Nouvelles règles pour Apple, Google, Facebook... Ce qui va changer avec l'entrée en vigueur du "Digital Markets Act" européen

Le règlement européen sur les services numériques entre en vigueur jeudi. Les plus grandes entreprises de la tech, comme Google, Apple, Amazon, Meta ou Microsoft, devront se plier à de nouvelles règles, sous peine de grosses amendes.
Article rédigé par Luc Chagnon
France Télévisions
Publié
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Des logos de plateformes concernées par les obligations du Digital Markets Act (image d'illustration). (JONATHAN RAA / NURPHOTO / AFP)

Le texte doit "ouvrir les portes de l'internet", selon Thierry Breton, le commissaire européen en charge du numérique. Le Digital Markets Act (DMA), le règlement européen sur les marchés numériques, entre en vigueur jeudi 7 mars. Il est pensé pour briser le pouvoir des géants de la tech et apporter plus de concurrence à des plateformes numériques utilisées par des milliards de personnes à travers le monde : Google, Apple, Amazon... Mais concrètement, qu'est-ce qui va changer ? Plus de choix dans les applications par défaut, ouverture aux magasins d'applications concurrents, mise en avant de ses propres offres interdite... On vous résume les principales nouveautés.

Une vingtaine de plateformes visées

Les nouvelles obligations du DMA concernent les entreprises considérées comme "contrôleurs d'accès", parce qu'elles remplissent certains critères en termes de chiffres d'affaires et de nombre d'utilisateurs dans l'Union européenne. Il y en a actuellement six : Alphabet (la maison-mère de Google et YouTube notamment), Amazon, Apple, ByteDance (le groupe chinois propriétaire de TikTok), Meta (la multinationale qui détient Facebook, Instagram et WhatsApp) et Microsoft.

Les services concernés par les obligations du Digital Markets Act. (COMMISSION EUROPENNE)

Ce ne sont pas toutes les activités de ces groupes qui sont visées, mais 22 "services de plateformes essentiels" utilisés par des millions de personnes chaque jour : Facebook, WhatsApp et Instagram pour Meta ; YouTube, Android, Google Search ou Chrome pour Alphabet ; la marketplace d'Amazon, mais aussi sa plateforme de publicité (Ads)... D'autres services ont été envisagés mais ne remplissent finalement pas les critères, comme le navigateur Edge de Microsoft ou l'application iMessage de Apple. Cette liste doit être révisée au moins tous les trois ans.

Plus de choix pour les utilisateurs

C'est le maître mot du DMA : le choix. Les smartphones devront par exemple autoriser les magasins d'applications concurrents, et les développeurs pourront vous rediriger vers d'autres sites pour des paiements ou téléchargements. Par exemple, sur iPhone, vous pourrez télécharger des magasins d'applications différents de l'AppStore – ce qu'Apple a toujours refusé, officiellement pour des raisons de sécurité.

Ce choix sera visible dès le démarrage. Au lancement de votre ordinateur ou smartphone, l'appareil devra vous proposer un écran pour choisir quel moteur de recherche, quel navigateur, quel magasin d'application, etc. vous souhaitez installer en premier parmi une liste des principaux systèmes. Vous pourrez également supprimer les logiciels et applications préinstallés par défaut que vous ne souhaitez pas garder.

Les contrôleurs d'accès ne pourront plus mettre en avant leurs propres offres. C'est pour cette raison que Google, par exemple, a dû supprimer le bouton Maps de ses résultats de recherche. Le géant américain n'aura plus le droit non plus de mettre par défaut ses comparateurs de prix en haut de ses résultats si vous cherchez un hôtel, un billet de train ou d'avion.

Pour mieux contrôler le traitement de vos données personnelles, les contrôleurs d'accès devront aussi vous demander votre accord pour que les données récupérées via un de leurs services soient utilisées dans les autres. Meta et Alphabet ont déjà commencé à envoyer des messages à leurs utilisateurs, pour demander s'ils souhaitent créer un compte spécifique à chaque service.

Parmi les autres mesures, les contrôleurs d'accès devront rendre aussi facile le désabonnement que l'abonnement aux services visés, et les services de messagerie instantanée ciblés devront être rendus interopérables avec leurs concurrents. Vous pourrez donc envoyer et recevoir des messages entre WhatsApp et d'autres applications de messagerie – qui respectent certaines règles de sécurité, comme le précise un responsable de Meta dans un communiqué.

De lourdes peines en cas d'infraction

Si ces contrôleurs d'accès ne respectent pas ces nouvelles règles, ils s'exposent à des sanctions massives. La Commission européenne pourra prononcer une amende allant jusqu'à 10% du chiffre d'affaires mondial total de l'entreprise (voire 20% en cas de récidive), et des astreintes allant jusqu'à 5% du chiffre d'affaires quotidien. Les autorités nationales de la concurrence pourront aussi enquêter et transmettre leurs conclusions à la Commission. A partir de "trois violations sur huit ans", l'exécutif européen pourra ouvrir une enquête de marché et imposer des mesures correctives. Par exemple : interdire au contrevenant d'acquérir d'autres entreprises dans ces secteurs, ou l'obliger à céder certaines activités.

Les géants du web n'ont pas attendu le dernier moment pour expliquer comment ils comptaient se mettre en conformité avec ces nouvelles règles européennes. En janvier, Google a annoncé dans un post de blog tester plusieurs changements. Apple a également dévoilé les contours de sa mise à jour iOS 17.4, qui doit contenir les réformes nécessaires. Mais comme souvent, certains des arrangements proposés par les géants de la tech sont critiqués. Les promesses d'ouverture d'Apple viennent avec leur lot de contraintes (les développeurs devront payer des frais potentiellement démesurés pour proposer leurs applications sur les différents magasins d'applications), d'où des accusations de mauvaise foi.

A partir du 7 mars, la Commission européenne évaluera les propositions des entreprises. "Si les solutions proposées ne sont pas assez bonnes, nous n'hésiterons pas à prendre des mesures fortes", a promis Thierry Breton.

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