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Pourquoi les législatives posent problème

Organisées après la grand-messe de la présidentielle, les élections législatives s'apparentent de plus en plus à un vote de confirmation qui ne passionne pas les Français.

Article rédigé par Ilan Caro
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 5min
La façade du Palais-Bourbon, à Paris. (MARTIN BUREAU / AFP)

Dimanche 10 juin, 19 heures. Le premier chiffre connu du premier tour est celui de l'abstention : 42,78%, un record absolu pour des élections législatives sous la Ve République. C'est peu de dire que la campagne des législatives n'a pas soulevé les foules, après une participation honorable à la présidentielle. On pourra relever le simplisme manichéen des arguments ("donner une majorité à François Hollande" versus "ne pas mettre tous ses œufs dans le même panier"), mais aussi l'absence de débat de fond, alors que la crise appelle des décisions cruciales pour l'avenir.

Il faut dire que la présidentielle, ultra-médiatisée, est passée par là. Puis, le président a été investi dans un faste quasi monarchique couronnant de longs mois de campagne. Et voilà que démarrent cinq nouvelles semaines de joute électorale. Or, le pays vit au rythme des élections depuis plus d'un an, à l'époque où les socialistes préparaient leur primaire et où DSK cherchait le meilleur moyen de démissionner du FMI pour devenir candidat...

En plus de lasser le citoyen, cet interminable tunnel a comme figé le cours normal des institutions. Le Parlement ne siège plus depuis mars, rendant impossible toute nouvelle loi, même consensuelle, comme celle contre le harcèlement sexuel. Quant au nouveau gouvernement, il doit attendre plus d'un mois le verdict des urnes avant d'entrer dans le vif du sujet... ou de faire ses cartons.

Les fautifs : quinquennat et inversion du calendrier ?

Le désamour des Français pour ces élections résulte aussi du passage de sept à cinq ans du mandat présidentiel, adoptée par référendum en 2000. Le quinquennat est devenu la seule unité de temps institutionnelle. Sauf dissolution – devenue improbable – de l'Assemblée nationale, démission ou décès d'un président de la République, jamais plus des élections législatives ne viendront s'intercaler entre deux élections présidentielles, comme ce fut le cas en 1967, 1968, 1973, 1978, 1986, 1993 et 1997.

Ce décalage des échéances rendait le scrutin législatif identifiable. Il était celui par lequel on pouvait renforcer ou défaire une majorité, conforter ou sanctionner un gouvernement, lancer un avertissement au président, voire lui imposer une cohabitation, comme en 1986, 1993 et 1997.

En 2002, deux ans après l'adoption du quinquennat, un autre événement est venu saper la portée de ces élections. Sous l'impulsion de Lionel Jospin, les socialistes et quelques centristes dont François Bayrou ont voté le report à juin des législatives qui devaient se tenir en mars. De sorte qu'elles se produisent une fois passée la présidentielle. Résultat: les élections de 2002 et 2007 ont confirmé le choix des Français un mois plus tôt à la présidentielle. Dans les faits, les législatives sont devenues une sorte de validation du scrutin présidentiel.

C'est tout le paradoxe de la Ve République qui resurgit : celui d'un gouvernement responsable à la fois devant le Parlement et devant un président de la République élu au suffrage universel direct. "Les attributions du président de la République s’exercent sans contrepouvoirs suffisants et sans que la responsabilité politique de celui que les Français ont élu pour décider de la politique de la nation puisse être engagée", notait en 2007 le comité Balladur, chargé de plancher sur la réforme des institutions (voir PDF). Avec la concomitance des échéances, le régime se présidentialise encore un peu plus, au détriment du Parlement.

Faire coïncider les deux élections, une hypothèse "compliquée"

Pour arracher les élections législatives au désintérêt qu'elles suscitent, certains, comme l'écologiste Noël Mamère, proposent de faire coïncider leurs dates avec celles de l'élection présidentielle. A l'Elysée, on juge cette hypothèse "compliquée". L'écart entre les deux tours de la présidentielle est de deux semaines, tandis qu'il est d'une semaine aux législatives.

D'autre part, même si c'est peu probable, on ne peut pas totalement exclure qu'une dissolution ou un décès de président vienne à l'avenir chambouler le calendrier. Mercredi, Jean-Marc Ayrault s'est dit favorable à un raccourcissement du délai entre les deux élections plutôt qu'à un scrutin le même jour, qui équivaudrait selon lui à un "vote dans le brouillard, dans l'inconnu".

L'entourage de François Hollande a fait savoir la semaine dernière que le chef de l'Etat souhaitait engager "à l'automne" une consultation avec les chefs des partis politiques sur la réforme des institutions. Outre le calendrier électoral, elle pourrait concerner la procédure de parrainage pour l'élection présidentielle, le financement de la vie politique, et l'instauration d'une dose de proportionnelle pour élire les députés.

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