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Egypte : l'opposant Mohamed El-Baradei pressenti Premier ministre par interim

La présidence égyptienne a annoncé dans la soirée que ce ténor de l'opposition n'avait pas été officiellement nommé.

Article rédigé par franceinfo avec AFP
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Temps de lecture : 6min
Le prix Nobel de la Paix Mohamed El-Baradei, leader de l'opposition, lors d'une allocution à la télévision égyptienne, le 3 juillet 2013. (EGYPTIAN TV / AFP)

Confusion autour de la nomination de Mohamed El-Baradei comme chef du gouvernement égyptien par intérim. Alors qu'elle avait été annoncée, samedi 6 juillet par le mouvement Tamarrod au lendemain d'affrontements qui ont fait une trentaine de morts, la présidence égyptienne a affirmé dans la soirée que le Premier ministre n'avait pas été officiellement nommé. Des négociations sont encore en cours avec des dirigeants du parti salafiste d'Al-Nour pour tenter de les convaincre de se rallier au choix de Mohamed El-Baradei.

La désignation de ce ténor de l'opposition à Mohamed Morsi et ex-chef de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) apparaît pourtant comme le "choix le plus logique" pour la présidence, qui entend former un gouvernement de transition avant des élections générales à une date non précisée, a indiqué un conseiller du président intérimaire Adly Mansour.

 

Qui est Mohamed El-Baradei ?

Agé de 71 ans, Mohamed El-Baradei a peu vécu en Egypte, il est connu comme une des figures de proue de la mouvance laïque et libérale. Chargé mardi par l'opposition de la représenter dans la transition politique, il est populaire parmi les militants pro-démocratie pour ses combats contre Hosni Moubarak, puis Mohamed Morsi.

Chef de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) de 1997 à 2009, il est réputé intègre et austère. En 2005, il a reçu le prix Nobel de la Paix pour son travail et celui de l'AIEA contre la prolifération des armes nucléaires. 

Son nom circulait avec insistance au Caire depuis que l'armée a renversé le président islamiste Mohamed Morsi. S'il devient Premier ministre, il devra s'atteler à relever une économie en lambeaux et rétablir la paix civile et la sécurité. La feuille de route, élaborée par l'armée en coordination avec l'opposition et les principaux dignitaires religieux du pays, prévoit un gouvernement intérimaire "doté de pleins pouvoirs", avant la tenue d'élections présidentielle et législatives à une date non précisée. 

Les islamistes se mobilisent à nouveau

Les partisans du président islamiste déchu Mohamed Morsi se sont mobilisés en masse samedi pour une nouvelle démonstration de force face à l'armée.

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C'est dans un climat de vives tensions alourdi par la flambée de violences qui a fait 37 morts en 24 heures, que Mohamed El-Baradei doit prêter serment dans la soirée, selon une source militaire. Devant le palais présidentiel, des dizaines de personnes en liesse ont aussitôt afflué, brandissant des drapeaux égyptiens sur fond de chants patriotiques.

Alors que le pays profondément divisé est en proie depuis plusieurs jours à des manifestations de partisans de Mohamed Morsi, premier président démocratiquement élu d'Egypte, et de ses opposants, l'armée est déployée en force pour tenter de prévenir de possibles nouveaux affrontements.

Par dizaines de milliers, les partisans des Frères musulmans se sont rassemblés, notamment aux abords d'une mosquée de Nasr City, un faubourg du nord-est du Caire, qu'ils occupent depuis une dizaine de jours. La puissante confrérie, cible d'une campagne de répression des nouvelles autorités, a demandé à ses partisans de se mobiliser "par millions" jusqu'au rétablissement dans ses fonctions de Mohamed Morsi, élu il y a un an, et pour dénoncer "l'Etat policier" instauré après le "coup d'Etat militaire".

Dimanche, pro et anti se feront face

Dans le camp opposé, sur la place Tahrir, des groupes de manifestants anti-Morsi qui y campent tous les soirs s'y trouvaient, rejoints par d'autres à la veille d'une nouvelle mobilisation dimanche pour soutenir l'éviction du président islamiste à l'appel du mouvement Tamarrod (rébellion en arabe) qui avait organisé les manifestations monstres du 30 juin. Dans ce contexte tendu, le président civil par intérim, le magistrat Adly Mansour, a eu de entretiens avec le général Abdel Fattah al-Sissi, chef de l'armée et nouvel homme fort du pays, qui l'a nommé mercredi, écartant de facto Mohamed Morsi.

Les islamistes insistent sur le caractère "pacifique" de leur appels à mobiliser, et dénoncent des provocations. Mais des résidents de certains quartiers du Caire ont affirmé à l'AFP avoir vu leurs partisans armés de sabres, de bâtons et d'armes automatiques lors d'une nuit marquée par de graves violences. Dans le quartier de Manial, sur une île au milieu du Nil, des habitants ont fait état de combats à l'arme automatique et à l'arme blanche, et de tireurs embusqués.

Le batiment de la télévision d'Etat gardé par les forces militaires au Caire, le 6 juillet 2013 (AHMED ISMAIL / ANADOLU AGENCY / AFP)
Dans divers endroits de la capitale, des barricades et des rues jonchées de pierres et de pneus calcinés témoignaient des violences des accrochages nocturnes, tandis que les forces anti-émeutes était présentes à plusieurs carrefours et sur des ponts, avec des hommes en armes.

Les accès à la place Tahrir étaient quant à eux contrôlés par des anti-Morsi armés de bâtons.La veille, les affrontements entre pro et anti-Morsi, mais aussi entre pro-Morsi et soldats, ont fait 30 morts et plus d'un millier de blessés, essentiellement au Caire et à Alexandrie (nord), les deux plus grandes villes du pays. Dans la péninsule instable du Sinaï (nord-est), cinq policiers et un soldat ont été tués dans des attaques d'islamistes et un prêtre chrétien a été abattu par des hommes armés. Depuis leur début le 26 juin, les heurts ont fait plus de 80 morts dans un pays profondément divisé.

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