La grande loi sur le logement, c'est pour quand ?
Le calendrier du gouvernement est désormais connu. Priorité aux logements sociaux avant une réforme en profondeur en 2013.
IMMOBILIER - Dès le mois de juillet, Cécile Duflot a présenté les grands chantiers à venir dans un contexte alarmant. La ministre du Logement a profité de l'été pour établir un calendrier aujourd'hui assez clair. On y distingue trois étapes correspondant à des chantiers ambitieux censés dégripper un marché en crise.
1Priorité immédiate aux logements sociaux
Dès la rentrée, le ton était donné. Lundi 3 septembre, Cécile Duflot a confirmé que la pression allait fortement augmenter sur les communes peu enclines à créer des logements sociaux. Dans le projet de loi qui sera présenté en Conseil des ministres mercredi 5 septembre, la ministre du Logement va proposer de faire passer de 20% à 25% l'objectif de logements sociaux imposé aux communes dans les zones les plus "tendues" (celles où la demande de logements sociaux est la plus forte) à l'horizon 2025.
Et pour enfoncer le clou, les communes récalcitrantes, qui préfèrent pour l'heure payer une amende de 140 euros en moyenne par logement manquant, verront leurs amendes multipliées par cinq. Les recettes issues de ces pénalités seront directement investies dans le financement de logements sociaux dans les communes volontaires pour construire. Interviewée sur RTL, Cécile Duflot s'est justifié en rappelant que "1,7 million de familles attendent un logement social" et que "mille maires refusent d'appliquer la loi".
L'autre volet de cette loi concerne la mobilisation d'ici à 2016 de 930 terrains appartenant à l'Etat ou à des établissements publics, comme la SNCF, soit 2 000 hectares de terrains nus ou bâtis, susceptibles d'accueillir 110 000 logements, selon le ministère. Ils pourraient être cédés, avec une décote allant jusqu'à la gratuité, aux collectivités locales. L'objectif est de couper l'herbe sous le pied des communes se cachant derrière le manque de terrains disponibles.
Examinée le 10 septembre en première lecture au Sénat, le texte devrait subir une attaque de front de l'opposition, à l'image du long débat sur la loi SRU du gouvernement Jospin en 2000. Un premier test majeur pour la nouvelle majorité dans un Palais du Luxembourg où la voix des maires trouve souvent de l'écho.
2Une nouvelle loi Scellier rapidement mise en place
Certains propriétaires anxieux pourraient retrouver un peu de sérénité en janvier prochain. La loi Scellier, qui offre une réduction d'impôt contre un achat de logement limité à 300 000 euros et une location pendant neuf ans, va s'éteindre fin 2012. Mais un dispositif comparable va être intégré à la loi de finance 2013, publiée le 24 septembre prochain. L'annonce était attendue, notamment par les gros groupes immobiliers comme Nexity. Son patron, Alain Dinin, comptait sur l'arrivée d'un nouveau dispositif d'aide à l'investissement locatif : "Il y aura autre chose, de toute façon, ils [les pouvoirs politiques] n'ont pas le choix" avançait-il en février sur Boursier.com.
Mais ce nouveau dispositif ne sera qu'un lointain cousin de la défunte loi Scellier. Comme l'a annoncé Cécile Duflot, il aura d'abord une dimension plus sociale. Le plafond de loyer imposé au propriétaire sera ainsi revu à la baisse. Ensuite, les zones éligibles seront réétudiées et probablement moins vastes. Ce zonage "plus fin" se basera sur les travaux de l'Agence nationale pour l'information sur le logement et de l'Observatoire des loyers de l'agglomération parisienne, qui doivent finir leur mission "avant la fin de l'année", assure la ministre. L'objectif, comme elle le confie aux Echos, est de lutter contre le phénomène de "l'investisseur qui n'arrive pas à louer" à cause d'un "problème de localisation". Elle prend ainsi l'exemple du Pays basque, jusqu'ici exclu du dispositif Scellier à cause des prix des logements sur le littoral, alors que l'intérieur des terres correspond aux critères.
Cécile Duflot reste confiante sur l'attractivité de cette loi Scellier nouvelle formule, notamment pour les investisseurs institutionnels qui seront incités à investir dans la pierre. Et selon la ministre, pour eux, "la période est favorable du fait de l'instabilité des marchés financiers". Pour les particuliers, ce dispositif sera au final fiscalement moins avantageux, car il ne permettra plus une réduction d'impôt déduite du montant à payer, mais une déduction sur le revenu imposable. Et cette formule, moins couteuse pour l'Etat, risque au final de favoriser les hauts revenus comme l'explique Economiematin.fr.
3Une grande loi à venir en 2013
L'été 2012 a donné un premier aperçu de ce que sera l'esprit de la future loi sur le logement promise dans le Nouvel Observateur par Cécile Duflot. Depuis le 1er août, les loyers sont encadrés dans 38 agglomérations françaises. Dans ces villes, où les prix sont jugés excessifs, impossible d'augmenter un loyer au-delà de l'indice de référence, lors d'une relocation ou d'un renouvellement de bail. Dans le futur texte prévu pour le printemps 2013, cet encadrement sera affiné. En se basant sur les études menées par l'observatoire mobilisé pour la nouvelle loi Scellier, le zonage des communes concernées sera ainsi revu selon un "pilotage très fin".
Ce texte permettra peut-être également la réforme d'un dispositif que les ménages ont du mal à obtenir : le prêt à taux zéro +. Depuis fin 2011, ce prêt, dont les intérêts sont pris en charge par l'Etat, ne concerne que les premiers achats de résidences principales neuves ou issues du parc HLM. Cécile Duflot assure aujourd'hui réfléchir à "rouvrir le PTZ+ à l'immobilier ancien".
La ministre veut également en profiter pour mettre en place une nouvelle garantie des risques locatifs (GDL), dispositif qui couvre les risques d'impayés pour le propriétaire et permet notamment au locataire d'accéder à un logement sans payer de caution. Une GDL plus universelle pourrait être incluse dans la loi 2013.
Enfin, cette loi devrait comprendre une révision de la loi Hoguet, qui encadre l'activité des professionnels de l'immobilier. Elle date de 1970 et Cécile Duflot estime qu'elle a besoin d'être dépoussiérée sans préciser sa pensée. Là encore, de longues négociations risquent d'être nécessaires avec les représentants d'un secteur en crise qui annonce déjà la suppression de 5 000 emplois en 2012.
Autant d'épineux obstacles qui risquent, comme l'analysent Les Echos, de repousser à l'automne cette loi dont l'éclosion est pourtant prévue au printemps. Difficile de savoir alors si la fleur, annoncée comme splendide, aura toujours la même couleur.
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