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Etats-Unis. Pourquoi l'affaire Akin pourrait rendre service à Romney

Les propos d'un républicain ultraconservateur sur les grossesses en cas de "vrai viol" ont soulevé l'indignation de toute la classe politique américaine. Mais l'affaire n'est pas si néfaste qu'il y paraît pour le candidat à la présidentielle. FTVi vous dit pourquoi.

Article rédigé par Marion Solletty
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3 min
Le candidat républicain à la présidentielle américaine, Mitt Romney, le 22 août lors d'un meeting à Bettendorf, dans l'Iowa (Etats-Unis). (JEWEL SAMAD / AFP)

PRESIDENTIELLE AMERICAINE - A première vue, la polémique déclenchée par les propos sur le viol du républicain Todd Akin est une véritable tuile pour Mitt Romney. En expliquant qu'un "vrai viol" débouchait rarement sur une grossesse, Akin, candidat à un siège de sénateur dans le Missouri, a provoqué une vague de protestations sans précédent.

L'affaire a mis en lumière les opinions extrêmes de certains républicains, et détourné le public du sujet que Romney aimerait garder au cœur de la campagne : l'économie. Ravis de l'aubaine, les démocrates se frottent les mains. Ils ont peut-être tort… FTVi vous explique pourquoi.

Parce que le camp républicain est uni

Pour une fois, le dérapage met tout le monde d'accord. Les démocrates crient au scandale, les républicains aussi. L'ensemble des ténors du parti, le candidat à la présidentielle Mitt Romney compris, ont condamné les propos de Todd Akin.

Il faut dire que sa sortie met en danger la position de tout le parti à l'échelle nationale : le siège de sénateur qu'il convoite dans le Missouri est un de ceux que les républicains espèrent arracher aux démocrates pour reconquérir une majorité au Sénat. Et les républicains n'entendent pas le laisser filer à cause d'une erreur aussi grossière. Todd Akin fait donc face à une pression énorme de son camp pour se retirer en faveur d'un autre républicain.

Mais même si l'indignation unanime du parti républicain obéit à des motifs aussi bien électoraux que moraux, elle a le mérite d'exister. Lors de l'affaire Rush Limbaugh, du nom de cet animateur radio ultraconservateur qui avait traité de "traînée" une étudiante venue défendre le financement de la contraception au Congrès, Mitt Romney et ses lieutenants s'étaient contentés de déclarations frileuses, sans condamner ouvertement un comportement pourtant plus qu'outrancier. Et le camp Obama n'avait pas manqué de le souligner.

Parce que les modérés reprennent des couleurs

Cette fois, l'épisode a permis à l'aile modérée du parti de sortir du bois. Asphyxiée par sa radicalisation depuis 2010, les élus républicains aux vues plus mesurées peuvent enfin faire entendre leur voix sans prendre une volée de bois vert.

Le sénateur du Massachusetts, Scott Brown, menacé par la démocrate Elizabeth Warren dans son Etat, a été le premier à appeler Akin à se retirer, expliquant qu'il n'y avait "aucune place dans le discours [du parti] pour ce genre de raisonnement  odieux". Le républicain modéré a aussi, chose plus rare, critiqué ouvertement la position dominante du parti sur l'avortement, entérinée mardi 21 août par un programme officiel le condamnant, quels qu'en soient les motifs.

"Je crois que (ce programme) est une erreur, car il refuse de prendre en compte l'opinion de républicains favorables au droit à l'avortement, comme moi-même. (…) Si nous voulons croître et prospérer dans ce grand pays, nous nous devons d'être un parti ouvert et tolérant", a-t-il écrit dans une lettre au président du comité national républicain. D'autres figures de l'aile modérée, comme Olympia Snowe, une sénatrice républicaine respectée du Maine, ont également réagi. 

 Parce que Romney n'a plus à se cacher

Autrefois considéré comme un modéré, favorable au droit à l'avortement, Mitt Romney a changé plusieurs fois son fusil d'épaule avant de se définir comme "pro-life" convaincu. Le choix du très conservateur Paul Ryan comme colistier semblait confirmer un alignement de facto avec l'aile droite du parti. 

Il pourrait profiter de cet épisode pour remettre les pendules à l'heure. L'affaire Akin "donne à Romney, Scott Brown et d'autres l'opportunité de mettre un peu de distance entre eux et la base [ultraconservatrice] du parti", explique ainsi Rob Stutzman, un spécialiste en communication politique qui a travaillé pour Romney en 2008, cité par Politico

S'il restait volontairement vague sur le sujet dans son programme officiel (en anglais), Mitt Romney a d'ailleurs clarifié les choses après l'épisode Akin : non, il n'est pas opposé à l'avortement en cas de viol, a précisé son équipe de campagne. Et tant pis pour les opinions de son colistier, qui a dû s'aligner. 

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