Irlande du Nord : Michelle O'Neill, Première ministre favorable à l'unification, devra partager le pouvoir avec une unioniste
Après deux ans sans parlement ni gouvernement, une femme a pris, samedi 3 février, les rênes de l'Irlande du Nord. Son nom : Michelle O'Neill, 47 ans, signe particulier : elle est républicaine et membre du Sinn Féin. C'est la première fois que ce poste de chef de gouvernement est occupé par un représentant de ce parti, depuis les accords de paix du "Vendredi saint" qui, en 1998, ont mis fin à la guerre civile.
Le Sinn Féin est l'ancienne vitrine politique de l'IRA. C'est un parti nationaliste qui milite donc pour l'unification de l'Irlande. Il est arrivé en tête des dernières législatives, en 2022, mais Michelle O'Neill n'a pas pris son poste plus tôt en raison d'un blocage politique. L'autre grande formation politique nord-irlandaise, le Democratic Unionist Party (DUP), attachée au maintien de la province dans le giron britannique, s'était néanmoins retourné contre Londres et avait décidé de boycotter les institutions. En fait, elle n'acceptait pas l'arrangement imposé par le Royaume-Uni après le Brexit, ce fameux casse-tête du protocole nord-irlandais pour éviter le retour d'une frontière physique avec l'autre Irlande, membre de l'UE.
Résolution du boycott lié au Brexit
Mais un nouveau texte a été validé la semaine dernière, qui satisfait tout le monde, et le boycott a été levé. Les formalités administratives sur le transport de marchandises vont être allégées, Londres va débloquer son enveloppe de près de quatre milliards d'euros pour les services publics et les institutions vont enfin pouvoir redémarrer.
Michelle O'Neill se retrouve à la tête du gouvernement, mais elle ne sera pas la seule à gouverner. Comme le veut le partage du pouvoir, qui est ancré dans la Constitution, elle va codiriger avec une vice-Première ministre du camp d'en face, Emma Little-Pengely, unioniste, protestante et membre du DUP.
Les deux femmes héritent d'un très lourd passif familial. Le père d'Emma Little-Pengely a été arrêté en France dans les années 80, alors qu'il tentait de se procurer des armes pour les paramilitaires loyalistes. Celui de Michelle O'Neill a fait de la prison pour ses liens avec l'armée républicaine irlandaise et l'un de ses cousins est mort en héros, alors qu'il s'apprêtait à assassiner un membre des forces de sécurité britanniques.
Un référendum sur l'unification ?
Un tel duo à la tête de l'exécutif nord-irlandais paraissait inenvisageable mais les deux femmes se sont engagées à surmonter leurs différences et à travailler ensemble, notamment sur les questions économiques. Michelle O'Neill ne renonce pas pour autant à ses convictions politiques. Elle estime que l'Irlande est entrée "dans une décennie décisive". Londres ne voit pas ça d'un très bon œil mais, interrogée sur Sky news dimanche, elle a évoqué l'idée d'un référendum sur l'unification dans les dix ans.
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