Enseignement de l'arabe : un chantier miné pour l'exécutif
C’est une promesse d’Emmanuel Macron, de son plan de lutte contre le séparatisme : remettre l’apprentissage de la langue arabe dans le giron de la République. Ce ne sera pas pour tout de suite.
“Remettre l'arabe dans le giron de la République”, comme l'avait appelé de ses vœux Emmanuel Macron début octobre, cela signifie extraire l’enseignement de l’arabe des écoles coraniques, ou de l’instruction à domicile. Et renforcer les filières au primaire, au collège, au lycée. Et c'est l'une des pistes avancées par le président de la République pour lutter contre le séparatisme et le communautarisme religieux.
Première difficulté : le manque de professeurs d’arabes en France. Il y en a 175 au sein de l'Éducation Nationale, pour quelque 61 500 établissements. La raison à cela ? Le manque d’attractivité du métier. Les spécialistes du ministère expliquent qu’aujourd’hui, l’arabe n’est enseigné que dans deux types d’établissements : ceux de REP+, où se concentrent les plus grandes difficultés sociales, et les écoles d’élite, celles qui fabriquent les futurs diplomates, chercheurs et spécialistes du renseignement.
Ces dernières sont peu nombreuses, et les places y sont chères. “Ce qui a contribué à associer l’arabe à une langue réservée à certaines classes sociales, les élites d'un côté, les publics en difficulté scolaire et confrontés à la pauvreté de l'autre”, expliquent les équipes de Jean-Michel Blanquer.
In fine, l'arabe est une langue peu attrayante pour les jeunes agrégés. Car dans l'immense majorité des cas, les aspirants professeurs d'arabes savent dès le concours que leur carrière sera cantonnée aux établissements difficiles. “Plus on aura de postes à pourvoir, plus on aura de candidats qui se présenteront” veut croire l'Éducation nationale.
Décoreller apprentissage et religion
Là est la deuxième difficulté : comment former aussi plus de profs d’arabe ? “Reconstruire un vivier, cela demande un peu de temps”, reconnaît l’entourage de Jean-Michel Blanquer. Le ministre de l’Education évoque lui-même une politique républicaine de ressources humaines, avec la création de nouvelles filières partout sur le territoire. “Une politique RH républicaine”, explique le ministère, ça veut dire réussir à décoreller l’apprentissage de l’arabe et la religion. Tenir à distance les “réseaux qui ont fait main basse sur l’enseignement de cette langue et qui s’en servent à d’autres fins”. Donc se doter d'outils pour se prémunir de l’entrisme de ces mêmes réseaux au sein de l’Education nationale.
C’est l’une des grandes craintes de Jean-Michel Blanquer, qui en privé évoque ouvertement ce risque. Et ça explique pourquoi l’exécutif préfère avancer méthodiquement et prudemment sur ce dossier. Sans tambour ni trompettes.
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