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Bahamas : après l'ouragan Dorian, les expulsions d’Haïtiens suspendues pour les inciter à se rapprocher des autorités

Dix jours après le passage dévastateur de l’ouragan meurtrier Dorian sur l’archipel des Bahamas, 1 300 personnes sont toujours introuvables. Parmi eux, de nombreux Haïtiens qui, par peur d’être interpellés par les services de l’immigration, ont attendu jusqu’au dernier moment avant d’évacuer la zone.

Article rédigé par Thibault Lefèvre, Gilles Gallinaro
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3min
Des sinistrés attendent d'êter évacués par bateau après l'ouragan, le 7 septembre 2019. (BRENDAN SMIALOWSKI / AFP)

Elle s’appelle Jenny, c’est une amie de longue date de Towel. Comme ce pêcheur d’Abaco, elle a une cinquantaine d’années  et a toujours vécu sur l’île. Mais depuis dix jours, elle est introuvable. Comme 1 300 autres disparus dans l’archipel des Bahamas, dévastés dix jours plus tôt par l’ouragan Dorian. Le nombre officiel de morts, lui, est de 50 victimes sur les îles de Grand Bahama et surtout d’Abaco, particulièrement touchée. Et c’est peu dire qu’il étonne. Towel, lui, désespère de retrouver un jour son amie. "Je ne sais pas où elle est, soupire-t-il. La police trouve des corps mais ils ne savent pas à qui ils sont car ils peuvent être abimés. Il peut y avoir des corps partout, dans la mer ou dans la forêt. Il y a aussi de nombreuses personnes qui ont été évacuées, qui ont pris l'avion..." 

De nombreux Haïtiens parmi les morts ou disparus

Les quartiers les plus touchés d’Abaco sont les plus pauvres, peuplés essentiellement d‘immigrants haïtiens, pour certains sans-papiers. Julie, qui en connaît quatre, est remontée contre son gouvernement.

Je pense que les Français ou n’importe qui ailleurs qu'aux Bahamas se serait précipité dans les abris si le gouvernement l’avait demandé.

Julie

à franceinfo

"Ici, fulmine Julie, les gens ont attendu la dernière minute, parce qu’ils imaginaient que les services de l’immigration allait les interpeller. C’est ce qu’ont cru beaucoup de personnes parce que la plupart des morts sont Haïtiens. Et selon moi, c’est la faute du gouvernement." Pour répondre au début de polémique et inciter les Haïtiens sans papiers à se manifester, le gouvernement bahaméen a décidé de suspendre momentanément les procédures d’expulsion.

Une nouvelle tempête pourrait s'abattre sur le nord de l'archipel

Car le calvaire des Bahaméens n’est peut-être pas terminé : le nord de l’archipel pourrait être balayé dans les prochains jours par une dépression ou pire, une nouvelle tempête tropicale. Son nom est pour le moment "Nine", mais elle pourrait rapidement prendre le nom d’"Humberto" en cas de formation avérée. Selon le National hurricane center, Nine a entre 70 et 80% de probabilités de se former et les premières grosses pluies sont attendues pour le week-end.

Traumatisé, Gary ne veut surtout pas revivre les mêmes scènes : "Quand il commence à pleuvoir, j’ai l’impression que la tempête revient, confie-t-il, la voix paniquée. J’ai des flashbacks, je vois des débris voler… "

Cela pourrait me causer un nouveau traumatisme. Je vais faire mes affaires et partir. Je ne resterai pas.

Gary

à franceinfo

Pour les derniers habitants qui ne pourront pas quitter l’île, faute de moyens ou d’informations, les associations humanitaires commencent à travailler sur un plan d’urgence, tandis que 200 soldats néerlandais et allemands, ainsi que 50 soldats français, sont arrivés en renfort sur Abaco jeudi.

Après l'ouragan Dorian, les expulsions d’Haïtiens suspendues aux Bahamas pour les inciter à se rapprocher des autorités - reportage Thibault Lefèvre

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