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Vrai ou faux
La rémunération du PDG de Carrefour a-t-elle dépassé les 9 millions d'euros en 2022 ?
La rémunération du PDG de Carrefour, Alexandre Bompard, passe de plus en plus mal auprès des actionnaires du groupe comme des syndicats. En mai 2023, elle a été adoptée en assemblée générale mais 40% des actionnaires ont voté contre. La CGT dénonce une rémunération "inacceptable, voire indécente", alors que le syndicat déplore le piètre bilan social du groupe. Elle évaluait cette rémunération à plus de 9 millions d'euros.
Trois mois plus tard, le sujet est revenu dans le 8h30 de franceinfo, mardi 29 août, alors qu'Alexandre Bompard en était l'invité. "Lors de la dernière assemblée générale, c'est votre salaire qui a été dénoncé par les syndicats et par une grosse partie des actionnaires. Plus de 9 millions d'euros selon la CGT. Est-ce que vous pensez que vous les méritez ?", demande la journaliste Salhia Brakhlia. "Ce n'est pas le bon chiffre", répond le PDG, sans en donner un autre. Qu'en est-il vraiment ?
Une rémunération globale estimée à 9,2 millions d'euros
C'est un sujet complexe car d'un côté l'estimation de la CGT est vraie en théorie, mais en pratique, quand Alexandre Bompard assure que ce n'est pas le bon chiffre, autrement dit qu'il n'a pas perçu 9 millions d'euros, c'est vrai aussi.
Le chiffre donné par la CGT peut être retrouvé dans le document d'enregistrement universel – ou rapport annuel – de Carrefour en 2022. La rémunération du PDG du groupe se divise en plusieurs parties. Il y a d'abord une partie fixe d'un montant d'1,5 million d'euros. C'est le salaire de base qui lui est versé chaque année, sans aucune condition.
S'y ajoute une partie variable si le PDG rempli des objectifs. Elle est versée après la fin de l'année en cours et uniquement si elle a été votée en assemblée générale, ce qui est le cas. Cette partie variable s'élève en 2022 à 190% de sa rémunération fixe, soit 2,8 millions d'euros. S'y ajoutent encore 75 000 euros pour son mandat d'administrateur. A ce jour, après le vote en assemblée générale, Alexandre Bompard a donc perçu 4,4 millions d'euros. Le rapport compte également des avantages en nature – véhicule de fonction et assurance volontaire perte d'emploi – équivalents à 9 052 euros.
Mais il faut encore ajouter un cinquième type de rémunération : le plan long terme en actions. Selon le cabinet Proxinvest, spécialisé dans l'analyse financière et dans la lecture des rapports annuels d'entreprise, il est estimé à 4,8 millions d'euros. Si on l'additionne aux autres types de rémunération, cela revient donc à une rémunération totale estimée à 9,2 millions d'euros, ce qui semble donner raison à la CGT. Néanmoins, Alexandre Bompard n'a pas concrètement perçu ces 4,8 millions d'euros.
Quelque 4,8 millions d'euros en actions
En fait, le plan long terme n'est pas versé en euros sur son compte mais en actions, sous conditions, et cela peut changer beaucoup de choses. Contacté par franceinfo, le cabinet Proxinvest explique que "le dirigeant ne recevra ces actions que s'il remplit les conditions de performance et de présence au 16 février 2025. Donc le montant communiqué n'est qu'une estimation de ce que pourraient valoir ces actions en 2025 si Alexandre Bompard est toujours présent dans la société et s'il a rempli à 100% ses conditions de performance".
Par ailleurs, "selon les variations du cours de bourse, ces actions pourraient valoir beaucoup plus en 2025. Mais elles pourraient également valoir beaucoup moins", précise le cabinet. Mais cette valeur restera de toute façon théorique puisque ce sont des actions. Tant que le PDG ne les vend pas – à ce prix-là ou à un autre –, il ne perçoit pas concrètement de sommes d'argent.
En résumé, on ne peut donc pas dire que le PDG de Carrefour a perçu plus de 9 millions d'euros au titre de l'année 2022, puisqu'une partie ne lui sera versée qu'en actions et qu'en 2025 sous conditions, mais c'est tout de même en effet la valeur totale estimée de tous ses types de rémunération cumulés, selon le rapport annuel du groupe.
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