: Reportage Guerre en Ukraine : en plein blocus, les producteurs qui n'arrivent plus à vendre leur blé, dans une situation "vraiment critique"
Sur les 1 000 hectares de son exploitation, à Kubei, à une heure de route du port d'Izmaïl, dans le sud de l'Ukraine et à la frontière avec la Roumanie, Fedir Kabak fait pousser du blé, du maïs et de l’orge. Les tonnes de céréales récoltées sont ensuite stockées dans des hangars sur son exploitation. "Là, c'est le blé de cette année. On espérait avoir une plus grande récolte, mais bon, avec la sécheresse, on a du blé vraiment moyen", admet-il. La sécheresse est un coup dur pour ce céréalier, auquel vient s'ajouter le blocus des exportations.
>> DIRECT. Retrouvez ici les derniers développements sur la guerre en Ukraine
Des camions remplis de grains sont bloqués à l'entrée du port d'Izmaïl. Il a été visé, comme le port de Reni, par des frappes russes, aussitôt la fin de l'accord sur les exportations de céréales actée par Moscou lundi 17 juillet. Les ports ukrainiens sur le Danube tournent toujours au ralenti et ce sont des centaines de producteurs qui n’arrivent plus à vendre leur blé.
"On n'a pas la licence pour exporter nous-mêmes directement, on est trop petits, alors on revend les céréales à des plus grands qui, eux, exportent à l'étranger. On dépend d'eux", explique Fedir Kabak. Tant que ses clients n’arriveront pas à livrer leur marchandise toujours bloquée sur les ports du Danube, ils ne lui achèteront pas de blé ou alors à un prix dérisoire.
"Juste avant la guerre, la tonne de blé se vendait 180 dollars ou 200 dollars, précise Dimytro Mykhaïlov, le président de la Chambre d’agriculture d’Izmaïl. Maintenant, c'est 120 ou 130 $. La situation est vraiment critique. Les plus grands producteurs peuvent suivre, mais pour nous, les petits, c'est difficile". Il faut ajouter à cela l’embargo des pays voisins, notamment de la Pologne, de la Roumanie et de la Hongrie. Ils refusent d’importer des céréales ukrainiennes pour ne pas mettre en difficulté leurs propres agriculteurs. "Dans les affaires, il n'y a pas d'amis. Les plus gros mangent les petits. Je peux comprendre leur position, mais ils pourraient nous comprendre aussi et faire une bonne action", estime-t-il.
>> Pourquoi certains pays européens ont décidé d'interdire les importations de céréales ukrainiennes
En attendant que les exportations puissent reprendre, Fedir Kabak fait les comptes et ils ne sont pas bons du tout pour son entreprise agricole : "On n'a tiré aucun revenu de nos activités depuis un an, mais on préserve les employés qui travaillent ici depuis des années parce qu'ils ont des familles. On a réussi à maintenir leurs salaires." La question est de savoir pour combien de temps encore. Si le blocage persiste, le céréalier redoute de devoir licencier certains de ses employés.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.