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Quel bilan pour la politique étrangère de Barack Obama ?

Lutte contre le terrorisme, conflit afghan… Ce soir, le président sortant affronte Mitt Romney dans un débat portant sur la politique étrangère. A quelques semaines de la présidentielle américaine, FTVi dresse le bilan d'Obama en la matière.

Article rédigé par Nora Bouazzouni
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 10min
Barack Obama prononce un discours pour l'inauguration du Chavez National Monument à Keene, en Californie (Etats-Unis), le 8 octobre 2012. (BRENDAN SMIALOWSKI / AFP)

PRESIDENTIELLE AMERICAINE - Lutte contre le terrorisme, conflit afghan, casse-tête de Guantanamo, nucléaire iranien… Autant de dossiers épineux hérités de l'ère Bush dont Obama a dû se saisir, et qui seront évoqués lors du dernier débat l'opposant à Mitt Romney, à suivre en direct dans la nuit du mardi 23 octobre sur notre site.

A quelques semaines du scrutin, le 6 novembre, francetv info dresse le bilan du président sortant en matière de politique étrangère.

Lutte contre le terrorisme

Ce qu'il a trouvé en 2008. Après les attentats du 11-Septembre, le président américain George W. Bush déclenchait en 2001 une "guerre contre le terrorisme". Sept ans plus tard, le candidat Barack Obama promettait lui d'"écraser Al-Qaïda", mais aussi, dans son discours du Caire en 2009, un "nouveau départ" vis-à-vis du monde musulman, rappellent Les Echos.

Ce qu'il laisse en 2012. Obama a concentré ses efforts sur le Pakistan, convaincu que c'était là que se jouait la lutte contre le terrorisme. Il a visé notamment les régions tribales frontalières avec l'Afghanistan, qui auraient servi de base arrière à Al-Qaïda pour des attaques dans lesquelles plus de 2 000 soldats américains ont trouvé la mort. Parmi les mesures : aide financière au Pakistan en échange d'une neutralisation efficace des groupes armés présents sur le territoire, entraînement des troupes pakistanaises… Mais la plus grande victoire d'Obama est sans aucun doute l'assassinat par un commando américain, le 2 mai 2011, d'Oussama Ben Laden à Abbottabad (Pakistan).

Il n'en reste pas moins que les relations entre les deux pays sont aujourd'hui très tendues. Après avoir gelé un tiers des aides accordées au Pakistan pour ce qu'il estime être un manque d'action d'Islamabad contre les islamistes armés, Washington a multiplié les attaques de drones dans la région. Des raids qui ont fait plus de 3 000 morts (dont de nombreux civils) depuis 2004, pointe un rapport de la New America Foundation (en anglais). Ils se sont surtout systématisés depuis qu'Obama a pris ses fonctions : une frappe tous les quatre jours entre 2008 et 2010, contre une tous les 43 jours sous Bush, affirme le New York Times (en anglais).

Ce qui vaut au prix Nobel de la paix 2009, qui s'était par ailleurs prononcé contre l'invasion de l'Irak en 2003, d'être vertement critiqué par les médias de tous bords – tandis que 83% des Américains approuvent cette guerre des drones, selon un sondage réalisé en février 2012 et cité par le Washington Post (en anglais). Mais d'après le rapport "L'Année du drone", publié début 2010 par la New America Foundation, ces raids sanglants n'affaiblissent pas pour autant les talibans ni Al-Qaïda, pas plus qu'ils ne perturbent l'entraînement des extrémistes en zone pakistanaise. Pire, "les attentats-suicides au Pakistan et en Afghanistan ont d'ailleurs augmenté parallèlement à l'augmentation des attaques de drones", pointe l'AFP, qui cite le rapport.

Le conflit afghan

Ce qu'il a trouvé en 2008. Envahi en 2001 par les Etats-Unis et leurs alliés sous l'impulsion de George W. Bush afin de chasser les talibans du pouvoir, l'Afghanistan a reçu des renforts américains fin 2009. L'administration Obama y a envoyé 33 000 hommes supplémentaires afin d'entraîner et renforcer l'armée afghane pendant dix-huit mois, dans le but de "perturber, démanteler et battre Al-Qaïda".


Ce qu'il laisse en 2012. Soixante-huit mille soldats américains y sont toujours déployés. Leur retrait, promesse de campagne d'Obama, devrait prendre fin en 2014, a annoncé le président. "J'ai promis de terminer le travail en Afghanistan", a-t-il réaffirmé en juillet. Mais la situation intérieure ne s'est toujours pas stabilisée ; l'Otan craint même que les talibans ne reviennent au pouvoir. Et un sentiment anti-américain exacerbé pèse de plus en plus sur les négociations entre Kaboul et les extrémistes armés. Après la vidéo montrant des militaires américains urinant sur des cadavres d'insurgés début janvier, ce sont des bavures de l'Otan puis des exemplaires du Coran brûlés sur une base militaire afghane, suivant l'ordre donné par un officier américain, qui remettent le feu aux poudres. Depuis le 1er janvier 2012, 296 soldats américains sont morts au combat, et les attaques "de l'intérieur", commises par des talibans infiltrés au sein de l'armée afghane, se sont multipliées. Les troupes françaises, dont le retrait a été annoncé par François Hollande pour décembre 2012, sont elles aussi les cibles des insurgés, avec 88 soldats français tués en Afghanistan en dix ans.

La prison de Guantanamo

Ce qu'il a trouvé en 2008. Ouverte en 2002 par l'administration Bush, dénoncée depuis par les organisations de défense des droits de l'homme, la prison américaine de Guantanamo, située sur une base navale cubaine, devait être fermée par Barack Obama.

Ce qu'il laisse en 2012. Un centre de détention toujours opérationnel, devenu un véritable casse-tête. Obama est accusé de passivité et critiqué pour son manque de courage. Pourtant d'après certains experts, c'est le Congrès qui met des bâtons dans les roues du président américain. En refusant par exemple, en mai 2009, l'enveloppe qu'il demandait pour la fermeture de la prison militaire, en interdisant le transfert de certains détenus vers un autre établissement pénitentiaire américain et leur comparution devant un tribunal fédéral et non militaire.

Obama se retrouverait par ailleurs dans "une situation inextricable", selon Le Monde : à cause de la façon dont ont été traités les détenus, contraire aux droits de l'homme, "leurs déclarations ne sont tout simplement pas recevables devant un tribunal". En mars 2011, le président a signé un décret autorisant la détention illimitée d'une quarantaine de détenus suspectés de terrorisme et estimés trop dangereux pour être libérés, mais ne pouvant être jugés faute de preuves suffisantes. Mais il a également fait en sorte qu'aucun nouveau suspect ne puisse être ajouté aux 167 détenus de la prison, qualifiée par Amnesty International de "goulag moderne" et où 9 hommes ont trouvé la mort depuis 2002.

Le 21 septembre, l'administration américaine a publié une liste de 55 détenus dont le transfèrement vers un autre pays a été approuvé. D'après le gouvernement, depuis l'arrivée de Barack Obama à la Maison Blanche, 28 prisonniers ont été rendus à leur pays et 40 autres ont été transférés vers des pays hôtes.

La menace nucléaire iranienne

Ce qu'il a trouvé en 2008. Dans son discours sur l'état de l'Union en 2002, un évènement dans lequel le président des Etats-Unis dévoile son programme pour l'année, George W. Bush présentait l'Iran comme appartenant à "l'axe du Mal", avec l'Irak et la Corée du Nord. Des pays qui soutiendraient le terrorisme et possèderaient des armes de destruction massive. Téhéran a toujours affirmé enrichir son uranium pour des raisons énergétiques et médicales, un droit garanti par le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires de 1968. Mais Bush, refusant toute négociation avec le président iranien Mahmoud Ahmadinejad, qu'il qualifiait de "tyran", a choisi de sanctionner Téhéran, à l'instar de l'Union européenne.

Ce qu'il laisse en 2012. Les instances internationales sont convaincues que Téhéran prépare l'arme atomique et Barack Obama a jugé le programme nucléaire iranien "inacceptable". Mais contrairement à son prédécesseur, il s'est d'abord montré ouvert aux discussions avec son homologue iranien. Toutefois, devant le refus de l'Iran de dialoguer et l'échec répété des négociations, les Etats-Unis ont fini par se ranger derrière l'Europe, qui ne cesse de durcir ses sanctions.

Malgré les appels répétés du Premier ministre israélien, Benyamin Netanyahu, qui a demandé au président américain puis à la tribune de l'ONU qu'une "ligne rouge" soit fixée à l'Iran pour lui interdire de se doter de l'arme nucléaire, Obama refuse toujours d'y envoyer des troupes américaines. Même les menaces réitérées de "frappes préventives" d'Israël sur Téhéran, considérées par un grand nombre d'Israéliens juifs comme un "bluff destiné à pousser les Américains à prendre l'initiative", n'ont pas convaincu Barack Obama.

 

Le bilan de quatre années de politique étrangère sous Barack Obama n'est guère brillant. Et son concurrent républicain à la présidentielle, Mitt Romney, dont "l'inexpérience" est souvent rappelée par les porte-parole d'Obama, a fustigé la "passivité" du président sortant dans les dossiers sensibles hérités de deux mandats de George W. Bush. La politique étrangère sera de nouveau abordée lors des débats des 16 et 22 octobre entre les deux prétendants, où Romney devrait en dire davantage sur la ligne dure qu'il défend.

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