Salaires : "Les dispositifs de partage de la valeur ne remplacent pas les augmentations", assure Louis Marguerite, député Renaissance
Le projet de loi sur le partage de la valeur en entreprise veut inciter les entreprises à partager leurs bénéfices avec les salariés à travers des intéressements, des participations, de l'actionnariat salarié et la prime dite "Macron". Ce texte est la transposition d'un accord entre partenaires sociaux.
La majorité est en désaccord avec le Sénat sur le début de l'expérimentation de l'intéressement pour les entreprises de 11 à 49 salariés. Le gouvernement souhaiterait que ce dispositif commence dès 2024, mais le Sénat l'a reporté à 2025.
franceinfo : Pourquoi est-ce que la majorité souhaite que ça démarre aussitôt ?
Louis Margueritte : D'abord, il faut rappeler que c'est une des mesures les plus importantes de cet accord. Concrètement, ça signifie que dans les entreprises de 11 à 49 salariés, lorsqu'il y aura trois bénéfices successifs de plus de 1% du chiffre d'affaires, alors elles auront l'obligation de mettre en place un des trois dispositifs qu'elles souhaitent. En l'état actuel de l'accord national interprofessionnel, cette expérimentation doit se mettre en œuvre à partir de 2025. Nous avons proposé à l'Assemblée nationale d'avancer d'un an, et le Sénat a rétabli l'écriture initiale. Donc c'est un point de discussion que nous devons avoir en commission mixte paritaire et je souhaite qu'on ait une discussion apaisée. Le simple argument, c'est de se dire que si c'est un dispositif que l'on souhaite, pourquoi attendre 2025 là où on pourrait le faire dès l'année prochaine, en 2024.
Qu'est-ce que vous répondez aux parlementaires de gauche, notamment les sénateurs communistes, qui disent que ce dispositif remplace les augmentations de salaires ?
Non, ça ne les remplace pas. Je pense que c'est un raccourci même s'il y a effectivement un petit effet de substitution. Ça a été prouvé par différentes études récentes, notamment une de l'Insee qui faisait apparaître un effet de substitution de 30 %. Ça signifie que par exemple, si je verse une prime de 100, il y aurait 30 € qui en fait ne reviendraient pas dans les salaires. Ça ne veut pas dire qu'il n'y a pas d'augmentation de salaire par ailleurs. Nous, ce que l'on souhaite, c'est que pour toutes les entreprises qui le souhaitent et qui le peuvent, il y ait des augmentations de salaires en plus de ces dispositifs. Pour les entreprises qui ne peuvent pas toujours augmenter les salaires, il y aura effectivement ces effets de complémentarité lorsque l'entreprise a généré du bénéfice pour qu'il puisse y avoir un reversement. De plus, désormais, à partir de 11 salariés, ces dispositifs seront automatiques.
Vous souhaitez que les entreprises de plus de 50 salariés ouvrent des négociations pour définir ce qu'est un bénéfice exceptionnel en vue de verser, le cas échéant, une prime supplémentaire. Que se passe-t-il, s'il n’y a pas d'accord ?
Pour l'instant il n'y a rien mais il faut quand même constater les progrès que nous faisons en transposant cet accord interprofessionnel. D'abord, il démarre à partir de 50 salariés et les représentants syndicaux nous disaient qu’on a toujours des dispositifs pour les grandes ou les très grandes entreprises. Or, voici un exemple de mesure qui va s'appliquer à des entreprises de 50 salariés qui disposent d'un délégué syndical, et elle concerne environ 8 000 entreprises en France. Donc c'est vraiment des centaines de milliers, voire des millions de salariés qui vont se mettre autour de la table. Et qui vont effectivement définir à la fois entre la direction et les délégués syndicaux, ce qu'est un bénéfice exceptionnel et la conclusion qu'ils en tirent, si ces critères sont atteints. Ce que je propose évidemment, c'est qu'on laisse le texte tel qu'il est. Cela a été traduit très concrètement dans le texte et, dès qu'on aura les premiers accords sur ces bénéfices exceptionnels, de constater si effectivement, ils sont bien mis en œuvre ou non.
Vous êtes membre de la commission des finances. Il y a trois lettres qui vous occupent beaucoup en ce moment, PLF, le projet de loi de finances, donc, le budget de l'État. L'examen du volet dépenses démarre demain dans l'hémicycle. Ça va très probablement se finir pas en 49-3. Est-ce que ça sert quand même à quelque chose ?
Oui, ça sert. D'abord, je rappelle qu'il y a des débats en commission qui sont très longs en ce moment même et qui ne sont pas encore terminés. L'objectif du gouvernement et de la majorité, c'est qu'on se laisse quand même suffisamment de temps pour examiner quelques missions. On ne pourra probablement pas toutes les examiner. Je pense notamment à la mission outre-mer, mais il y en aura d'autres. Ça sert aussi parce que c'est l'occasion, à la fois en commission comme en hémicycle, de faire le point sur les grandes politiques publiques qui nous occupe. Enfin, ça sert aussi pour qu'il n'y ait pas des amendements qui parfois objectivement, frisent le ridicule, et pour que l'on ait un débat serein et sain et qu'on puisse avoir des arguments qui ne soient pas uniquement des arguments d'autorité.
Est-ce qu'il y a des amendements et des propositions, des oppositions qui vont être repris ?
Dans le 49-3, sur la partie recettes, qui a été adoptée la semaine dernière, il y avait plus de 150 amendements adoptés et un certain nombre venait de l'opposition. Oui, c'est possible, et ça avait déjà été le cas, l'an dernier en 2022. Donc, personnellement, je n'ai pas de doutes sur le fait qu'on fera preuve de responsabilité.
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