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Zimbabwe : des fermiers blancs pourront récupérer leurs terres confisquées lors de la réforme agraire

Ils pourront prétendre à des indemnisations, au droit de louer les terres, pas à leur propriété, indique le président du Zimbabwe, Emmerson Mnangagwa.

Article rédigé par Jacques Deveaux
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Depuis quelques années, une poignée de fermiers militants noirs et blancs cultivent ensemble les mêmes terres détenues par des banques, comme dans cette ferme d'Arcturus, non loin d'Harare, la capitale du Zimbabwe, en juin 2018. (ZINYANGE AUNTONY / AFP)

"Robert Mugabe doit se retourner dans sa tombe." C'est en ces termes que le site d'information iharare.com commente la décision de restituer aux fermiers blancs les terres qui leur avaient été confisquées lors de la réforme agraire.

"Toute personne qui désire obtenir le titre de propriété d’une terre agricole acquise, qui était auparavant son exploitation agricole, peut en faire la demande par écrit au ministre, qui en saisit le comité", précise le texte gouvernemental. La compensation financière ou la rétrocession des terres seront examinées par un comité qui pourra y donner suite ou pas.

Une brèche dans la réforme agraire

Quoi qu'il en soit, cette annonce constitue une sérieuse remise en cause de la politique menée en son temps par Robert Mugabe, le héros de l'indépendance. Car la réforme agraire a été un puissant marqueur de la fin du pouvoir blanc au Zimbabwe.

A son arrivée au pouvoir, Robert Mugabe se garde bien de toucher au système agraire hérité de la colonisation britannique. L'agriculture est prospère et fait du Zimbawe le grenier à blé de la région. Mais la situation économique du pays devient catastrophique du fait de la mauvaise gouvernance économique.

En 2000, les occupations de fermes se multiplient. Les actions sont parfois violentes. (ALEXANDER JOE / AFP POOL)

Aussi, en 2000, des hommes s'emparent par la force des fermes détenues par les Blancs. Des expropriations sauvages soutenues par le pouvoir au nom des droits de la majorité noire.

Car il y a ce constat d'injustice, hérité de la loi sur le foncier de 1969 de l'ancienne Rhodésie. Un partage moitié-moitié des terres arables entre Blancs et Noirs, 15 millions d'hectares chacun. Sauf qu'il y a 6 000 fermiers blancs contre 700 000 familles noires vivant de l'agriculture et que les Blancs ont les meilleures terres. Il y a l'opulence pour les uns et la misère pour les autres.

Confiscation des terres

En 2000 donc, sous la pression des anciens combattants et des syndicats, le pouvoir lance sa réforme agraire. Elle veut corriger les inégalités de la colonisation, mais remplace une spoliation par une autre. En trois années, 90% des terres sont saisies.

Mais le pire est à venir. Car Mugabe distribue les terres à ses obligés, anciens soldats de l'indépendance, mais piètres agriculteurs. Sans connaissance et sans moyens, ils sont incapables de tenir les rendements. Parfois même, ils abandonnent les terres et le Zimbawe connaît ses premières famines.

Depuis, le pays se débat dans une crise sans fin, y compris alimentaire. Et cette décision de restitution sonne comme un appel à ceux qui voudraient revenir au Zimbabwe afin de relancer son économie.

Rétro pédalage

Mais la nouvelle a suscité pas mal d'émoi dans le pays et le président Emmerson Mnangagwa a dû mettre les points sur les i, le mercredi 18 mars 2020. "Il ne s'agit pas de l'abandon de la réforme agraire, a-t-il précisé. Notre peuple a récupéré sa terre, avec ou sans faim ; avec ou sans récoltes exceptionnelles, nous avons repris nos terres. Nous aurons notre terre pour toujours", a martelé le président.

"Donc, ceux qui veulent se réengager avec nous doivent admettre que la terre du Zimbabwe appartient au peuple du Zimbabwe. Il n'y a aucune négociation sur cette question. Nous sommes allés à la guerre à cause de la terre. La terre est l'héritage de notre future génération."

Statu quo ?

Un rétro pédalage certain ! A bien l'entendre, on en resterait donc, pour les éventuels candidats, à la seule location des terres. Et le comité ad hoc chargé d'étudier les demandes se prononcera sûrement plus souvent pour la compensation financière. Mais le virage de l'après-Mugabe est clairement pris.

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