Primaire à droite : comment François Fillon a surpris tout le monde
L'ancien Premier ministre est arrivé en tête du premier tour avec plus de 44% des voix, devant Alain Juppé (28%). Il se présente désormais en favori pour le second tour.
La dynamique de François Fillon, amorcée dans les enquêtes d'opinion, s'est plus que confirmée dans les urnes. L'ancien Premier ministre est passé de 10% d'intentions de vote au début du mois de novembre à plus de 44% lors de ce premier tour de la primaire à droite, dimanche 20 novembre.
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"Du jamais vu dans la vie politique française", a commenté le juppéiste Benoist Apparu sur France 2 à l'annonce des premiers résultats partiels. Au quartier général de François Fillon, même les militants du député de Paris semblaient surpris en constatant l'envolée de leur candidat. Franceinfo tente d'expliquer les raisons de ce retournement de situation.
Un mot d'ordre : la rigueur
François Fillon a joué pendant toute la campagne la carte du sérieux et de la constance. Semaine après semaine, l'ancien Premier ministre écumait les villes de France pour marteler son programme "choc". Suppression de la durée légale du temps de travail, retraite à 65 ans, refonte du Code du travail, suppression de 500 000 emplois dans la fonction publique, 40 milliards d'allègements de charges pour les entreprises, disparition de l'ISF, allocations chômage dégressives... La cure d'austérité du candidat Fillon a le mérite de la clarté.
D'émissions politiques en meetings, François Fillon a annoncé la couleur avec ce programme souvent comparé à la politique libérale de Margaret Thatcher, l'ancienne Première ministre du Royaume-Uni. Et les électeurs de la droite et du centre ont, semble-t-il, validé ce discours. "Depuis quatre ans, je ne dévie pas dans ma marche, elle est tout orientée vers l'intérêt des Français, (...) en assumant un langage de vérité", a rappelé François Fillon au soir du premier tour. "Fillon a su faire une synthèse entre le calme et le sérieux d'Alain Juppé et les yeux ouverts sur la société de Nicolas Sarkozy", analyse un proche de Nicolas Sarkozy.
Un tremplin : les débats
François Fillon a avancé dans l'ombre pendant de nombreux mois avant de prendre la lumière à la faveur des trois débats organisés entre les prétendants à la primaire. Après le premier débat (le 13 octobre), les sondages frémissent pour le député de Paris qui était jusque-là bloqué autour de 10%. Le deuxième débat (le 3 novembre) viendra confirmer cette dynamique.
Il est parvenu à se distinguer des autres, en évitant les polémiques politiciennes, mais sans négliger les coups d'éclat, à l'image de sa critique du système médiatique, à la fin du troisième débat, alors même qu'il avait validé le format de l'émission. "On n'est pas là pour s'interpeller les uns les autres, avait-il argumenté. C'est tout le problème de la conception que vous avez, de plus en plus, de ces débats, en termes de spectacle, pas en termes de fond."
En réalité, il a mené sa campagne en deux temps, selon Martial Foucault, le directeur du Cevipof, interrogé par franceinfo : "En début de campagne, il a été extrêmement offensif (souvenez-vous de sa déclaration sur le général de Gaulle et la mise en examen), et par la suite, il s'est mis en retrait sur le terrain des attaques, des piques pour marteler son programme économique et ses positions sur la politique étrangère... Bref, il s'est démarqué de ses adversaires."
Pour François Fillon, un autre moment de la campagne restera ces applaudissements obtenus lors de "L'Emission politique" sur France 2. L'actuel favori du second tour, alors distancé dans les enquêtes d'opinion, s'en était pris aux instituts de sondage en critiquant leur parti pris de tester uniquement des seconds tours entre Nicolas Sarkozy et Alain Juppé : "C'est quand même bizarre ! Vous avez décidé avant même d'avoir dépouillé le 1er tour que le 2e tour était joué !"
Un ingrédient : l'abnégation
"Mister nobody", "Droopy", le "collaborateur"... Les oreilles de François Fillon ont sifflé plus d'une fois ces dernières années. Moqué, l'ancien Premier ministre a continué de croire en ses chances et semble tout près de tenir sa revanche, après la guerre fratricide qui l'a opposée à Jean-François Copé en 2012, lors de la bataille pour la présidence de l'UMP.
L'ancien Premier ministre est alors reparti sur le terrain pour mener une longue course de fond, un peu à l'image de François Hollande lorsqu'il s'est lancé dans l'aventure présidentielle. François Fillon est ensuite entré en campagne courant 2013, trop tôt selon certains observateurs à l'époque. Mais il avait alors obtenu l'assurance d'une primaire ouverte et semblait persuadé que son travail de fond porterait un jour ses fruits.
"C'est trois ans, trois ans et demi de travail, s'est félicité sur France 2 Jérôme Chartier, porte-parole du candidat devenu favori de cette primaire. Les Français n'ont pas découvert subitement François Fillon." Pour l'ancien Premier ministre, il reste une semaine pour transformer l'essai et obtenir l'investiture des électeurs de la droite et du centre.
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