Le rendez-vous de la médiatrice. Le traitement éditorial sur franceinfo des faits divers
Cette semaine, les auditeurs et internautes de franceinfo nous demandent pourquoi certains éléments ne sont pas divulgués sur le profil d'un suspect.
Le rendez-vous de la médiatrice, c’est le moment d’écouter ce que les auditeurs et internautes ont à nous dire. Aujourd'hui avec Emmanuelle Daviet, la médiatrice des antennes de Radio France et Matthieu Mondoloni, directeur adjoint de la rédaction de franceinfo, nous nous intéressons au traitement de certains fait divers et notamment des éléments de profil que l’on donne ou pas à l’antenne sur un agresseur.
Emmanuelle Daviet, médiatrice des antennes de Radio France : Voici le message d’un auditeur : "Les noms et le portrait de ceux qui ont tué ou blessé des policiers à Avignon, à Rambouillet, près de Nantes restent toujours inconnus alors que, lorsqu’il s’agit d’un Français de souche, son nom, son prénom et son portrait sont largement diffusés comme celui de Valentin Marcone, tueur des Cévennes". Et puis on peut également ajouter Terry Dupin qui a tiré sur les gendarmes en Dordogne.
Pourquoi le nom d’un forcené n’est-il pas systématiquement donné à l’antenne ? Pourquoi dans certains cas le nom d’un assassin est passé sous silence comme s’il s’agissait d’éviter une forme de stigmatisation ?
Matthieu Mondoloni : Alors que ce n’est pas vrai. On n’a pas une règle précise sur le fait de divulguer ou non le nom d’une personne qui a commis une agression, un meurtre, etc. On va distinguer le terrorisme du reste des affaires. Dans l’affaire de Terry Dupin ou de Valentin Marcone, si les noms sont donnés, c’est tout simplement parce que les forces de l’ordre, les gendarmes en l’occurrence, décident de lancer un avis de recherche et donc sollicitent les médias parce qu’ils ont besoin, pour leur enquête, de donner ce nom et de pouvoir localiser cette personne, encore une fois pour pouvoir l’arrêter après les agissements présumés qu’ils ont pu commettre.
Pour les faits de terrorisme, c’est différent. Là non plus, on n’a pas une règle précise, mais on a une charte qu’on peut retrouver d’ailleurs sur le site de franceinfo.fr. On fait toujours très attention parce qu’il s’agit de protéger, un tout simplement les victimes, et deux aussi le secret de l’instruction et l’enquête qui peut être en cours. C’est-à-dire que les forces de l’ordre, quand elles travaillent à la recherche d’un suspect ou d’un auteur présumé de faits terroristes, ils ont besoin de temps. Et le risque en divulguant l’identité d’une personne, c’est que ça lui profite éventuellement dans sa fuite ou que ça nuise au reste de l’enquête.
On poursuit avec l’agression raciste à Cergy-Pontoise, je vous lis le message d’un auditeur qui reflète bien ce que nous avons reçu cette semaine : "Je suis choqué par l’agression dont a été victime un livreur à Cergy. Je suis encore plus choqué de la manière dont vous relatez l’événement. En faisant la rétention de l’origine de l’agresseur, vous donnez l’impression d’une information orientée. C’est néfaste pour la crédibilité du journalisme".
Matthieu Mondoloni : En fait, ce qui nous semble important dans ce cas là, c’est plutôt les faits. Les faits, en l’occurrence, c’est une agression raciste avec des propos racistes qui sont tenus. Et dans le fait de donner cette information, ce n’est pas l’origine de l’agresseur qui est importante à nos yeux, mais l’origine de l’agressé. En gros, nous n’aurions pas dit non plus une personne blanche a agressé une personne noire ou une personne asiatique a agressé une personne maghrébine. En revanche, ce qui nous semble important, c’est qu’effectivement, une personne noire a pu être victime d’actes racistes. Donc on s’en tient à des faits.
Il ne s’agit pas de dissimuler quoi que ce soit, mais de rendre l’information la plus objective possible. En l’occurrence, une personne a été victime de faits racistes.
Emmanuelle Daviet : On termine par une question qui est revenue régulièrement dans le courrier cette semaine également. La voici : "Une procession de 300 catholiques a été agressée à Paris samedi dernier par des militants d’extrême gauche. Pourquoi n’en avez-vous pas parlé ?"
Matthieu Mondoloni : La première raison, c’est que l’ensemble des journalistes, et ils sont moins nombreux le week-end, étaient mobilisés sur la traque qui se déroulait en Dordogne. Toute la rédaction était vraiment mobilisée autour de ce fait divers. La deuxième raison, c’est qu’il y a plus de 2 000 manifestations dites revendicatives par les forces de l’ordre juste à Paris chaque année et qu’évidemment, nous n’avons pas les moyens, malheureusement, de les suivre dans leur intégralité.
Certaines ne méritent pas notre attention, d’ailleurs, parce qu’elles sont très, très petites, minimes. Il n’y a pas beaucoup de participants. Là, en l’occurrence, il y a eu effectivement un blessé, selon les organisateurs. Ça ne nous a pas semblé utile d’y revenir le lundi, mais on était déjà deux jours après et pour nous, c’était plus compliqué. L’actualité avait commencé à avancer et notamment avec cette agression raciste à Cergy, dont nous avons choisi de traiter l’information.
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