Masques, relance, référendum... Ce qu'il faut retenir de l'interview du 14-Juillet d'Emmanuel Macron
Renouant avec la tradition de l'interview présidentielle du 14-Juillet, le chef de l'Etat a dessiné le chemin de sa seconde partie de quinquennat, sans opérer de virage politique.
Pas de changement de cap, mais "un nouveau chemin". Pour la première interview du 14-Juillet de son quinquennat, Emmanuel Macron a développé les axes de la politique qu'il compte mener après la crise du Covid-19. Gestion de la crise sanitaire, port du masque, plan de relance économique, mesures écologiques, ou encore nouveau gouvernement : le chef de l'Etat a été interrogé pendant environ 1h15 par Gilles Bouleau et Léa Salamé. Voici ce qu'il faut en retenir.
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"Changer de chemin" : un mea-culpa sur la méthode
Le chef de l'Etat a commencé par une autocritique sur sa manière de gouverner pendant ses trois premières années de pouvoir. "J'ai commis des erreurs", a-t-il déclaré, reconnaissant ne pas être parvenu à réduire les divisions qui fracturent la société. Rappelant avoir été élu "pour mener des réformes tambour battant", il a admis avoir donné l'impression aux Français qu'il réformait "malgré eux, comme pour adapter le pays à quelque chose (...) qui n'était pas juste".
Pour que la confiance revienne, Emmanuel Macron a indiqué vouloir "changer de chemin". Comprendre : "associer, passer davantage par le dialogue social, par l'association avec les élus". Une nouvelle méthode censée correspondre avec le profil du nouveau Premier ministre, Jean Castex. "Je l'ai vu faire pendant le confinement, je l'ai regardé agir", a dit le chef de l'Etat de cet "élu de terrain, pas d'une grande ville" qui possède "une culture du dialogue social" et "connaît la vie des élus locaux, les partenaires sociaux, la santé et les arcanes de notre modèle social".
Une "confiance" renouvelée à Gérald Darmanin, visé par une plainte pour viol
C'est l'un des sujets politiques les plus délicats depuis la formation du nouveau gouvernement. Emmanuel Macron a été interrogé sur la promotion de Gérald Darmanin, nommé au ministère de l'Intérieur alors que la justice a ordonné la reprise d'investigations concernant une plainte pour viol visant le maire de Tourcoing.
Tout en assurant partager "la cause féministe" dont il a fait "un fil rouge" de son quinquennat, Emmanuel Macron a réitéré sa confiance envers le ministre, rappelant son droit à la présomption d'innocence. Il a également souligné qu'après plusieurs décisions de justice, la plainte avait "à chaque fois été classée, ou avait donné lieu à une absence de suite".
"Je pense qu'aucune cause n'est défendue justement en bafouant les principes fondamentaux de notre démocratie", a-t-il poursuivi, en précisant avoir parlé "d'homme à homme" à Gérald Darmanin.
Des masques bientôt obligatoires dans les lieux clos
La décision sera officiellement prise par le gouvernement, mais le chef de l'Etat s'est prononcé en faveur du port du masque obligatoire dans les lieux clos recevant du public, "par exemple à partir du 1er août". Il y a quelques jours, le Premier ministre avait affirmé que cette décision était à l'étude.
Emmanuel Macron a justifié ce souhait par les "inquiétudes" que suscite l'évolution de la pandémie de coronavirus. "Il y a des indices que ça réaccélère, nous avons des signes que ça repart quand même un peu", a-t-il déclaré, citant ainsi le taux de contamination par personne infectée, récemment repassé légèrement au-dessus de 1.
Autre mesure annoncée pour tenter d'éviter un rebond épidémique : la possibilité "pour toute personne, sans prescription médicale, d'aller se faire tester, même quand elle n'a pas de symptômes". Par ailleurs, le président assure que le pays possédera assez de matériel médical, de tests, ou encore de médicaments en cas de seconde vague : "Nous avons à la fois les stocks et les approvisionnements qui sont sécurisés." Emmanuel Macron s'est en outre dit hostile à un reconfinement général, "révélateur d'inégalités".
La France "parmi les premiers pays" à bénéficier d'un vaccin Sanofi
Si le groupe français Sanofi trouve un vaccin contre le coronavirus, la France sera-t-elle le premier pays à en bénéficier ? "L'un des premiers pays", a répondu Emmanuel Macron, plusieurs semaines après la polémique créée par le dirigeant du groupe pharmaceutique qui avait affirmé que les Etats-Unis seraient servis en premier.
Toutefois, le chef de l'Etat s'est élevé contre le "nationalisme sanitaire". "Je ne vais pas faire avec les groupes français ce que je ne veux pas que les autres fassent avec leurs propres groupes", a-t-il expliqué. Le président de la République dit avoir travaillé pour qu'il y ait "véritablement un accès international aux vaccins".
Des mesures pour l'emploi des jeunes
Au-delà de la crise sanitaire, Emmanuel Macron a évoqué la situation économique et sociale. Selon lui, il y aura "entre 800 000 et un million de chômeurs de plus à l'horizon du printemps 2021". Pour lutter contre cette "augmentation massive", le chef de l'Etat a estimé que la "jeunesse doit être la priorité", soulignant que c'est à celle-ci "qu'on a demandé le plus gros effort" durant le confinement. Le chef de l'Etat a annoncé plusieurs mesures pour "ne pas perdre la bataille de l'apprentissage", et fustigé les entreprises "irresponsables" qui "préfèrent prendre des stagiaires plutôt qu'un contrat professionnel ou un alternant".
Ainsi, un "dispositif exceptionnel d'exonération de charges" va être mis en place pour "un à deux ans" pour les jeunes gagnant jusqu'à 1,6 smic. Le président a également annoncé la création de 300 000 contrats d'insertion pour les jeunes les plus éloignés de l'emploi, un quasi doublement des effectifs du service civique avec 100 000 bénéficiaires supplémentaires par rapport aux 140 000 actuels, ainsi que 200 000 places dans des "formations qualifiantes supérieures".
La réforme des retraites remise sur la table
La réforme des retraites, dont l'adoption a été interrompue pendant le confinement, n'est pas abandonnée, mais son avenir reste plus qu'incertain. "Je ne m'obstine pas à la faire là, tout de suite. (...) Elle ne peut pas se faire comme elle était emmanchée avant la crise", a convenu le chef de l'Etat.
Mais qu'il s'agisse de sa forme ou de son calendrier, la balle est désormais dans le camp du gouvernement. "Jean Castex va réunir les partenaires sociaux pour tout mettre sur la table" et établir "un calendrier partagé", a assuré Emmanuel Macron, sans fixer d'échéance. Or, les syndicats, et même le patronat, ne jugent pas urgent de remettre le couvert. "Nous ne ferons pas l'économie d'une réforme pour rendre viable notre système de retraite", a rappelé le président, tout en affirmant que la priorité de la rentrée serait plutôt "l'emploi".
Un référendum "au plus vite" sur l'écologie
La lutte contre le réchauffement climatique inscrite dans la Constitution ? Emmanuel Macron y est favorable, et ce, "le plus vite possible, à la fin de cette année, ou en tout cas (...) dans les meilleurs délais". Favorable à un référendum sur cette "avancée majeure", le chef de l'Etat a souligné qu'il fallait au préalable obtenir "un vote par l'Assemblée puis le Sénat dans des termes conformes".
Il a également rappelé son soutien à 146 propositions émises par la Convention citoyenne pour le climat. Emmanuel Macron a notamment jugé que les lignes aériennes desservant des villes à seulement deux heures de TGV ne se justifiaient plus, et assuré que le fret ferroviaire, les trains de nuit et les petites lignes seraient "redéveloppés".
Le chef de l'Etat a également évoqué "un grand programme de rénovation" énergétique, à destination des écoles et des Ehpad dans un premier temps, sans toutefois évoquer le caractère obligatoire que proposait la Convention citoyenne. Emmanuel Macron s'est dit "convaincu qu'on peut bâtir un pays différent en 10 ans". "On doit trouver un chemin commun pour bâtir un nouveau modèle écologique," a-t-il résumé.
Des caméras-piétons généralisées contre les contrôles au faciès
En plein débat sur les violences policières et les actes racistes de certains membres des forces de l'ordre, Emmanuel Macron a annoncé la généralisation "avant la fin du quinquennat" des caméras-piétons pour lutter contre les contrôles au faciès. Elles permettront selon lui "de rétablir la confiance entre la population et la police". Elles seront utilisées par "chaque brigade qui intervient".
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