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Édito
"A bas la mauvaise République" : Jean-Luc Mélenchon flirte avec la ligne du rouge de l'appel à l'insurrection
Lundi 1er mai, aux alentours de 13 heures, avant que le cortège ne s’élance, le leader insoumis a pris la parole devant un parterre de militants, rassemblés près de la place de la République. Sans surprise, Jean-Luc Mélenchon a exhorté ses partisans à ne rien lâcher dans la mobilisation, à ne pas passer à autre chose. Il leur a promis de rétablir la retraite à 60 ans.
Mais on a aussi entendu son utilisation de plus en plus banale d’un vocabulaire de soulèvement, de révolte. Un registre habituel dont on aurait tendance à s'habituer, mais tout de même… Cela n’est pas exactement la même chose d’appeler à une VIe République et de scander "à bas la mauvaise République" devant une petite foule ravie. Une ambiguïté de plus sur son respect des institutions. Cela n’est pas exactement la même chose de mettre la pression sur le Président à coup de "Macron démission" et de promettre au chef de l’Etat : "Le 14 juillet, nous lui apprendrons la signification du mot insurrection".
Pas "insurrection populaire" ou "insurrection citoyenne" comme il le dit souvent pour noyer le poisson. Juste "insurrection". Selon la définition du Robert : "Soulèvement qui vise à renverser le pouvoir établi. Exemple : l'insurrection de la Commune, 1871". Les mots ont un sens et ce fin lettré qu’est Mélenchon le sait bien.
Les syndicats ont pris à la Nupes la place de premiers opposants à Macron
Derrière cette rhétorique se joue en réalité la place de premier opposant. Malgré un contexte qui aurait dû être porteur, la Nupes est en crise. Elle n’a pas réussi à rendre acceptable son obstruction à l’Assemblée. Le leadership des insoumis reste contesté. Les socialistes se déchirent. Les écologistes veulent faire bande à part aux européennes. Et dans le même temps, ce sont les syndicats qui sont au cœur de toutes les attentions. C’est l’intersyndicale et non la Nupes qui peut réunir des centaines de milliers de manifestants dans les rues.
Les insoumis n’ont pas la place qu’ils espéraient. On comprend ainsi pourquoi l’ancien triple-candidat à la présidentielle monte à chaque fois d’un cran. Sa radicalité est une manière de s’affirmer, d’écraser la concurrence interne, de maintenir la pression sur l’ensemble des acteurs de la contestation des retraites. En un mot : de jouer déjà l’après-retraites…
Car si aujourd’hui, ce sont les syndicats qui donnent le tempo, leur unité est friable. Viendra le jour, probablement assez rapidement, où l’intersyndicale se fracturera avec le départ de la CFDT. Ce jour-là, en ayant entretenu la colère de ses militants à grand coup de velléités révolutionnaires, Jean-Luc Mélenchon pourra, à nouveau, tenter de revendiquer la place de leader de l’opposition au gouvernement. Et tant pis si au passage, il a fragilisé les institutions.
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