Syrie : le renvoi devant les assises de trois hauts responsables du régime syrien est "l'aboutissement d'un combat", selon l'avocate de la FIDH
Ces trois hauts responsables seront jugés pour la mort de deux citoyens franco-syriens, Mazzen Dabbagh et son fils Patrick, arrêtés en 2013.
Le renvoi devant les assises de trois hauts responsables du régime syrien est "l'aboutissement d'un combat", estime mardi 4 avril sur franceinfo Me Clémence Bectarte, avocate de la FIDH et du Centre syrien pour les médias, spécialisée en droit pénal international, droit international des droits humains et droit international humanitaire, alors que deux juges d'instruction françaises ont ordonné mardi que trois hauts responsables du régime syrien de Bachar al-Assad soient jugés aux assises pour la mort de deux citoyens franco-syriens, Mazzen Dabbagh et son fils Patrick, arrêtés en 2013, selon une ordonnance de mise en accusation que franceinfo a pu consulter. À travers cette procédure, Me Clémence Bectarte, avocate de la famille des deux disparus, affirme qu'il est "indispensable de rappeler" que la Syrie "est un régime tortionnaire". Elle juge par ailleurs qu'il est "impensable d'envisager une normalisation avec ce régime".
franceinfo. Pourquoi cette procédure est-elle importante, même en l'absence probable des accusés ?
Elle est importante d'abord parce qu'elle est l'aboutissement d'un combat mené par la famille Dabbagh, cette famille franco-syrienne qui s'est tournée dès 2016 vers la justice française pour tenter d'obtenir justice. Et ensuite parce que le procès qui a été ordonné aujourd'hui sera un grand facteur d'espoir pour les centaines de milliers de victimes syriennes qui attendent toujours que justice soit rendue. Le combat contre l'impunité, il doit se poursuivre. Il faut continuer à le mener, à l'heure où l'on voit pointer la tentation de réhabilitation du régime syrien avec un certain nombre de pays qui tentent de renouer des relations avec Bachar al-Assad. Donc il est urgent, il est indispensable, dans ce contexte, de rappeler que c'est un régime tortionnaire.
Le régime syrien reprend peu à peu sa place sur la scène internationale. Il est question d'une réintégration à la Ligue arabe, de reprise de relations diplomatiques avec certains pays majeurs de la région, dont l'Arabie saoudite. Est-ce aussi une motivation pour vous ?
Bien évidemment. C'est une grande crainte pour l'ensemble des victimes syriennes, de la population syrienne elle-même, qui continuent de subir la répression du régime de Bachar al-Assad. Ce qu'il faut savoir, c'est qu'on ne parle pas de crimes du passé, on parle de crimes qui sont encore en train de se perpétrer. On a aujourd'hui des disparus dans les geôles syriennes, des familles qui n'ont pas récupéré les corps de leurs proches, le recours systématique à la torture qui se poursuit. Il est urgent, dans ce contexte, de rappeler qu'il est impossible d'envisager une normalisation avec le régime syrien sans qu'il y ait de justice et en tout cas pas de normalisation avec ce régime.
Le cas de la famille de Mazzen Dabbagh est-il à l'image de milliers de cas ces dernières années en Syrie ?
Oui, bien sûr. On voit des arrestations nocturnes à leur domicile sans raison. La famille n'a jamais compris pourquoi Patrick et Mazzen avaient été arrêtés les 3 et 4 novembre 2013. Puis plus de nouvelles, ce qui a bien évidemment plongé toute la famille et leurs proches dans une angoisse terrible. Ce n'est qu'en 2018 qu'on a eu la confirmation de leur décès. Mais encore aujourd'hui, la famille Dabbagh ne sait pas dans quelles conditions précisément ils sont morts et elle n'a pas pu récupérer leurs corps pour pouvoir les enterrer.
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