L'Espagne va-t-elle enfin avoir un gouvernement ?
Le Parti populaire de Mariano Rajoy améliore son score à l'issue des législatives de dimanche, mais reste loin de la majorité absolue.
Un demi-sourire pour fêter sa victoire. Le chef du gouvernement conservateur espagnol sortant, Mariano Rajoy, est le seul dont la formation politique a progressé aux élections législatives, dimanche 26 juin, par rapport au scrutin du 20 décembre 2015.
Son Parti populaire (PP) a remporté 137 sièges sur 350 à la chambre basse, avec 33% des suffrages, ce qui correspond à un bond de quelque 500 000 voix. Après six mois de paralysie politique, l'Espagne va-t-elle enfin retrouver un gouvernement ?
Oui, parce qu'à gauche, les adversaires du Parti populaire sont affaiblis
Le Parti populaire, qui a largement devancé ses adversaires, entend en tirer les fruits : "Nous avons gagné les élections (...), nous revendiquons le droit de gouverner", a proclamé dimanche soir Mariano Rajoy, après l'annonce des résultats.
Les autres partis, effectivement, enregistrent un recul ou un coup d'arrêt à leur progression. A gauche, le Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE) a perdu cinq sièges. Il conserve néanmoins sa deuxième position avec 85 sièges, devant l'alliance anti-austérité Unidos Podemos. Car les élections de dimanche ont marqué une stagnation pour le jeune mouvement de Pablo Iglesias : avec 71 sièges, il ne fait pas mieux qu'en décembre.
Ce résultat est une déception pour ce parti de gauche radicale : s'inspirant de la Grèce, où le parti Syriza du Premier ministre Alexis Tsipras avait relégué les socialistes du Pasok au rang d'observateurs, Pablo Iglesias espérait affaiblir considérablement le PSOE et le priver de toute chance de diriger un gouvernement. Sa stratégie a échoué.
Oui, mais avec difficulté, parce que le PP manque d'alliés
Avec 137 sièges, le parti de Mariano Rajoy reste en deçà de la majorité absolue, fixée à 176 députés. Avec qui pourra-t-il gouverner ? Eventuellement avec le parti centriste Ciudadanos ("Citoyens"), lui aussi affaibli puisqu'il n'a obtenu que 32 sièges (contre 40 en décembre). Albert Rivera, le chef de file de Ciudadanos, s'est dit prêt à ouvrir des négociations avec le PP, mais son parti réclame que Mariano Rajoy ne dirige pas une éventuelle coalition.
Cette alliance ne fonctionnera que les socialistes s'abstiennent. Car, à eux deux, le PP et Ciudadanos, avec 169 sièges, n'ont pas la majorité absolue requise.
Autre cas de figure : une "grande coalition" droite-gauche à l'allemande entre le PP et le PSOE. Peu probable à priori, puisque le secrétaire général du PSOE, Pedro Sanchez, a exclu à plusieurs reprises l'idée d'une coalition avec le Parti populaire. Il reste enfin la solution d'un gouvernement minoritaire de la droite, ou encore la possibilité de s'appuyer sur les partis régionaux pour essayer de faire émerger une majorité stable.
Oui, mais pas forcément pour longtemps
Si la droite progresse, ce nouveau scrutin n'a pas pour autant fait émerger une nouvelle donne au Parlement. Ces élections espagnoles viennent donc s'ajouter à l'incertitude politique qui s'est spectaculairement renforcée en Europe depuis la victoire du camp du Brexit au référendum de jeudi dernier au Royaume-Uni.
Dans l'immédiat, une fois que le nouveau Parlement se sera réuni, à partir du 19 juillet, il appartiendra au roi Felipe VI de désigner un candidat au poste de président du gouvernement. Si ce dernier n'obtient pas la majorité absolue, un second vote sera organisé 48 heures plus tard, où s'appliquera seulement la règle de la majorité des suffrages exprimés, l'abstention faisant dès lors baisser le seuil requis.
"Nous nous dirigeons au devant de nouveaux cycles de négociations complexes, dont l'issue la moins mauvaise pourrait être un gouvernement affaibli", note Vincenzo Scarpetta, politologue d'Open Europe à Londres, cité par l'agence Reuters. "La pression sur les socialistes pour qu'ils laissent Rajoy former au moins un gouvernement minoritaire et poursuivre son travail va être énorme", pronostique-t-il.
Et si les négociations échouent…
En cas de nouvel échec, le roi devra proposer un autre candidat. Et si, dans les deux mois suivant le premier vote, aucune majorité ne peut être trouvée, alors l'Espagne devra retourner aux urnes.
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