Crise en Nouvelle-Calédonie : comment l'Etat compte rétablir "l'ordre républicain" sur l'archipel "quoi qu'il en coûte"
"L'ordre républicain sera rétabli, quoi qu'il en coûte", a insisté dimanche 19 mai le haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie, Louis Le Franc. L'archipel a connu six jours d'émeutes d'une extrême violence, qui ont fait six morts. Les indépendantistes protestent contre une réforme qui prévoit un dégel du corps électoral, c'est-à-dire son élargissement aux personnes établies dans l'archipel depuis au moins 10 ans.
"Les consignes de fermeté sont passées", a commenté le ministre de l'Intérieur et des Outre-mer, Gérald Darmanin, dans un message sur X. Pour reprendre le contrôle de la situation, l'exécutif a notamment recours à la force face à des émeutiers qui ne décolèrent pas. Un total de "230 émeutiers ont été interpellés", selon les mots de Louis Le Franc lors d'un échange avec les journalistes organisé dimanche soir.
Franceinfo revient sur la manière dont l'Etat tente de rétablir "l'ordre républicain" sur l'archipel depuis une semaine.
En dégageant la route entre Nouméa et l'aéroport international
Après six morts en six jours d'émeutes, les gendarmes ont mené dimanche une opération d'envergure sur la route entre Nouméa et l'aéroport international de La Tontouta, situé à une cinquantaine de kilomètres au nord-ouest de Nouméa et fermé aux vols commerciaux. Il s'agit d'un axe stratégique pour permettre le réapprovisionnement du sud de la grande île, soumis à des pénuries.
Une centaine de membres du GIGN, l'unité d'élite de la gendarmerie, ont été mobilisés. Un convoi constitué de blindés de la gendarmerie et d'engins de chantier a parcouru cet axe pour évacuer tous les obstacles. "L'opération de dégagement de la grande route (...) a été un succès : 76 barrages détruits", s'est félicité Gérald Darmanin dans son tweet.
La voie reste cependant encombrée à de nombreux endroits de carcasses de voitures brûlées, de ferraille et de bois entassés, ont constaté des journalistes de l'AFP et de Nouvelle-Calédonie La 1ère. Des militants indépendantistes ont déclaré à l'AFP qu'ils avaient "remis" des barrages filtrants après le passage des forces de l'ordre.
Rétablir la circulation presse d'autant plus que la Nouvelle-Zélande et l'Australie ont annoncé dimanche avoir demandé à la France de pouvoir poser des avions, afin de rapatrier leurs ressortissants. Samedi, le gouvernement de Nouvelle-Calédonie estimait que 3 200 personnes étaient bloquées en l'absence de vols commerciaux, soit parce qu'elles ne pouvaient pas quitter l'archipel, soit parce qu'elles ne pouvaient pas le rejoindre. Un pont aérien est actuellement mis en place entre les aéroports de La Tontouta et Magenta, à Nouméa.
En menant des "opérations de harcèlement" contre des "points durs"
Le haut-commissaire de la Nouvelle-Calédonie a annoncé de nouvelles "opérations de harcèlement" par les unités d'élite de la police et de la gendarmerie dans la nuit de dimanche à lundi, "là où il y a des points durs". Elles seront notamment menées dans les villes de Nouméa, Dumbéa et Païta, deux villes de l'agglomération nouméenne.
Le haut-commissariat de la République en Nouvelle-Calédonie a en outre fait part de l'arrivée prochaine de "plusieurs centaines de forces de sécurité intérieure, de soutien logistique et opérationnel et de sécurité civile", en plus des renforts déjà envoyés. "Grâce aux 700 forces de l’ordre supplémentaires arrivées et aux 350 qui arriveront aujourd’hui [dimanche], dont de nombreux militaires du GIGN et policiers du Raid, les opérations vont se multiplier dans les prochaines heures", a déclaré Gérald Darmanin dans son message sur X.
En maintenant le couvre-feu, l'interdiction des rassemblements et de TikTok
En parallèle des opérations des forces de l'ordre, les mesures exceptionnelles de l'état d'urgence décrété mercredi sont maintenues. Il comprend notamment la mise en place d'un couvre-feu entre 18 heures et 6 heures (entre 9 heures et 21 heures à Paris), l'interdiction des rassemblements, du transport d'armes et de la vente d'alcool, ainsi que le bannissement de l'application TikTok. Elle aurait servi à relayer des appels à la haine et à la violence, selon certains élus de l'archipel.
Cette dernière mesure a été attaquée en justice par plusieurs associations telles que la Quadrature du Net et la Ligue des droits de l'Homme, qui estiment que "le gouvernement porte un coup inédit et particulièrement grave à la liberté d'expression en ligne".
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