Un Observatoire citoyen des droits des victimes créé "face à une indifférence collective croissante", explique un fondateur
Neuf victimes et proches de victimes de catastrophes et d'attentats ont annoncé vendredi la création de cette instance indépendante destinée à défendre leurs droits.
Victimes d'attentats, rescapés de catastrophes naturelles ou proches de disparus dans des accidents aériens, ils veulent mener une réflexion sur la prise en charge des victimes. Un collectif de neuf citoyens annonce vendredi 21 mai la création de l'Observatoire citoyen des droits des victimes. Face à "une indifférence collective croissante et redoutant un désengagement des pouvoirs publics", ces victimes et proches de victimes souhaitaient ouvrir une structure indépendante.
"J'ai été dans une association de victimes, on avait beaucoup de contacts avec les pouvoirs publics, mais on n'a pas vraiment eu le temps de mener un travail de fond", explique à franceinfo Emmanuel Domenach, l'un des vice-présidents de l'observatoire. "Plus de cinq ans après la vague d'attentats, on se rend compte que l'Etat a tourné la page en quelque sorte, mais pas forcément les victimes", pointe ce rescapé du Bataclan lors des attentats du 13 novembre 2015. Il souligne que les victimes ont le sentiment d'être "oubliées" par l'Etat.
"Il y a l'idée de la victime résiliente qui prévaut. On lui impose d'être forte, mais ce n'est pas possible pour tous. Certaines le sont, d'autres non, chacun va à son rythme."
Emmanuel Domenach, rescapé du Bataclanà franceinfo
L'Observatoire citoyen du droit des victimes entend donc proposer des dispositifs à mettre en place pour une meilleure prise en charge des victimes. "Le fait que nous soyons indépendants nous permet de garantir une analyse objective et sereine. On va pouvoir dire ce qui marche, ce qui ne marche pas et proposer des solutions concrètes", poursuit Emmanuel Domenach. "Un très bon travail a été fait, mais il faut aussi mettre des mots sur les difficultés rencontrées."
Un conseil stratégique pour asseoir sa légitimité
Le vice-président de cet observatoire pointe notamment les dysfonctionnements du fonds de garantie d'indemnisation des victimes. Il souligne un "manque d'accompagnement" et affirme avoir eu l'impression de se trouver face à "une machine pour laquelle chaque erreur de la victime était l'occasion de faire des économies". Comme dans "une relation d'assureur à assuré", compare Emmanuel Domenach.
Pour élargir son champ de réflexion, l'observatoire s'est doté d'un conseil stratégique, présidé par Juliette Méadel, ex-secrétaire d'Etat chargée de l'aide aux victimes sous la présidence de François Hollande. Le but de ce conseil est de proposer une expertise qualifiée sur la gestion de crise, en complément des retours d'expériences des victimes. "C'est aussi parce qu'on souhaite s'appuyer sur leur légitimité. On ne veut pas s'asseoir que sur notre vécu pour formuler des propositions. On a aussi besoin leur professionnalisme, le but est de construire avec eux. Ils vont nous apporter ce crédit", précise Emmanuel Domenach.
Parmi les membres de ce conseil, Jean-Charles Brisard, président du Centre d'analyse du terrorisme, Georges Fenech, ex-député et membre de la commission d'enquête parlementaire concernant l'affaire d'Outreau, ou encore Dominique Verdeilhan, ancien journaliste police/justice. "Le spectre de la politique d'aide aux victimes est très large, justifie Emmanuel Domenach. Dans la question de l'aide aux victimes, il y a aussi les sujets mémoriels, la question de l'image des victimes dans les médias notamment. Plus on aura d'apports aux débats, plus nos réflexions seront étayées." L'observatoire espère rendre ses premiers travaux d'ici la fin de l'année, alors que le procès des attentats du 13 novembre 2015 commencera le 8 septembre.
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