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Bénin : 20 ans de prison pour l'opposante Reckya Madougou

Sa candidature à la présidentielle d'avril 2021, qui a vu la victoire de l'actuel président Patrice Talon, avait été rejetée.

Article rédigé par franceinfo Afrique avec AFP
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Un des partisans de Reckya Madougou arbore un t-shirt à son effigie le 10 décembre 2021, jour de son procès. Ils s'étaient rassemblés devant la Cour de répression des infractions économiques et du terrorisme (Criet) qui a jugé l'opposante, à Porto-novo, la capitale politique du Bénin. (YANICK FOLLY / AFP)

L'opposante béninoise et ancienne garde des Sceaux Reckya Madougou, 47 ans, a écopé le 11 décembre de 20 ans de prison pour "terrorisme" devant un tribunal spécial de Porto-Novo, la capitale politique du Bénin. Elle a été reconnue coupable de "complicité d'actes terroristes" par la Cour de répression des infractions économiques et du terrorisme (Criet). L'opposante, qui avait plaidé non coupable, a été condamnée à la peine requise par le procureur. Mise en examen et écrouée début mars, elle est accusée d'avoir financé une opération visant à assassiner des personnalités politiques pour empêcher la tenue du scrutin présidentiel d'avril dernier et ainsi "déstabiliser" le pays. En juillet, ses avocats avaient saisi le groupe de travail sur la détention arbitraire des Nations unies pour dénoncer ses conditions de détention "inhumaines" et demander qu'il adresse "un appel urgent à l'Etat du Bénin afin qu'il procède à sa libération immédiate".

Candidate du parti de l'ancien président Yayi, devenu ennemi politique de Patrice Talon

Investie par le parti "Les Démocrates" de l'ancien président béninoisThomas Boni Yayi, désormais ennemi du président Talon, Reckya Madougou s'était portée candidate à la présidentielle de 2021 en dénonçant notamment l'absence de pluralisme électoral. En signe d'apaisement, Patrice Talon, richissime homme d'affaires ayant fait fortune dans le coton et élu une première fois en 2015, avait reçu en septembre Thomas Boni Yayi – ancien allié devenu critique de la présidence et qui réclame la libération des opposants politiques –, cinq ans après leur dernière rencontre. L'ancienne ministre, dont la candidature à l'élection présidentielle du 11 avril avait été finalement rejetée, avait été arrêtée à quelques semaines du scrutin qui a vu le président Patrice Talon décrocher un second mandat avec plus de 86% des voix. 

Installée par le pouvoir en 2016, la Criet est accusée par ses détracteurs de servir à museler l'opposition, au bénéfice du président Talon, engagé dans un tournant autoritaire au nom du "développement de son pays", selon l'oppositionDe son côté, le gouvernement affirme que la Criet est un organe totalement indépendant, jugeant de manière impartiale et faisant fi des appartenances politiques. Pourtant, moins d'une semaine avant l'élection présidentielle d'avril, le juge de la chambre des libertés de la Criet, Essowé Batamoussi, avait fui le pays et dénoncé des pressions exercées par le pouvoir, notamment pour l'incarcération de Reckya Madougou.

La Criet, une cour aux ordres selon l'opposition

"Cette cour a délibérément décidé de clouer au pilori une innocente", a déclaré cette dernière, peu avant l'annonce de sa condamnation, qu'elle a accueillie d'un léger sourire. "Je n'ai jamais été et je ne serai jamais une terroriste""C'est triste pour notre justice. Je maintiens qu'il n'y a pas de preuve", a déclaré pour sa part à l'AFP un de ses avocats, Me Robert Dossou. "Jugée à 6h00 du matin, sans témoins, sans pièces, sans preuve, Reckya Madougou condamnée à 20 ans de prison par trois suppôts du pouvoir. Son crime : avoir incarné une alternance démocratique au régime de Patrice Talon", a réagi sur Twitter un autre de ses avocats, Me Antoine Vey.

Quelques jours plus tôt, le mardi 7 décembre, la Criet avait condamné l'opposant Joël Aïvo à 10 ans de prison notamment pour "complot contre l'autorité de l'Etat" et "blanchiment de capitaux". L'universitaire, en détention depuis huit mois, avait été arrêté au lendemain de la réélection du président Talon. La même cour avait condamné en 2018, puis en 2020, par contumace Sébastien Ajavon  important opposant arrivé troisième lors de la précédente présidentielle −, à 25 ans de prison au total pour trafic de drogue et "faux, usage de faux et escroquerie". A l'instar de la majorité des figures de l'opposition au Bénin, il vit désormais en exil. 

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