Guerre entre Israël et le Hamas : où en sont les négociations en vue d'une trêve dans la bande de Gaza ?

A l'issue du premier jour des pourparlers à Doha, au Qatar, la Maison Blanche a salué un "début prometteur", en dépit de l'absence du Hamas et de nouvelles violences en Cisjordanie occupée.
Article rédigé par franceinfo avec AFP
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Un garçon marche dans les rues du camp de Jabaliya, dans le nord de la bande de Gaza, où vivent des réfugiés palestiniens, le 14 août 2024. (OMAR AL-QATTAA / AFP)

Les médiateurs restent "fermement engagés à poursuivre leurs efforts pour parvenir à un cessez-le-feu" à Gaza. A l'issue du premier jour de négociations sur une pause humanitaire dans l'enclave palestinienne, jeudi 15 août, le ministère des Affaires étrangères qatari a insisté, dans un communiqué partagé sur X, sur la détermination de ses émissaires, ainsi que de ceux de l'Egypte et des Etats-Unis, à poursuivre vendredi les discussions en cours à Doha, au Qatar.

D'autant que le porte-parole du Conseil de sécurité nationale à la Maison-Blanche s'est, lui, félicité du "début prometteur" des premiers échanges. Les obstacles "peuvent être surmontés et nous devons parvenir à une solution", a déclaré John Kirby lors d'une conférence de presse à Washington, jeudi. Les Etats-Unis et le Qatar partagent donc l'espoir que ces négociations aboutissent, malgré un grand nombre de difficultés auxquelles elles se heurtent et que vous résume franceinfo.

Le Hamas est absent des discussions

Les Etats-Unis font partie des intermédiaires de ces négociations, représentés au Qatar par le directeur de la CIA, William Burns, et le conseiller de la Maison-Blanche en charge du Moyen-Orient, Brett McGurk. Autour de la table, siègent également des représentants d'Israël, le chef des services de renseignement extérieur (le Mossad) et son homologue pour la sécurité intérieure, le Shin Bet. Enfin, l'Egypte et le Qatar ont aussi envoyé des émissaires qui, selon John Kirby, servent de "médiateurs avec le Hamas".

Le Hamas, en revanche, ne siège pas officiellement à la table de ces négociations, refusant de participer à de nouvelles discussions tant que le plan Biden n'est pas appliqué. L'un de ses représentants se trouve toutefois à Doha. Il a déclaré à l'AFP, jeudi soir : "Tout accord doit aboutir à un cessez-le-feu global, à un retrait [israélien] complet de Gaza, [et] au retour des personnes déplacées""Si les médiateurs parviennent à forcer [Tel-Aviv] à accepter cela, nous participerons [aux discussions]. Mais, jusqu'à présent, il n'y a rien de nouveau", a poursuivi Hossam Badran, membre du bureau politique du Hamas.

De nombreux points de blocage persistent

Chacun des deux camps se renvoient la responsabilité du blocage des négociations, désireux de ne rien céder à l'opposant, mais tout en montrant à sa population sa volonté de faire cesser le bain de sang. Ces pourparlers suivent une feuille de route claire : le plan présenté fin mai par le président américain, Joe Biden. S'il était adopté, ce protocole, proposé par Israël et que le Hamas jugeait positivement au printemps, se déroulerait en trois phases. D'abord, le retrait de Gaza de l'armée israélienne pendant six semaines. Puis la libération des otages détenus par le Hamas et ses alliés, accompagnée d'une cessation "permanente" des hostilités. Enfin, la reconstruction de la bande de Gaza pourrait démarrer. S'il reste "beaucoup à faire" avant d'y parvenir, a reconnu John Kirby, les Etats-Unis ont clairement réitéré ces objectifs jeudi soir.

"Il faut que les otages soient libérés, il faut du répit pour les civils palestiniens à Gaza, de la sécurité pour Israël et une baisse des tensions dans la région, et tout cela le plus vite possible."

John Kirby, porte-parole du Conseil de sécurité nationale à la Maison Blanche

lors d'une conférence de presse

Mais ces lignes directrices se heurtent toujours aux buts de guerre poursuivis par Israël. Même s'il a déjà accepté et respecté une trêve temporaire en novembre, le gouvernement de Benyamin Nétanyahou ne cesse de répéter que la guerre durera jusqu'à la destruction totale du Hamas. Un objectif qui semble incompatible avec l'acceptation de la fin "permanente" des combats à Gaza d'ici six semaines. 

Concernant le sort des 111 otages israéliens encore retenus à Gaza, le plan Biden prévoit un "véritable échange" avec les prisonniers palestiniens détenus en Israël. Mais à la veille de ce nouveau round de négociations à Doha, le Premier ministre israélien a durci ses conditions sur ce point. "Israël disposera d'un veto sur certains prisonniers libérés et pourra désigner ceux qui pourront être libérés à l'étranger", a-t-il écrit sur son compte X, mardi. Enfin, la dernière phase du plan, qui consiste à imaginer dès à présent l'avenir de la bande de Gaza sans le Hamas, au pouvoir depuis 2007, demeure un point de blocage.

Un contexte de tensions accrues dans la région

Ces négociations démarrent alors que la communauté internationale craint un embrasement total de la région. En particulier depuis le 31 juillet et l'assassinat du chef du Hamas, Ismaïl Haniyeh, tué à Téhéran, en Iran, par une frappe imputée à l'armée israélienne. L'Iran a depuis promis d'infliger un "châtiment sévère" à l'Etat hébreu. Cette nouvelle escalade des violences au Proche-Orient pourrait être évitée, selon les Etats-Unis, avec l'obtention d'un cessez-le-feu à Gaza.

Autre source d'inquiétude : l'assassinat par Israël, le 30 juillet, de Fouad Chokr, chef militaire du Hezbollah, parti libanais allié du Hamas et de l'Iran. Après cette attaque, le mouvement chiite libanais a, lui aussi, menacé Tel-Aviv de prendre sa "revanche". Cette riposte est toutefois, selon Washington Post, aujourd'hui suspendue à l'issue des négociations sur le cessez-le-feu à Gaza. Le quotidien américain a relayé les propos d'une source anonyme "ayant des liens étroits avec le Hezbollah", affirmant que "le parti ne veut pas être tenu pour responsable de l'obstruction des négociations ou d'un éventuel accord".

Ces négociations ont par ailleurs démarré alors que les nouvelles violences se poursuivent dans les territoires palestiniens. Jeudi, le ministère de la Santé du Hamas a annoncé que le nombre de victimes de la guerre dans la bande de Gaza s'élevait désormais à plus de 40 000 morts, un chiffre décrit comme une "étape sombre pour le monde entier" par le Haut-Commissaire de l'ONU aux droits de l'homme, Volker Türk. 

Alors que la première journée de discussions s'achevait au Qatar, une attaque a été menée par des colons israéliens en Cisjordanie occupée. Vers 20 heures jeudi soir, des "dizaines de civils israéliens" sont entrés dans la ville de Jit, entre Naplouse et Qalqilya, ont "incendié des véhicules, des infrastructures" et "lancé des pierres et des cocktails Molotov", selon l'armée israélienne. Les violences ont fait un mort et un blessé, selon l'Autorité palestinienne. Le président israélien, Isaac Herzog, a condamné ces violences commises par une "minorité extrême", tandis que Washington les a qualifiées "d'inacceptables". Indéniable obstacle à la paix entre Israéliens et Palestiniens, la colonisation menée par Israël en Cisjordanie est une violation du droit international, comme l'a rappelé l'ONU à de multiples reprises ces derniers mois.

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