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Reportage
Pollens "plus agressifs", alimentation, réchauffement climatique... Comment expliquer cette "épidémie" de nouvelles allergies ?

Depuis une trentaine d’années, le nombre de personnes atteintes par les allergies explose. Si un tiers de la population est allergique aujourd’hui, dans 25 ans, ce sera la moitié de la population mondiale, selon l’Organisation mondiale de la Santé. franceinfo a posé la question à des spécialistes.
Article rédigé par franceinfo, Solenne Le Hen
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
Selon des études scientifiques, notre mode de vie urbain explique l'explosion des allergies. Photo d'illustration. (MATHIEU HERDUIN / MAXPPP)

De nombreux allergologues n'hésitent plus à parler d'une "épidémie". On est aujourd’hui allergiques aux animaux, aux acariens, aux médicaments, aux pollens ou encore aux aliments. La plupart des études scientifiques l’expliquent par notre mode de vie urbain.

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"Nous voyons qu'on va avoir plus d'allergies en milieu urbain et que c'est multifactoriel, explique le professeur Frédéric de Blay, président de la Fédération française d’allergologie. C'est-à-dire qu'il y a sûrement l'alimentation, la pollution extérieure, la pollution intérieure ou le stress maternel pendant la grossesse."

"En Chine, en l'espace de dix ans, ils ont augmenté leurs maladies allergiques de façon incroyable. C'est finalement ce mode de vie urbain que nous avons qui est un facteur favorisant. Et il n'y a pas un facteur, c'est multifactoriel."

Frédéric de Blay, président de la Fédération française d’allergologie

à franceinfo

Selon les professionnels de santé, il est difficile de dire quel est l'impact du changement climatique sur les allergies. Une chose est sûre, avance le docteur Pascale Beaumont, les pollens font apparaître de nouvelles allergies, notamment alimentaires, explique la vice-présidente du réseau d’allergovigilance : "On voit de plus en plus de réactions sévères avec des fruits ou des légumes qui ont des réactions croisées avec les pollens. C'est lié à une modification de la pollinisation, au réchauffement climatique et des pollens de plus en plus agressifs. La noisette, la carotte et le soja sont ceux qui provoquent les réactions plus sévères. Ils représentent plus de 1% des réactions signalées et sont de plus en plus fréquents."

Les conséquences des allergies sont souvent bénignes. Il s'agit de rhinites, d'éternuements ou de réactions de peau, mais cela peut aller aussi jusqu'au décès avec un choc anaphylactique ou une crise d’asthme. À cause, parfois, d'un simple contact avec un objet de la vie quotidienne.

D'ailleurs, le fait de remplacer le plastique un peu partout, inquiète Pascale Couratier, directrice générale de l’Association française pour la prévention des allergies : "Par exemple, on peut avoir des films alimentaires à base de légumineuses ou de restes de fruits également. Il y a, par exemple, des pailles à base de blé, des brosses à dents à base de bambou et de blé. Il y a également des contenants à base de lait et des vêtements à base de lait. Ok, mais si je suis allergique au lait, qu'est-ce qui se passe ? Effectivement, c'est super et écologique, mais, malheureusement, pour une personne allergique, on peut voir une réaction."

"Il n'arrivait plus à respirer"

Il est difficile d’empêcher l’arrivée de nouvelles allergies, mais on peut essayer de vivre un peu mieux avec. À Strasbourg, Martine Ott est depuis 35 ans conseillère en environnement intérieur. Il s'agit d'un poste financé par le CHU et l’Agence régionale de santé.

À la demande des médecins, elle se rend au domicile des patients pour essayer de comprendre d’où viennent leurs problèmes de santé. Les nids à poussière comme les tapis, les animaux domestiques, les ventilations en panne : rien n’échappe à ses yeux de lynx, pas même les moisissures dans la chambre d’Ayaz.

Martine Ott, conseillère en environnement intérieur à Strasbourg (à gauche) constate les moisissures dans l’une des chambres de l’appartement de Sevda Deniz (à droite), dont le fils souffre d’asthme. (SOLENNE LE HEN / RADIO FRANCE)

Des moisissures qui désespèrent la mère de ce petit garçon de 7 ans, qui a encore été victime d'une crise d'asthme récemment. "Il n'arrivait plus à respirer. Mon mari qui ne panique pas d'habitude, il m'a dit : 'Appelle le Samu !' C'est quand même un gamin de 7 ans qui souffre, ça fait mal au cœur en tant que mère, confie-t-elle, en montrant les taches d'humidité au plafond. Il dort deux jours dans cette pièce et le lendemain, c'est fini. Depuis 2017, j'essaie de déménager, de trouver une solution", désespère la maman.

"Il faut qu'on regarde avec le bailleur et qu'on trouve une solution", lui répond Martine Ott.

"Il faut nettoyer les moisissures avec de l'eau de javel. C'est ce qui marche le mieux, ce qui est le moins coûteux. Donc un verre de javel et neuf verres d'eau froide."

Martine Ott, conseillère en environnement intérieur

à franceinfo

Martine Ott essaie aussi d'alerter sur la pollution chimique intérieure qui amplifie les symptômes des allergies respiratoires. Ces "irritants" du quotidien, ce sont, par exemple, les parfums d’intérieur, les huiles essentielles ou encore l’encens : "Ça libère ce qu'on appelle des composés organiques volatils : le benzène, le formaldéhyde, les terpènes qui sont par exemple les odeurs d'agrumes, les alpha-pinènes qui sont les odeurs de pin. Souvent, les produits d'entretien ont aussi ces odeurs et ces parfums. Ce n'est pas parce que c'est naturel, et même parce que c'est bio parfois, que ce n'est pas dangereux."

Mieux vaut dépolluer son intérieur, alors qu'à l'extérieur débute la saison des pollens. Les pollens d'aulne, de frêne, de charme et de peuplier sont déjà présents et bientôt, le redoutable pollen de bouleau.

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