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Infographies Assemblée nationale : la cadence est-elle vraiment trop élevée pour les députés ?

Les séances en hémicycle ne sont pas plus longues que lors de la précédente législature, mais la composition de l'hémicycle oblige les députés à être plus présents.
Article rédigé par Mathieu Lehot-Couette
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6min
L'hémicycle de l'Assemblée nationale, le 29 novembre 2022, à l'occasion de la séance publique des questions au gouvernement. (XOSE BOUZAS / HANS LUCAS / AFP)

Depuis plusieurs semaines, des parlementaires se plaignent des horaires à rallonge à l'Assemblée nationale. "Ça tire", confiaient certains à franceinfo, fin novembre. D'autres admettent piquer du nez dans l'hémicycle, selon des confidences rapportées par Le Parisien. Ces remontées succèdent à celles déjà entendues pendant l'été, quand les élus ne savaient plus s'ils devaient se dire bonjour ou bonsoir.

La présidence de l'Assemblée nationale prend le sujet au sérieux. Une première réunion avec les présidents de groupe s'est tenue mardi 29 novembre. L'enjeu est d'adapter le fonctionnement de l'Assemblée nationale au contexte actuel de majorité relative. Le fait que désormais chaque voix compte serait la principale cause du surmenage que dénoncent certains parlementaires. A quel point le travail législatif est-il bouleversé par cette nouvelle donne ? Horaires de jour et de nuit, taux de participation au vote de la loi, franceinfo a passé en revue les comptes-rendus des débats et comparé cette nouvelle législature avec la précédente.

Des horaires de séance classiques

Au cœur des critiques, les séances en hémicycle qui auraient trop souvent tendance à se prolonger la nuit. "On ne légifère pas bien à 3 heures du matin", s'indigne ainsi le député du Rassemblement national Sébastien Chenu. Au total, entre le début de la nouvelle législature, le 28 juin, et la fin du mois de novembre, 20 journées de débat en hémicycle sur 56 se sont poursuivies au-delà de minuit, heure limite fixée par le règlement de l'Assemblée. La moitié n'ont dépassé que de quelques minutes, d'autres de plusieurs heures. Celle du jeudi 21 juillet s'est terminée le lendemain matin à 5h50 pour le vote du projet de loi d'urgence pour le pouvoir d'achat.

Ces séances nocturnes ne sont en réalité pas une nouveauté, comme l'avait déjà montré franceinfo. "Je me souviens de journées en 2017 qui commençaient à 9 heures le matin et qui se terminaient à 1 heure dans la nuit", se rappelle le député Renaissance Eric Bothorel, qui ne partage pas l'avis de ses collègues qui se plaignent. "Cette idée de cadence infernale, je la récuse totalement", abonde son collègue Stéphane Travert, député depuis 2012.

Ces deux parlementaires de la majorité présidentielle rappellent par ailleurs que depuis 2019, la fin des séances du soir a été ramenée de 1 heure à minuit. De fait, selon notre décompte, le nombre d'heures de séances passées dans l'hémicycle par la nouvelle Assemblée ne montre pas de cadences plus élevées que les années précédentes.

Si les séances ne sont pas plus longues que d'habitude, les députés sont cependant largement plus nombreux à y assister. De quoi, sans doute, expliquer la fatigue ambiante. "Désormais, on est une majorité relative, on est vissés à nos sièges", reconnaît Stéphane Travert.

"Ce qui a changé c'est que la majorité est minoritaire dans l'Assemblée. Ils sont obligés d'être tous là."

Bastien Lachaud, député LFI

à franceinfo

Il suffit, pour le confirmer, de consulter les taux de participation aux votes dans l'hémicycle : ils sont particulièrement élevés par rapport à la précédente législature, au-delà de 60% en juillet et en octobre. Du jamais-vu depuis la sortie du premier confinement en mai 2020.

Cette nouvelle affluence à l'Assemblée concerne presque tous les bancs. Entre juillet et novembre 2022, les députés Renaissance (ex-LREM) ont participé en moyenne à 41% des scrutins. Ce chiffre n'était que de 29% sur la même période en 2017. Idem pour les députés du Modem, dont le taux de participation a presque doublé, en bondissant de 23% à 42%.

"Quand vous êtes en majorité relative, il faut être là pour s'assurer qu'un texte passe", reconnaît Stéphane Travert. Cet impératif n'est pas du goût de tous. Le député Modem Erwan Balanant rappelle que le travail législatif ne se résume pas au vote des lois. "Voter pour voter, ce n'est pas ce qu'il y a de plus important dans le travail parlementaire, considère l'élu du Finistère. Un député qui est tout le temps en hémicycle, c'est un député qui ne fait rien d'autre".

Erwan Balanant évoque les réunions en commission, pendant lesquelles les textes sont examinés avant leur passage en séance plénière. "Ces commissions se préparent, il faut mener des auditions. Et puis il y a aussi le travail de fond. Là, cela fait trois semaines que j'ai commencé une note que je n'ai toujours pas eu le temps de finaliser", regrette le député.

Le zèle du Rassemblement national

Du côté des oppositions aussi, l'absence de majorité relative mobilise davantage, à l'exception des députés Les Républicains et des communistes. Le Rassemblement national se distingue avec un taux de participation aux scrutins encore plus fort que ceux de la majorité. "En tant que premier groupe d'opposition, on se doit d'être exemplaire", justifie le député RN Bruno Bilde. Pour y parvenir, la plupart des élus du parti d'extrême droite restent à Paris pendant la semaine.

"Nous avons un roulement de 70 députés sur 89 mobilisables en permanence à l'Assemblée, du lundi au jeudi."

Sébastien Chenu, RN

à franceinfo

Résultat : les élus sont moins présents dans leur circonscription. "Comme tout le monde nous aimerions travailler dans des conditions plus optimales", regrette Sébastien Chenu.

Ses vœux seront-ils exaucés à l'issue des discussions lancées par la présidence de l'Assemblée ? Plusieurs pistes seraient à l'étude, parmi lesquelles une plus grande facilité pour déléguer son vote, sans avoir à être présent dans l'hémicycle, la sanctuarisation du vendredi pour pouvoir se déplacer en circonscription ou encore la fin des séances prolongées après minuit. "L'idée est de voir comment travailler mieux, pas moins", résume l'entourage de la présidente de l'Assemblée Yaël Braun-Privet.

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