’amant n’a alerté personne", explique le quotidien. "Il leur a raconté que Simone avait une vie dissolue. Il a aussi raconté qu’elle lui avait envoyé un texto de rupture et qu’elle ne reviendrait pas. Ils ont été impressionnés par ses états de service [ce membre de la Légion étrangère a été envoyé sur de nombreux théâtres d'opération] et ils se sont fait berner", déplore le beau-frère de Simone.

Et Le Parisien, qui s'est entretenu avec les proches de Simone, écrit : "Dans les propos des uns et des autres pointe (...) l'impression que la disparition d’une serveuse brésilienne dans un bar de nuit n’émeut guère la République."

Ce que répond la justice 

L'enquête sur la disparition de Simone a-t-elle été bâclée ? Non, répond aujourd'hui la justice. "Les annonces de disparitions sont fréquentes, explique Robert Gelli, procureur de Nîmes à l'époque des faits, au Parisien. On aurait pu se contenter d'un simple signalement, or cette annonce a été prise très au sérieux puisqu'une information judiciaire pour recherche des causes de la disparition a été ouverte immédiatement." En France, entre 40 000 et 50 000 personnes disparaissent chaque année. Seul un quart de ces disparitions sont jugées "inquiétantes" et donnent lieu à des investigations, comme le cas de Simone de Oliveira Alves. Et sur les quelque 10 000 disparitions inquiétantes, trois affaires sur quatre sont élucidées, selon France 2.

"Benitez a été entendu comme d'autres et ses propos ont été vérifiés", indique Eric Emmanuelidis, actuel procureur adjoint de Nîmes, également interrogé par Le Parisien. Pour le magistrat, "l'enquête a été très complète". Pourquoi les enquêteurs de Perpignan n'ont-ils pas immédiatement fait le lien avec la disparition de Nîmes ? Parce que les personnes simplement entendues par les enquêteurs, ayant fait l'objet d'une suspicion ou d'une dénonciation non étayée, ne figurent pas sur les fichiers de la police.

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