Pourquoi les taxis manifestent à nouveau contre les VTC
Ce lundi des opérations escargots ont été organisées dans plusieurs villes de France pour protester contre la loi d'orientation des mobilités.
Ils sont à nouveau dans la rue. Cinq syndicats de taxis, d'auto-écoles et d'ambulanciers (Elite, FO, Sud, CFDT, CGT) ont appelé à manifester lundi 20 mai contre la loi d'orientation des mobilités (LOM). Plusieurs centaines de personnes ont défilé dans les rues de Paris après avoir mené des opérations escargots dans plusieurs villes du pays. Les taxis dénoncent une perte d'équilibre entre eux et les VTC, les voitures de transport avec chauffeur, dans un bras de fer qui dure depuis des années.
La loi de 2016 n'est pas totalement appliquée
Laurent Grandguillaume est l'auteur de la loi du 29 décembre 2016, entrée en vigueur au 1er janvier 2018, et qui vise à réguler et à simplifier le secteur du transport public particulier de personnes. Selon l'ancien médiateur dans le conflit des taxis et des VTC, le gouvernement tarde à publier les décrets. "Il y a eu quelque part une opposition à la publication de ces décrets", affirme l'ancien député PS de Côte-d'Or. "La loi donne tous les outils pour réguler ces métiers, pour remettre un cadre", affirme-t-il à franceinfo alors qu'il constate "une lenteur dans l'exécution par le gouvernement qui n'a pas sorti tous les décrets qui concernent cette loi".
"Est-ce que vous connaissez beaucoup de lois où il n'y a pas de publication des décrets après deux ans et après le vote à l'unanimité, après avoir été élaboré à la suite d'une concertation avec l'ensemble des acteurs?", s'interroge Laurent Grandguillaume.
Un constat partagé par Christian Delomel, président de la chambre syndicale des artisans taxi. "Rien n'a changé depuis la loi Grandguillaume. Elle n'est pas respectée", affirme-t-il à franceinfo. Ce taxi d'Île-de-France reste optimiste après les évènements récents à Cannes. "Le préfet des Alpes-Maritimes, pour préserver le Festival, a appliqué la loi puisqu'il a mis des amendes aux VTC qui ne retournaient pas à leur garage. Donc on a de l'espoir que la loi soit enfin appliquée en France et notamment en région parisienne avec ces fameux VTC", conclut-il.
Des fake news autour de la loi sèment le doute
L'une des craintes des taxis est de voir des VTC sur des voies réservées comme les couloirs de bus. "Il s'agit d'une fake news", dénonce Bérangère Couillard, députée de Gironde et rapporteuse d’un des textes de la loi Mobilités sur les VTC. "Nous avons exclu les chauffeurs VTC de ces voies de bus. Nous souhaitons préserver cet avantage aux chauffeurs de taxi", affirme-t-elle à franceinfo. "Il y a aura des voies réservées hors agglomérations qui seront réservées uniquement aux chauffeurs de taxi et aux transports en commun. Les chauffeurs de taxi auront donc cet avantage".
La rapporteuse d’un des textes de la loi Mobilités sur les VTC dénonce aussi une autre fake news : le stationnement entre deux courses pour les VTC. "Il n'y a aucune création de station pour les VTC. Encore une fois, c'est quelque chose qui n'est pas dans la loi Mobilités. On est sur une contestation qui est née de fausses informations", confirme-t-elle.
Les frontières entre métiers restent floues
Le métier de taxi conserve certains avantages par rapport aux VTC, comme la maraude qui permet de tourner dans les rues en attendant des clients. "Le Conseil d'Etat a confirmé que la maraude est uniquement due aux taxis", renchérit Christian Delomel, président de la chambre syndicale des artisans taxi.
"C'est un monopole", estime sur franceinfo Alain Bonnafous, économiste des Transports. Selon lui, "cet équilibre n'est pas fait pour durer tout un siècle. On va de toute manière vers une certaine convergence entre deux activités qui sont en somme les mêmes du point de vue de service rendu". D'après lui, "la grande différence entre les VTC et les taxis, c'est que les taxis ont pour beaucoup acheté leur licence alors que les VTC n'ont pas acheté cette licence".
Selon cet économiste, le véritable problème entre les taxis et les VTC est le coût de la licence pour les taxis qui reste très élevée et qui est "l'une des difficultés inhérentes à la loi". Alain Bonnafous plaide pour une transition. "Si on ne définit pas le modèle de long terme, on commet ce que je me permets d'appeler une lâcheté politique. Le modèle de long terme qu'on le veuille ou non c'est un modèle dans lequel la distinction entre ces deux métiers aura disparu", conclut-il.
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