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Etats-Unis : cinq questions pour tout comprendre à la fronde des agences fédérales et des chercheurs contre Trump

Depuis mercredi, des dizaines de comptes alternatifs d'agences fédérales ont été créés sur le réseau social. Objectif : résister à l'administration du nouveau président américain, promouvoir le travail scientifique et parler du réchauffement climatique. 

Article rédigé par Julie Rasplus
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6min
Un groupe de scientifiques inquiets manifestent, le 13 décembre 2016, à San Francisco, après l'élection de Donald Trump.  (MARCIO JOSE SANCHEZ / AP / SIPA)

Le bras de fer est engagé entre certaines agences fédérales américaines et l'administration Trump. Une semaine après l'investiture du nouveau président, vendredi 20 janvier, des comptes alternatifs, relayant des messages sur le réchauffement climatique, ont été créés pour éviter la censure. Explications. 

Que s'est-il passé le jour de l'investiture ? 

Tout a commencé par un tweet posté lors de l'investiture de Donald Trump, et retweeté par le compte du National Parks Service, l'agence fédérale chargée des parcs nationaux américains. Visiblement peu satisfait de l'arrivée du milliardaire, un agent a ainsi mis en avant les photos montrant l'écart d'affluence entre l'investiture de Donald Trump et celle de Barack Obama.

Capture d'écran d'un message - effacé depuis - publié sur le compte officiel de l'agence fédérale chargée des parcs nationaux américains.  (NATIONAL PARK SERVICE / TWITTER)

Le message a vite été retiré et l'agence s'est vu imposer une interdiction temporaire de poster, raconte le site Gizmodo (en anglais). Un message d'excuse très consensuel a ensuite été posté pour corriger le tir. 

Mais la colère s'est alors répandue à d'autres comptes officiels. Dans la foulée, le compte du parc national des Badlands, situé dans le Dakota du Sud, a commencé à poster des messages (supprimés depuis) évoquant le réchauffement climatique. Un pied de nez à l'administration, réputée climatosceptique.

Dans une série de tweets, l'administrateur de la page s'est ainsi lancé dans une démonstration scientifique, appuyée par des données précises. Les messages, dont il subsiste des captures d'écran, rappelaient ainsi que l'acidité des océans a augmenté de 30% depuis la Révolution industrielle ou que le taux de CO2 dans l'atmosphère avait atteint son plus haut niveau depuis 650 000 ans. De quoi déplaire à l'administration Trump. 

Quelle a été la réaction de l'administration Trump ? 

Outre la suppression des messages gênants, les nouveaux dirigeants ont pris des décisions interprétées par les chercheurs comme des attaques contre la science. Lundi, un "black-out" a d'abord été imposé à l'Agence américaine de protection de l'environnement (EPA). Selon le Los Angeles Times (en anglais), un e-mail interne a été envoyé à tous les employés, les intimant de ne plus publier de communiqués de presse, de nouveaux posts de blog ou de messages sur les réseaux sociaux. Aucun nouveau tweet n'a d'ailleurs été publié depuis le 19 janvier sur le compte officiel. 

Capture d'écran du compte Twitter de l'Agence de protection de l'environnement, silencieux depuis le 19 janvier;  (EPA / TWITTER)

Le même jour, une affaire similaire a agité le département de l'Agriculture - l'équivalent de L'Institut national de la recherche agronomique (Inra). Un e-mail, consulté par le site Buzzfeed (en anglais), invitait l'ensemble des employés, dont 2 000 chercheurs, à rester silencieux sur les réseaux sociaux ou auprès de la presse.

Même si la consigne ne portait pas sur les publications scientifiques, elle a été très mal perçue par les chercheurs. Et malgré son retrait, le lendemain, la directive a participé à la mobilisation de la communauté scientifique sur internet. 

Comment la riposte s'est-elle organisée ? 

En réaction à ce silence imposé, des comptes alternatifs d'agences fédérales ont fleuri sur Twitter, mercredi, à l'instar de @AltUSNatParkSer et @BadHombreLands NPS. Il s'agit des versions pirates des comptes de l'Agence fédérale des parcs nationaux et du parc des Badlands. D'emblée, le ton a été donné. "Hâte que le président Trump nous traite de 'fake news'. Vous pouvez confisquer notre compte twitter officiel, mais vous ne confisquerez jamais notre temps libre", clament, gouailleurs, les administrateurs du compte @AltUSNatParkSer dans leur premier message.  

En l'espace de 24 heures, le profil a enregistré plus d'un million d'abonnés. Et il n'est pas le seul. Sur Twitter, le mouvement a rapidement pris beaucoup d'ampleur. Au total, plus d'une quarantaine de comptes (liste disponible ici), s'inscrivant dans cette démarche de résistance, ont été créés. Les parcs de Yellowstone, Yosemite, la Nasa ou encore l'Agence américaine d'observation océanique et atmosphérique (NOAA) possèdent désormais tous leurs comptes alternatifs. 

Quels messages relaient-ils ? 

Ces initiatives semblent toutes s'inscrire dans un seul but : défendre la science et parler du réchauffement climatique, deux domaines que les chercheurs estiment menacés par la nouvelle administration. Les différents comptes suivent donc une ligne engagée. "Cela permet de hisser des drapeaux rouges. Le plus grand risque serait que la censure, qu'elle vise les journalistes ou les institutions scientifiques, soit passée sous silence", explique Jenna Ruddock, journaliste administrant le compte @NatlSciService, dans le Washington Post (en anglais)

Les comptes relaient à la fois des données sur le réchauffement climatique, des articles de presse parlant d'environnement, mais aussi des messages condamnant la politique de Donald Trump et appelant à la mobilisation. A titre d'exemple, les décisions relançant les deux projets d'oléoducs sont largement décriés sur les divers comptes. 

Qui se cache derrière ces comptes Twitter ? 

Cela dépend des profils et il est difficile de remonter à la source. Mais globalement, il s'agit d'opposants à Donald Trump. Les administrateurs de @AltUSNatParkSer, compte le plus suivi, restent assez discrets sur leur identité. Ils craignent "la colère et des menaces provenant des soutiens de Trump", relève le Washington Post, qui a réussi à les contacter. Sur Twitter, ils affirment que le compte est géré par des rangers et des amis, mais personne n'a pu confirmer l'information. 

Même discrétion pour le compte pirate de la Nasa. La description précise bien qu'il n'est pas géré par des employés fédéraux, mais impossible d'en savoir plus sur le profil des administrateurs. Certains comptes se montrent plus transparents, comme le compte alternatif du parc Yellowstone, qui assure être tenu par "un groupe d'employés et de chercheurs"

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