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Législatives 2022 : le "stress" des collaborateurs parlementaires dont l'avenir est suspendu aux résultats de l'élection

À moins d'une semaine du premier tour des élections législatives le 12 juin prochain, de nombreux collaborateurs parlementaires sont dans l'angoisse. Leur avenir professionnel dépend du résultat de leur député dans ce scrutin. Témoignages.

Article rédigé par franceinfo - Victoria Koussa
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6min
L'hémicyle vide de l'Assemblée nationale, le 10 mai 2022. (PHOTO D'ILLUSTRATION / OLIVIER CORSAN / MAXPPP)

Certains ne s'imaginent plus quitter le Palais Bourbon. "J'ai un bureau particulièrement magnifique que j'aurais beaucoup de mal à quitter avec notre fenêtre qui donne sur la tour Eiffel", souffle Victoria Jolly. À 28 ans, elle est la présidente de l'Association des collaborateurs progressistes. Même si sa députée, membre de La République en marche, se représente et qu'elle est censée rester avec elle en cas de victoire, cette passionnée de politique n'est sûre de rien quant à son avenir professionnel proche.

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Comme Victoria, ils sont beaucoup de collaborateurs à voir leur vie quotidienne suspendue aux résultats de ces élections législatives des 12 et 19 juin. En cas de défaite de leur député, ou si ce député ne se représente pas, ils devront faire leurs cartons et quitter l'Assemblée. "Le principe de la politique, c'est que tout peut s'arrêter d'un coup. C'est vertigineux, décrit Victoria. Très clairement, à 20h02 dimanche soir, beaucoup auront des mines déconfites. C'est la règle de la démocratie, personne ne s'en plaint car c'est comme ça. Cependant, c'est vrai qu'il y a peu de métier en France où l'on est dépendant des élections." 

Les scrutins dictent donc la suite de l'aventure pour ces collaborateurs qui ont généralement entre 20 et 30 ans. En cas de défaite de leur parlementaire, le CDI prend fin automatiquement. Maxime Torrente fait actuellement campagne sur ses jours de congés dans les Bouches-du-Rhône pour le député Les Républicains qu'il accompagne depuis cinq ans. Il est syndiqué CFE-CGC : "Ça nous échappe et c'est beaucoup de stress. Le lendemain des élections législatives, j'ai réservé un billet de train à 6h du matin jusqu'à Paris, soit pour garder mon bureau, soit pour faire mes cartons et évacuer le bureau dans les 48h. C'est souvent très difficile."  

"C'est un des seuls métiers en France où l'on peut apprendre notre licenciement en direct à la télévision."

Maxime Torrente, collaborateur parlementaire

à franceinfo

Ce qui est brutal aussi pour lui est de devoir rendre le badge d'accès aux lieux de vie de l'Assemblée nationale. C'est un sésame qui permet d'accéder à ce qu'on appelle "le périmètre sacré", c'est-à-dire les salles autour de l'hémicycle. Ce badge est, dans tous les cas, désactivé au bout de quelques jours.

Certains cherchent à se replacer chez un autre député

Pour anticiper, certains cherchent déjà une nouvelle place. Depuis des semaines, depuis le lendemain du premier tour de l'élection présidentielle, quasiment tous les attachés parlementaires refont leur curriculum vitæ. En premier ceux dont le député ne se représente pas. Ils sont ainsi quelques uns à tuer le temps dans les couloirs presque déserts de l'Assemblée. "Je suis dans un bureau vide, les murs sont blancs, il n'y a plus rien d'accroché aux murs, les placards sont vides, tout est parti à la poubelle ou dans des cartons", raconte Iris.

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Pour éviter de "déprimer", comme elle dit, dans son appartement parisien, Iris tient à venir chaque jour à l'Assemblée. Elle s'est battue pour y mettre un pied, désormais pas question de la quitter. Elle frappe à toutes les portes : "C'est un peu gênant parfois. Je vais voir d'autres collaborateurs ou je leur téléphone pour leur demander s'ils ont envie de rester, même si je ne les connais pas. Si je ne fais pas ça, je vais perdre trop de temps. J'espère qu'il y aura du mouvement, aussi au niveau des ministres avec des secrétariats d'état qui vont s'ouvrir ou des postes au niveau des groupes parlementaires... Il y a beaucoup de 'si'."

C'est finalement un immense jeu de chaises musicales puisqu'en moyenne, chaque député travaille avec trois collaborateurs. Cela représente au total 2000 collaborateurs à garder, à replacer, ou à déplacer en fonction des défaites et des victoires. Ceux qui n'ont rien trouvé le 20 juin, au lendemain du second tour viendront même physiquement à l'Assemblée, dans la Salle des Quatre Colonnes, pour une sorte de grand job dating. Pour ceux qui ne trouvent alors vraiment pas, un dispositif spécifique existe à Pôle emploi depuis cinq ans.

Un salaire compris entre 2 000 et 2 500 euros par mois

Ces collaborateurs ont aussi peur parfois de changer d'équipe et de tomber sur un député qui harcèle ses collaborateurs, comme évoqué lors de certaines affaires récentes. Héloise limite par exemple ses recherches à une liste de noms, 
des candidats de la Nupes essentiellement, engagés pour les droits des femmes, dont elle décortique le profil sur internet avant d'envoyer sa candidature. "Je regarde et je tape 'harcélement sexuel'. Je veux même savoir s'il y a eu des rumeurs ou quelque chose comme ça. En parlant avec d'autres collaborateurs, j'ai entendu des choses qui ne sont pas sorties dans la presse, mais ça se sait. Je n'approcherai jamais ces personnes-là. Nous passons des heures ensemble, avec énormément de pression, de proximité. Ça ne veut pas dire que ça va mal tourner mais ça peut."

Héloise préfère quitter l'Assemblée nationale plutôt que de travailler avec un député éloigné de ses valeurs, d'autant qu'elle peut aussi se tourner vers l'associatif. Collaborateur parlementaire est certes un métier précaire, avec un salaire cependant compris entre 2 000 et 2 500 euros par mois, mais c'est aussi un métier tremplin pour atterrir un peu ou beaucoup plus loin.

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