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L'Europe a-t-elle besoin d'accueillir 50 millions d’étrangers pour maintenir sa population active, comme l'affirme Jean-Paul Delevoye ?

Le haut commissaire aux retraites Jean Paul Delevoye évoque un document de l’ONU datant de 2000 et qu’il a mal interprété, lors d’un échange avec des jeunes à Créteil (Val-de-Marne).

Article rédigé par franceinfo - Alix Coutures
Radio France
Publié Mis à jour
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Jean-Paul Delevoye, haut-commissaire aux retraites, était l'invité du "8h30 franceinfo", mercredi 20 novembre 2019. (FRANCEINFO / RADIOFRANCE)

Le chiffre a été lancé par Jean-Paul Delevoye en marge d'une rencontre avec des jeunes de Créteil sur la réforme des retraites, vendredi 29 novembre. D'après le haut-commissaire aux retraites, le sujet de l'immigration est devenu tabou dans le débat public alors qu'il faudrait "50 millions de population 'entre guillemets' étrangère pour équilibrer la population active en 2050, en Europe". La cellule Vrai du Faux vous explique d'où vient ce chiffre et pourquoi cette déclaration est contestable. 

Un chiffre issu d'un document vieux de vingt ans

Le haut commissaire s’appuie sur un rapport de l’ONU publié en l'an 2000. A l'époque, la division de la population du Département des affaires économiques et sociales s'interroge sur le fait de savoir si la "migration de remplacement" peut être d'ici 2050 une "solution pour les populations en déclin" en raison "de faibles taux de fécondité et de mortalité".

Pour répondre à la question, les auteurs de l’étude envisagent six scénarios pour pallier les risques liés au vieillissement de la population dans huit pays et zones géographiques, dont la France et l'Union européenne. Chaque scénario vise un objectif migratoire à remplir d'ici 2050 par rapport à 1995 : garder une population active constante, une population constante ou un équilibre entre les générations.

Population active ou totale : la confusion de Jean-Paul Delevoye

On retrouve le chiffre de "50 millions d’étrangers" cité par Jean-Paul Delevoye dans les travaux de l'ONU. Mais il figure dans le scénario qui envisage une compensation pour la population totale, et pas uniquement la population active. Plus précisément, le rapport estimait en l'an 2000 qu'il faudrait accueillir 47,4 millions d'immigrés dans l'Union européenne pour équilibrer la population totale  d’ici 2050. 

Et pour la population active ? Le scénario élaboré par l'ONU est beaucoup plus ambitieux. Pour conserver son ratio de 1995, l’Union européenne devrait accueillir 701 millions de migrants, dont 94 millions en France, 188 millions en Allemagne, 59 millions au Royaume-Uni et 120 millions en Italie. 

Des hypothèses et pas des préconisations

C'est l'autre problème de la déclaration de Jean-Paul Delevoye : il s'appuie sur ce qui est, d'après les auteurs du rapport eux-mêmes, un scénario "irréaliste". "Ces chiffres sont évidemment tout à fait irréalistes, et ce scénario est la preuve par l'absurde que l'immigration ne peut en aucun cas éviter le vieillissement de la population", expliquait ainsi le démographe français Joseph-Alfred Grinblat en décembre 2003 dans la revue Esprit.  

Cela n'empêche pas les politiques de s’y référer régulièrement. Guillaume Larrivé a notamment cité "l’immigration de remplacement" de l’ONU en août 2018, tandis que Marine Le Pen s’en est servi en juin 2018 pour défendre l’idée d’une Europe "immigrationniste". 

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