Un an après le coup d’Etat en Birmanie, des exilés témoignent : "Il reste de l'espoir, la majorité ne veut pas des militaires"
Des dizaines de milliers de Birmans ont quitté leur pays depuis février dernier, après que la junte militaire a arrêté la cheffe du gouvernement civil, Aung San Suu Kyi, et placé ses généraux au pouvoir. franceinfo est allé à la rencontre de certains de ces exilés qui ont été accueillis en France.
C’était il y a pile un an en Birmanie : l’armée renverse le gouvernement et arrête Aung San Suu Kyi. Le peuple se soulève contre ce coup d’Etat et les manifestations sont réprimées dans le sang. D’après les estimations, 1 500 civils sont tués et 12 000 opposants arrêtés.
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Par milliers, des Birmans ont quittés leur pays. Certains se sont réfugiés en France, comme Yadanar, que franceinfo retrouve dans un parc de Marseille, où elle espère s’installer avec son mari français. Cette artiste a fui la Birmanie en avril et elle se souvient précisément du coup d’Etat. "J'étais surprise, tremblante, même, et je me sentais désespérée, se souvient-elle. Alors, avec mes amis, on a rejoint les manifestations. On a écrit des slogans sur des pancartes : Rejeter le coup d'Etat, Liberté, Démocratie. Et au fil des jours, il y avait de plus en plus de monde..."
Trop exposée, Yadanar a pris le chemin de l'exil
Yadanar ouvre son ordinateur pour montrer des images de ses performances militantes après le coup d’Etat. Sur une vidéo, visionnée plus de deux millions de fois sur Facebook, elle est assise sur une chaise dans un quartier animé de Rangoon, vêtue d’une robe blanche maculée de sang, les pieds enchaînés, entourée d’une foule de manifestants dénonçant le putsch.
Après cela, difficile pour Yadanar de rester en Birmanie : l’armée tue et emprisonne les opposants. Aussi prend-elle le chemin de l'exil et se réfugie en France. Un an après, dit-elle, la résistance contre la junte n’a pas baissé les bras en Birmanie… "Ces manifestations continuent encore aujourd'hui, un an après, et je ressens à chaque fois des frissons, indique-t-elle. Le camp d'en face est puissant. Ils ont plus d'argent, plus d'armes. Mais la majorité des gens ne veulent pas des militaires, donc il reste de l'espoir."
Koh Latt a de son côté rejoint les groupes armés
Koh Latt, artiste lui aussi, a fui également la Birmanie en novembre. Grâce à l’aide de l’Institut français à Rangoon, il a pu rejoindre son amie Yadanar en France. Mais avant cela, dans son pays, il a fait un choix plus radical et rejoint au printemps les groupes armés qui résistent aux militaires.
Koh Latt intègre les Forces de défense populaires, formées en mai dernier par le gouvernement birman en exil pour combattre la junte au pouvoir. "On est allés très loin dans la jungle et c'est comme un camp de formation militaire, explique-t-il. On doit se lever à 4 heures du matin. Au début, on nous donne des bambous en guise de fusil, car il n'y a pas assez d'armes. Et après un mois et demi, on nous donne un vrai fusil pour une semaine. C'est très dur. Il y a peu à manger et on nous réveille souvent la nuit avec de fausses alertes à la bombe pour qu'on s'entraîne à fuir. Donc, on ne peut pas vraiment dormir." Koh Latt finira par regagner Rangoon avant de fuir son pays. Comme Yadanar, il se dit convaincu que l’armée finira par tomber.
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