Comment la guerre en Ukraine entraîne l'huile de tournesol en terrain glissant en France
Ce produit phare de l'alimentation des Français, jusqu'ici en grande partie importé d'Ukraine, se retrouve parfois rationné, aussi bien pour les particuliers que pour les professionnels. Et son prix a considérablement augmenté.
Près d'un mois après le début de l'invasion russe en Ukraine, les effets économiques du conflit se font sentir sur toute la planète. Le Fonds monétaire international a revu, mardi 19 avril, ses prévisions de croissance mondiale pour 2022, désormais chiffrées à 3,6%, contre 4,4% en janvier. Pour la France, la croissance attendue est ramenée à 2,9%, contre 3,5% en début d'année. Dans les commerces français, la guerre a aussi de premières conséquences sur les prix ou la disponibilité de certains produits. C'est le cas de l'huile de tournesol.
"Deux tiers des importations françaises de tournesol proviennent d'Ukraine, principalement pour la fabrication d'huile et de tourteaux pour l'alimentation animale", selon l'ONG Foodwatch. Depuis le milieu de l'hiver, le prix de l'huile de tournesol a progressé de 25 à 30%, selon le journaliste Olivier Dauvers, spécialiste de la grande distribution. "On commence à voir beaucoup de rayons vides ou peu remplis, livre-t-il à franceinfo. Dans un cas sur deux, il y a soit un problème de rupture, soit un rationnement qui a été mis en œuvre."
A La Réunion, pour limiter les achats de précaution, l'enseigne E.Leclerc ne vend ainsi pas plus de trois bouteilles par passage en caisse. Dans l'Hexagone, l'enseigne Metro, qui fournit les professionnels, a mis en place un maximum de 50 litres par client et par jour. Selon l'Association nationale des industries agroalimentaires, l'huile de tournesol, "aujourd'hui rare", sera "presque absente à horizon de trois à quatre mois". "Nos stocks vont jusqu'à juin", a fait savoir le groupe E.Leclerc.
Pour certains professionnels, le prix a triplé
Les restaurateurs et les industriels de l'agroalimentaire sont particulièrement touchés. Une friterie des Ardennes a fait les comptes : "Le bidon de 25 litres de 33 euros est passé à 110euros..." Un fabricant de chips de l'Oise dit aussi avoir vu le prix de la cuve de 1 000 litres bondir. "Début 2021, elle était à 1 100 euros, nous sommes aujourd'hui à 3 600 euros", selon So Chips. Par effet de report, l'huile de colza est de plus en plus prisée, au point de commencer à manquer à son tour. Des restaurateurs ont aussi choisi de se tourner vers la graisse de bœuf, bien moins onéreuse. D'autres ont déjà augmenté les prix à la carte.
Face à ce début de pénurie, des industriels ont demandé aux autorités des dérogations pour vendre des produits "revisités" sans changer les étiquettes. "Modifier l'étiquetage prend beaucoup de temps et les produits ne pourraient plus être proposés à la vente dans l'intervalle", défendait une source du secteur de la distribution, début avril, à l'AFP. Des pâtes feuilletées d'ordinaire élaborées avec de l'huile de tournesol ont ainsi pu être commercialisées avec un ajout d'huile de colza, sans changement d'emballage.
Si Foodwatch dit comprendre "le caractère exceptionnel de la situation", l'ONG estime que "les consommateurs doivent être informés de ces changements d'ingrédients". Elle a lancé une pétition "exigeant la totale transparence", via une information "en rayons" des magasins "et en ligne, pour chaque produit de façon transparente et sans délai". Une source gouvernementale a assuré à l'AFP qu'un "travail" était en cours à ce sujet.
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