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Méga projet d’exploitation gazière en Australie : "Une aberration", selon l'ONG Reclaim France

Le nouveau gouvernement australien s'est engagé à soutenir un projet d'exploitation gazière qui émettra plus d'un milliard de tonnes de CO2 au cours de sa durée d'exploitation. 

Article rédigé par franceinfo
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Illustration d'une exploitation gazière en Ukraine, en 2014. (PHOTO D'ILLUSTRATION / SERGEI KOZLOV / EPA)

Les élections australiennes, le 21 mai dernier, ont permis un changement de gouvernement. Les travaillistes ont promis de faire, contrairement à leurs prédécesseurs conservateurs, de la lutte contre le réchauffement climatique leur priorité absolue. Pourtant, la nouvelle ministre des Ressources minières s’est engagée à soutenir un méga projet d’exploitation gazière qui émettra plus d’un milliard de tonnes de CO2 au cours de sa durée d’exploitation.

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"C'est une aberration, aujourd'hui on sait que nous sommes dans un contexte d'urgence climatique. Nous n'avons que trois ans pour atteindre le pic de nos émissions et les baisser drastiquement", s'alarme samedi 4 juin sur franceinfo Lucie Pinson, directrice générale de l'ONG Reclaim Finance.

franceinfo : Ce projet est-il une catastrophe ?

Lucie Pinson : C'est une aberration, aujourd'hui on sait que nous sommes dans un contexte d'urgence climatique. Nous n'avons que trois ans pour atteindre le pic de nos émissions et les baisser drastiquement. Pour cela, pour limiter le réchauffement climatique à +1,5°C qui est l'objectif international adopté par les Etats, nous ne devons plus développer de nouveaux projets tel que ce terminal gazier. Mais également tous les autres : les champs pétroliers, gaziers, ou ceux dans le secteur charbon. C'est un impératif scientifique qui a été aujourd'hui reconnu par les plus hautes autorités en matière énergétique, climatique, scientifique et politique : cela va des experts du Giec aux Nations unies, en passant par l'Agence internationale de l'énergie. Ce type de projet menace directement les objectifs climatiques et nos chances d'éviter des conséquences dramatiques, alors qu'on voit déjà les impacts, de plus en plus concrets, du dérèglement climatique.

Comment s'explique finalement cette décision du gouvernement australien ?

Cela s'explique par des contradictions entre l'agenda climatique qui est porté d'un côté et de l'autre les intérêts des entreprises. Les intérêts économiques de certains vont avoir des relais au gouvernement. Ces incohérences, malheureusement, on va les retrouver en France et dans d'autres pays. Bien entendu, il faut rappeler la responsabilité des politiques mais aussi celle des entreprises qui continuent de poursuivre le développement de ces nouveaux projets. En Australie, on peut le qualifier de "bombe climatique". Il faut rappeler que TotalEnergies, la major pétrolière et gazière française, est également impliquée dans plus de vingt bombes climatiques et des dizaines de nouveaux projets pétroliers et gaziers qui sont tous incompatibles avec nos objectifs climatiques. Et pourtant, là encore incohérence, puisqu'on a TotalEnergies qui a fait le souhait d'atteindre la neutralité carbone à l'horizon 2050 mais qui ne fait rien pour y parvenir. Il y a également la responsabilité des acteurs financiers puisque ces bombes climatiques se développent car il y a des banques, des assureurs, des investisseurs qui apportent leurs soutiens. Et ce terme, de bombe climatique, permet de rendre très concret l'action climatique.

L'opinion publique ne joue-t-elle pas son rôle en Australie ?

On a vu une forte mobilisation de la population en Australie ces dernières années, contre également des projets massifs de mines de charbon. La mobilisation notamment contre le projet de Carmichael, porté par l'entreprise indienne Adani, a permis d'alerter sur les risques environnementaux, sociaux et climatiques liés aux énergies fossiles et à générer une mobilisation vraiment massive de la population australienne dans ce pays. Il y a quelques années nous étions peu à alerter sur ces sujets. Aujourd'hui ça prend, on voit une large part de la population très inquiète, notamment en France, du dérèglement climatique. Malheureusement, ça ne porte pas toujours ses fruits au niveau des élections, ça ne prend pas non plus la place que ça devrait dans les médias. On peut espérer qu'il y ait un sursaut dans l'action demain alors que les impacts du dérèglement se font de plus en plus sentir. On peut espérer que cela fasse un électrochoc auprès des plus réfractaires.

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