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Trois questions sur le dicamba, le (très) puissant herbicide qui pourrait remplacer le glyphosate

Proposé par les sociétés Monsanto, BASF et DuPont, ce désherbant est utilisé sur les mauvaises herbes résistantes au glyphosate. Mais l'herbicide est très volatil et détruit une part importante des cultures environnantes. 

Article rédigé par franceinfo avec AFP
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Des pousses de soja touchées par l'herbicide dicamba, le 25 juillet 2017 à Dell, dans l'Arkansas (Etats-Unis). (KAREN PULFER FOCHT / REUTERS)

Des pesticides de plus en plus puissants. La Commission européenne a de nouveau reporté sa décision sur la licence du glyphosate, cet herbicide classé comme "cancérogène probable" par l'Organisation mondiale de la santé (OMS), jeudi 9 novembre. Pendant ce temps, outre-Atlantique, l'utilisation d'un autre herbicide fait polémique : il s'agit du dicamba, un désherbant remplaçant le glyphosate sur les cultures résistantes.

Une nouvelle formule de ce pesticide, commercialisé dès les années 1960, a été approuvée dans le courant du printemps, rapporte Courrier international. Mais certains agriculteurs et chercheurs remettent en cause cette approbation. Franceinfo répond à trois questions que vous vous posez peut-être sur cet herbicide polémique. 

A quoi sert le dicamba ?

Le dicamba est un désherbant utilisé depuis les années 1960 par les agriculteurs. Jusqu'au printemps dernier, cet herbicide était seulement utilisé avant que les plantes ne sortent de terre. 

Au fil des années, Monsanto a développé des semences de soja et de coton génétiquement modifiées tolérant ce pesticide. Avec ces nouvelles semences, de nouvelles formules du dicamba ont été autorisées. L'herbicide peut désormais être épandu dans les champs plus tard dans la saison. 

Commercialisées par Monsanto, BASF et DuPont, ces nouvelles versions du dicamba ont été rapidement prisées par de nombreux producteurs. Ceux-ci apprécient leur efficacité pour combattre de mauvaises herbes devenues résistantes à d'autres herbicides, tels que le glyphosate. Le dicamba peut par exemple servir à éliminer l'amarante de Palmer, une plante nuisible qui résiste au glyphosate, explique Courrier international.

Pourquoi pose-t-il problème ?

Certains agriculteurs reprochent à la nouvelle formule du dicamba de se disperser au-delà des champs sur lesquels il est pulvérisé. Selon l'Agence américaine de l'environnement (EPA), environ 4% des surfaces cultivées en soja aux Etats-Unis ont été affectées par l'herbicide. Au 15 octobre, un total de 2 708 réclamations liées au dicamba avaient été déposées auprès des agences chargées de l'agriculture. Les agriculteurs font état de feuilles très abîmées, qui se bombent et se plissent.

Près de 1,5 million d'hectares de soja ont été touchés, ainsi que des champs de tomates, de pastèques, de melons, de citrouilles et de légumes. Mais ce n'est pas tout : des cultures de tabac, des vignes, voire des jardins de particuliers ont été contaminés, détaille l'EPA. Les moissons de soja étant encore en cours, l'impact sur les rendements n'est pas encore connu.

Le soja non modifié génétiquement ne résiste pas au contact du dicamba. Selon une étude datant de 2004, citée par Courrier international, le dicamba est 75 à 400 fois plus dangereux pour les plantes qu'il touche accidentellement que le glyphosate, même à très petites doses.

Comment réagissent les autorités ?

L'Arkansas, Etat du sud des Etats-Unis, a interdit les épandages du produit jusqu'à la fin de la saison. Les Etats voisins du Missouri et du Tennessee ont renforcé leurs législations à ce sujet. En parallèle, une dizaine d'Etats américains ont interpellé l'Agence américaine de l'environnement sur le problème. 

Et en Europe ? Le dicamba y est autorisé depuis 2008, rapporte France 24. Pas moins de 27 pays l'utilisent, dont la France. Selon l'ONG Générations futures, citant les données du ministère de l'Agriculture, quelque 220 tonnes de dicamba ont été utilisées en France en 2015. Un chiffre en augmentation depuis 2011. 

"Ici, nous n'avons que l'herbicide et pas encore le package dicamba-graine OGM", explique à France 24 François Veillerette, directeur de Générations futures. "On est à l'abri pour l'instant", tempère-t-il. Il existe cependant un risque, selon lui : que des souches génétiquement modifiées soient importées par erreur des Etats-Unis sur le sol français. 

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