Victoire de Donald Trump : "Il y a une vraie inquiétude" pour l'Ukraine, réagit Camille Grand, ancien secrétaire général adjoint de l'Otan
La victoire de Donald Trump à la présidentielle aux États-Unis suscite "une vraie inquiétude" pour l'Ukraine, réagit jeudi 7 novembre, Camille Grand, chercheur, spécialiste des questions de défense au Conseil européen pour les relations internationales (ECFR) et ancien secrétaire général adjoint de l'Otan.
Il rappelle que le Parti républicain, celui de Donald Trump, "n'a pas brillé par son soutien à l'Ukraine" en bloquant notamment pendant plusieurs mois l'aide à l'Ukraine. Néanmoins, "l'assistance militaire américaine reste extrêmement importante. Quelque 60 milliards de dollars ont été donnés à l'Ukraine depuis le début du conflit, soit plus de la moitié de l'assistance militaire", souligne Camille Grand.
L'enjeu est maintenant de savoir si les États-Unis continueront de soutenir l'Ukraine et dans quelle mesure. Ces derniers mois, Donald Trump, n'a cessé de marteler qu'il était capable d'imposer une paix en Ukraine "en moins de 24 heures", sans jamais expliquer comment. Camille Grand estime que résoudre le conflit dans ce délai revient "en réalité à céder aux demandes de Vladimir Poutine". Le magnat de 78 ans "s'est beaucoup engagé pendant la campagne sur cette idée d'une paix négociée très rapidement, d'un compromis qui serait imposé en quelque sorte aux Ukrainiens, mais aussi aux Européens", ajoute le chercheur.
Donald Trump reste imprévisible
Toutefois, l'incertitude règne. S'il promet de mettre fin à la guerre en Ukraine, Donald Trump reste flou sur la question. Camille Grand ne sous-estime pas non plus son caractère imprévisible. "La réalité des choses, c'est qu'on ne sait pas bien comment il va jouer cette proposition de 'deal' [accord] pour utiliser ses mots". Le 47e président des États-Unis pourra aussi se montrer ferme face à son homologue russe Vladimir Poutine. Cette spécialiste n'exclut pas cette hypothèse.
Par conséquent, "les Européens doivent vraiment faire passer des messages très clairs sur leurs attentes en particulier sur le conflit ukrainien", estime Camille Grand. Donald Trump prendra ses fonctions le 20 janvier, après avoir prêté serment. "La période de transition est toujours un peu chaotique aux États-Unis : l'ancienne administration conserve beaucoup de pouvoirs, mais le président élu a déjà des contacts diplomatiques", souligne l'ancien secrétaire général adjoint de l'Otan. "C'est un moment très critique en ce moment où des initiatives diplomatiques peuvent être prises par Donald Trump."
Après sa victoire électorale, Donald Trump s'est entretenu avec le président ukrainien, Volodymyr Zelensky. Ce dernier salue un "excellent" échange. "Nous sommes convenus d'entretenir le dialogue et de faire progresser notre coopération. Un pouvoir fort et déterminé aux États-Unis est vital pour le monde et pour une paix juste", écrit le président de l'Ukraine sur le réseau social X.
"Les États-Unis vont être moins impliqués dans la sécurité européenne, leur priorité, c'est la Chine et l'Indo-Pacifique, parce qu'ils ont des ressources qui sont limitées et parce qu'ils ont un débat intérieur qui ne les incite pas à investir dans la sécurité européenne."
Camille Grand, chercheur, spécialiste des questions de défense au Conseil européen pour les relations internationalesà franceinfo
Selon l'ancien secrétaire général adjoint de l'Otan, c'est la "tendance de fond". Une victoire de la candidate démocrate, Kamala Harris, aurait aussi "imposé à l'Europe de prendre davantage en charge sa sécurité, de préférence dans une alliance avec les États-Unis".
Camille Grand s'interroge sur la capacité des 27 pays membres de l'Union européenne "à se coordonner", "à avoir un message commun sur l'Ukraine, sur leurs efforts en matière de défense". Les dirigeants européens se retrouvent jeudi 7 novembre au soir à Budapest. La Hongrie assure actuellement la présidence tournante de l'Union européenne. Le Premier ministre nationaliste hongrois Viktor Orban, qui soutient Donald Trump et affiche des positions pro-russes, accueillera également Volodymyr Zelensky.
Pour ce spécialiste des questions de défense au Conseil européen pour les relations internationales, les Européens devront aussi rapidement "envoyer des signaux plus clairs" aux États-Unis pour notamment rassurer "cette partie de l'opinion américaine" sceptique, en montrant que l'Union européenne "prend vraiment en charge la sécurité de l'Europe" et qu'elle "ne voit pas les États-Unis comme la garantie ultime de la sécurité à l'échelle globale". Camille Grand souligne que les pays européens "dépensent beaucoup plus d'argent qu'à l'époque où Donald Trump était président pour la première fois".
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