Dépression Kirk : comment expliquer l'arrivée sur la France de ce qui était un ouragan formé dans l'Atlantique ?

Article rédigé par franceinfo
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L'ouragan Kirk dans l'océan Atlantique, le 2 octobre 2024, avant sa transformation en tempête et sa transition extratropicale en direction de l'Europe, sur une image de l'Agence américaine d'observation océanique et atmosphérique. (NOAA / MAXPPP)
De fortes rafales sont attendues sur une partie du territoire, mercredi, accompagnées de pluies soutenues. Cet épisode tempétueux est issu d'un phénomène cyclonique tropical.

Prudence à l'approche de la dépression Kirk. Mercredi 9 octobre, l'épisode sera associé "à un très fort coup de vent", avec des rafales de 100 à 130 km/h, et un "épisode pluvieux intense", atteignant en une journée "des quantités [de précipitations] qui tombent habituellement en un mois", prévient Météo-France. Une vigilance orange est annoncée sur de nombreux départements, en particulier dans un couloir allant de la Vendée aux Ardennes. Mais comment expliquer l'arrivée sur l'Hexagone de ce qui était encore, quelques jours plus tôt, un ouragan au milieu de l'Atlantique ?

Les ouragans tropicaux traversent l'océan Atlantique d'est en ouest, depuis l'Afrique jusqu'au golfe du Mexique. Aux Etats-Unis, tous les yeux sont braqués sur Milton, qui s'est creusé fortement en peu de temps en direction de la Floride. Leslie, un autre ouragan, se trouve actuellement dans le centre de l'océan. "Soit ces ouragans s'épuisent en rencontrant le continent ou des eaux froides, soit ils se transforment en tempête de moyenne latitude", explique à franceinfo Fabio d'Andrea, chercheur au laboratoire de météorologie dynamique de l'Ecole normale supérieure.

Dans le second cas, plus rare, les ouragans repartent dans l'autre sens, d'ouest en est, et peuvent voyager plus au nord, hors des zones tropicales, jusqu'aux côtes européennes. "C'est le cas de l'ouragan Kirk, qui a fait ce qu'on appelle une transition extratropicale", souligne Fabio d'Andrea.

La trajectoire de Kirk, d'abord ouragan puis dépression, sur le site Zoom Earth. (ZOOM EARTH)

Les ouragans (aussi appelé cyclones tropicaux) sont identifiables par un vortex, une sorte de tourbillon, avec une forte dépression d'air chaud en leur cœur. Ce qui n'est plus le cas de Kirk, qui s'est transformé en tempête, avec une dépression d'air froid au cœur du vortex. "La physique de ces deux phénomènes est très différente, précise Fabio d'Andrea. On prévoit des vitesses de vent de 100 à 130 km/h, ce qui est très fort, et des pluies importantes. Mais l'épisode Kirk ne revêtira pas de caractère extraordinaire. A titre de comparaison, les ouragans tropicaux, dans leur forme la plus intense, peuvent avoir des vents atteignant 300 km/h."

Avec le réchauffement climatique, les ouragans devraient encore gagner en intensité. "On a du mal à reproduire ces phénomènes dans nos modèles numériques, mais on peut prévoir un changement dans leurs ingrédients, notamment la température de surface de la mer, qui est le moteur thermodynamique des ouragans", explique Fabio d'Andrea. "Celle-ci va très probablement augmenter et les ouragans vont tirer davantage d'énergie de la mer". Cette hausse des températures, en revanche, n'a pas d'incidence sur la fréquence de ces épisodes.

Les ouragans intensifiés par le réchauffement climatique

"Selon les projections, la proportion de cyclones tropicaux intenses (catégorie 4–5) et la vitesse maximale des vents des cyclones tropicaux les plus intenses augmenteront avec la hausse du réchauffement planétaire", soulignait également le Groupe d'experts intergouvernemental sur le climat (Giec) dans son dernier rapport. "Dans l’Atlantique Nord, les précipitations totales des ouragans Katrina, Irma, Maria, Harvey, Dorian et Florence ont toutes été rendues plus intenses (de 4%, 6%, 9%, 15%, 7,5% et 5%, respectivement) par le changement climatique", relève pour sa part World Weather Attribution, un réseau de scientifiques internationaux.

Mais le réchauffement climatique va-t-il entraîner davantage de ces transitions extratropicales vers nos latitudes ? Une étude parue en juillet dans la revue Nature relevait une augmentation de la fréquence de ces tempêtes issues de phénomènes tropicaux près de l'Europe occidentale entre 1966 et 2020, tout en ajoutant que leur nombre pourrait au contraire diminuer d'ici à la fin du XXIe siècle. "La question est intéressante, mais elle fait toujours l'objet de travaux", répond pour sa part Fabio d'Andrea. Les conséquences du réchauffement climatique sur l'intensité de ces tempêtes spécifiques restent également incertaines. "On peut imaginer qu'elles seront un peu plus fortes en raison de l'augmentation de l'humidité et que la précipitation qui suit ces tempêtes sera un peu plus forte, mais à ce stade, il n'y a pas de certitude."

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