Côte d'Ivoire : une association en lien avec un groupe anti-avortement américain épinglée par openDemocracy
Etoile du Matin est "affiliée" à l'association Heartbeat International, basée dans l'Ohio et proche de l'ancien président Donald Trump, affirme le média britannique.
Une association ivoirienne d'aide aux femmes enceintes accusée de les dissuader d'avorter. C'est ce que révèle une enquête du média britannique openDemocracy publiée le 24 février sur le centre Etoile du Matin basé à Abidjan. Lequel a, selon l'enquête, des liens avec Heartbeat International, un groupe anti-avortement américain.
"Avorter c'est un meurtre"
Un sénateur s'inquiétant de la présence d'un tel centre en Côte d'Ivoire et plusieurs témoignages de femmes ont amené une journaliste d'openDemocracy à enquêter sur Etoile du Matin, "centre de crise sur la grossesse", ainsi qu'il se définit. La journaliste s'est fait passer pour une femme souhaitant avorter après avoir été violée par son oncle. "Avorter c'est un meurtre. Le meurtre est puni par la loi", lui a notamment affirmé une conseillère qui l'a reçue avant de lui fournir "des informations erronées sur les lois et les faits médicaux concernant l'avortement".
"La loi est claire: une femme qui a été violée a le droit d'avorter. Cette ONG s'attaque aux droits des femmes (...) le gouvernement doit agir pour démanteler ces groupes."
Carelle-Laetitia Goly, avocate ivoirienne et militante pour les droits des femmesopenDemocracy
Sur sa page Facebook, Etoile du Matin – qui déconseille par ailleurs la contraception –, déclare : "Enceinte et désespérée, vous désirez parler à quelqu’un ? Nous sommes là pour vous. Sans vous juger, nous vous prêtons une oreille attentive" au-dessus des hashtags #ProLifeMouvement #NoToAbortion #YesForLife. Contactée par openDemocracy et l'AFP, l'Etoile du Matin n'a pas souhaité répondre.
Des centres identifiés en Afrique de l'Ouest
Selon openDemocracy, Etoile du Matin est "affiliée" à l'association Heartbeat International, basée dans l'Ohio et proche de l'ancien président Donald Trump, ainsi qu'à l'Association for Life of Africa, une organisation anti-avortement basée en Zambie, soutenue financièrement par Heartbeat, dont "l'objectif est de créer un réseau régional pour promouvoir des alternatives à l'avortement".
Si openDemocracy avait montré début 2020 la présence de ces centres prodiguant des conseils anti-avortement et anti-contraception dans 18 pays, dont l'Afrique du Sud, d'autres ont été identifiés depuis dans des pays francophones d'Afrique de l'Ouest, comme le Cameroun, la Côte d'Ivoire et le Togo.
Jusqu'à 300 000 avortements chaque année
"Faire peur ou faire culpabiliser les femmes ne devrait pas être toléré dans un pays où les avortements clandestins sont une des principales causes de mortalité maternelle", a déclaré à openDemocracy Nènè Fofana-Cissé, ex-directrice pour l'Afrique de l'Ouest et centrale de l'ONG américaine EngenderHealth spécialisée sur les questions de santé sexuelle.
L'avortement est puni de six mois à deux ans de prison par le code pénal ivoirien, mais il est légal si la vie de la mère ou du fœtus est menacée ou si la grossesse est issue d'un viol. Malgré le caractère illégal de l'IVG en Côte d'Ivoire, il y a entre 200 000 et 300 000 avortements chaque année dans le pays, selon les sources.
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