Manifestations propalestiniennes : "On a tout mis sur la table" avec les étudiants de Sciences Po à Menton, témoigne le professeur israélien Denis Charbit

Professeur de sciences politiques israélien invité au campus de Sciences Po Paris à à Menton, Denis Charbit pointe "la tentation de la radicalité" qui monte via les réseaux sociaux.
Article rédigé par franceinfo
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Denis Charbit, professeur de sciences politiques à l'Université libre d'Israël, invité jeudi 2 mai 2024 sur franceinfo. (FRANCEINFO / RADIO FRANCE)

Lors des échanges avec les étudiants de Sciences Po Menton, "on a tout mis sur la table", témoigne Denis Charbit, professeur de sciences politiques à Open University of Israël (Ra'anana), invité jeudi 2 mai sur franceinfo. Il vient de terminer d'enseigner une session de cours en détachement sur le campus de Sciences Po Paris à Menton (Alpes-Maritimes), spécialisé sur la Méditerranée et le Moyen-Orient. Depuis mardi, le campus est fermé "jusqu'à nouvel ordre" après l'occupation, lundi, des locaux par une trentaine d'étudiants pour soutenir la cause palestinienne. Une banderole "Gaza, Sciences Po est avec toi" a été déployée devant l'établissement. 

"Vous savez, je suis arrivé le premier jour et j'ai dit : je m'appelle Denis Charbit, je suis Israélien, mais je ne suis pas l'ambassadeur d'Israël, et vous avez le droit de tout dire, explique le professeur. J'ai vraiment établi une relation de confiance, une relation pédagogique sur douze semaines, de février à la fin du mois d'avril et, avec la franchise dont les Israéliens sont capables, on a tout mis sur la table".

Des échanges "respectueux"

Il tire un bilan très positif de l'expérience. "Ça a été une expérience formidable, et ils m'ont dit, le dernier jour : 'On était très sceptiques sur votre capacité de discuter du conflit, des responsabilités', mais ils ont été très satisfaits et je l'ai été également". Il témoigne d'échanges "respectueux" dans la salle de classe. "Ces étudiants n'ont pas mauvais fond, mais le problème, c'est ce qu'il se passe sur les réseaux sociaux. Là, il y a effectivement cette tentation de la radicalité", où il faut affirmer le plus de "choses fortes, mais où l'on perd quelque chose du débat", regrette-t-il. "Ce sont quand même des jeunes qui ont 19-20 ans et c'est vrai qu'il y a, je crois, cette tentation de rejoindre un mouvement global, mondial, même si limité à quelques universités", comme le campus de Columbia à New York ou d'UCLA en Californie, théâtres de mouvements étudiants américains ces derniers jours, analyse le professeur. 

"Je pense qu'ils ont le sentiment qu'ils peuvent peser sur la France ou sur les États-Unis. Et je leur ai dit : 'Mais vous savez, vous pouvez peser également sur Israël'."

Denis Charbit, professeur de sciences politiques

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"On est une opinion ouverte, mais à une condition, c'est de nous respecter et de nous donner le sentiment que nous existons". Il cite l'exemple de certains slogans utilisés par les manifestants en soutien à la Palestine comme "From the river to the sea, Palestine will be free", qui signifie "du fleuve [Jourdain] à la mer, la Palestine sera libre". Pour le professeur, "ça veut dire que l'État d'Israël n'existe plus", et "très souvent, j'ai le sentiment qu'Israël n'existe plus, pour eux". Il a donc tenu à rappeler aux étudiants "qu'Israël existe, qu'on oublie qu'il y a une opinion, et vous ne vous adressez jamais à elle, c'est dommage". 

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