Quatre choses à savoir sur Sylvie Goulard, candidate de la France comme commissaire européenne
Ancienne députée européenne et éphémère ministre des Armées, citée dans l'enquête sur des soupçons d'emplois fictifs au MoDem, Sylvie Goulard est seconde sous-gouverneure à la Banque de France depuis janvier 2018.
Commission européenne, ministère des Armées, Banque de France… A 54 ans, Sylvie Goulard mène une brillante carrière de haute fonctionnaire. Avec une ombre au tableau : elle est citée dans l'enquête judiciaire sur des soupçons d'emplois fictifs au sein du parti centriste MoDem. Cela ne devrait pas l'empêcher d'ajouter une ligne à son CV avec le poste de commissaire européenne, pour lequel elle a été désignée candidate de la France, mercredi 28 août. Néanmoins, ce choix ne sera entériné qu'après son audition par le Parlement européen en septembre. En attendant, voici quatre choses à savoir sur cette fidèle d'Emmanuel Macron.
1Elle connaît parfaitement les rouages de l'UE
Difficile de trouver plus experte en la matière : Sylvie Goulard est une chantre de l'Europe et de la coopération franco-allemande. "L'Europe est une évidence depuis sa plus tendre jeunesse, quand, par le truchement d'un échange scolaire, ses pas d'adolescente la conduisent outre-Rhin, à Bielefeld, en Rhénanie-du-Nord-Westphalie, dans une famille allemande", révèle Le Point. Il ne faut pas non plus oublier qu'elle est née le 6 décembre 1964 à Marseille dans une famille d'origine italienne, qui parlait français à la maison.
Dans les années 1990, au début de sa carrière, elle fait partie de l'équipe française chargée de négocier la réunification de l'Allemagne. Mais c'est dans les années 2000 qu'elle aiguise ses armes, lorsqu'elle devient conseillère du président de la Commission européenne, Romano Prodi. Elle exerce ce poste de 2001 à 2004.
Cinq ans plus tard, Sylvie Goulard est élue eurodéputée pour le MoDem et conserve son mandat jusqu'en 2017. Elle est "proche du courant fédéraliste, incarné par Daniel Cohn-Bendit et le député européen belge Guy Verhofstadt", indique Le Monde. Elle a d'ailleurs cofondé avec eux, en 2010, une association de députés européens, d'universitaires et de personnalités politiques, le groupe Spinelli, qui milite pour le fédéralisme européen. Elle est aussi une proche de Mario Monti, ancien président du Conseil italien et ex-commissaire européen.
2Elle est polyglotte et énarque
Si Sylvie Goulard parvient à dialoguer avec tous ces responsables européens, c'est parce qu'elle connaît leurs langues. Elle parle à la perfection anglais, allemand et italien. La polyglotte "est aussi connue pour son franc-parler et ce que beaucoup assimilent à une célèbre 'arrogance française'", note Le Monde. D'autres adjectifs s'ajoutent à sa réputation : bûcheuse, autoritaire et parfois même cassante.
La quinquagénaire est pourtant diplomate depuis sa sortie de l'ENA, en 1989. Elle est issue de la promotion "Liberté, égalité, fraternité", tout comme Nicolas Dupont-Aignan et Jean-François Copé. "Nous étions une bande de potes. Sylvie, c'est une fille super, brillante. On se voyait tout le temps", commente dans Le Point le maire de Meaux, candidat malheureux à la primaire de la droite et du centre en 2017. Parmi ses camarades de promo se trouve aussi son futur mari : Guillaume Goulard, avocat au barreau de Paris.
3Elle a passé un mois seulement à la tête du ministère des Armées
Réelue députée européenne en 2014, Sylvie Goulard n'a pas eu le temps d'achever son second mandat. Car en mai 2017, elle est nommée ministre des Armées dans le premier gouvernement d'Edouard Philippe. Elle est la deuxième femme à exercer cette fonction, après Michèle Alliot-Marie (2002-2007). Novice en matière militaire, elle découvre au pas de charge la réalité des armées, multipliant les visites de terrain, en parallèle à un agenda diplomatique chargé, du sommet de l'Otan à Bruxelles aux questions européennes.
La ministre travaille avec son homologue Ursula von der Leyen – aujourd'hui promise au poste de présidente de la Commission européenne – sur plusieurs projets franco-allemands destinés à servir d'impulsion pour une coopération de défense élargie en Europe. Mais elle ne peut achever sa mission dans ce ministère, où, selon Le Point, "la pompe d'un autre âge l'étouffait assez vite". Le 20 juin 2017, un mois seulement après sa nomination, elle renonce à ses fonctions, fragilisée par l'affaire des assistants parlementaires du MoDem. Mais Sylvie Goulard rebondit vite : elle est nommée en janvier 2018 au poste de seconde sous-gouverneure de la Banque de France.
4Elle est citée dans l'enquête sur des soupçons d'emplois fictifs au MoDem
La démission de Sylvie Goulard est liée à l'ouverture d'une enquête judiciaire sur des soupçons d'emplois fictifs au sein du parti centriste, liée à ses anciennes fonctions d'eurodéputée. "Dans l'hypothèse où l'enquête préliminaire visant le MoDem conduirait à vérifier les conditions d'emploi de mes assistants au Parlement européen, je souhaite être en mesure de démontrer librement ma bonne foi et tout le travail que j'y ai accompli", écrit-elle pour justifier sa décision.
Dans cette affaire, après l'enquête préliminaire du parquet de Paris, une information judiciaire contre X, confiée à des juges d'instruction parisiens, a été ouverte en juillet 2017 pour "abus de confiance", "recel d'abus de confiance" et "escroqueries". Les investigations des magistrats sont toujours en cours. Certains des anciens assistants de Sylvie Goulard, dont Stéphane Thérou, ont été entendus en audition libre par les enquêteurs. Elle-même n'a pas été auditionnée, ni mise en examen.
Pourtant, cette affaire est devenue un caillou dans sa chaussure. "Grosse gêne ! Ce qui l'empêche d'être ministre en France est négligeable à l'échelle européenne !" a réagi l'eurodéputé écologiste Yannick Jadot dans un tweet mercredi, après l'annonce de sa candidature à la Commission européenne. "Nul doute que le Parlement européen la mettra sur le gril lors de son audition comme commissaire candidate entre septembre et octobre", souligne Le Point.
D'autant que Sylvie Goulard est aussi critiquée par certains pour avoir collaboré à un think tank américain, l'Institut Berggruen, pour une rémunération supérieure à 10 000 euros par mois alors qu'elle était eurodéputée, comme l'avaient révélé Le Canard enchaîné et Le JDD en 2017. Une collaboration qui n'avait rien d'illégal mais qui avait provoqué un début de polémique. Mercredi, Guillaume Balas, du mouvement Génération.s, a dénoncé "un mélange des genres dommageable".
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