Brésil : un an après les émeutes du 8 janvier, la société est toujours divisée

Début 2023, l’attaque de la Place des Trois Pouvoirs à Brasilia, par des militants de l’ancien président Bolsonaro a fait trembler la démocratie brésilienne. La date anniversaire approche et le pays reste fortement polarisé.
Article rédigé par Olivier Poujade
Radio France
Publié
Temps de lecture : 4min
Des partisans de l'ancien président brésilien, Jair Bolsonaro, envahissent le palais présidentiel, à Brasilia le 8 janvier 2023. (TON MOLINA / AFP)

On évoque très souvent l’invasion du Capitole aux États-Unis et plus rarement l'insurrection sur la place des Trois pouvoirs de Brasilia, pourtant le 8 janvier 2023 a ébranlé le Brésil. Des institutions en grande partie détruites pour contester le retour à la présidence de Lula quelques jours après son investiture. La date anniversaire de ce coup de force approche et les renseignements brésiliens sont inquiets. Ils prennent notamment très au sérieux une menace publiée pendant les fêtes à l’encontre du président Lula. Une menace de mort émanant d’un faux compte, encourageant à "récolter des fonds et engager un mercenaire avec un fusil de haute précision". Ce message a été largement relayé sur les réseaux, tout comme des contenus insultants, à caractère pornographique, ayant visé la première dame du Brésil.

Dernière source d’inquiétude, les services de renseignement ont identifié des forums de groupes d’extrême droite dont le sujet de discussion porte sur l’organisation d’actes de contestation, à l’approche de la date du 8 janvier. Étant donné les forces de sécurité mobilisées lundi prochain, il y a peu de chances pour que l’on assiste à de nouvelles attaques des institutions à Brasilia. Mais des manifestations sont attendues dans d’autres grandes villes brésiliennes.

Cette date du 8 janvier cristallise cette polarisation du débat public et de la population. Elle est devenue un fait d’armes pour les partisans de Bolsonaro qui sont parvenus à faire vaciller la démocratie brésilienne. C'est aussi un moment historique pour le reste de la population brésilienne car cette démocratie a justement su résister à ces attaques. C’est pour cette raison que Lula veut marquer le coup. Il organisera lundi une cérémonie avec plus 500 élus, chefs d’entreprise, gouverneurs, la marche de la "Démocratie inébranlable", à laquelle participera Ricardo Capelli numéro deux du ministère de la Justice. "Cette cérémonie du président Lula est destinée à consolider, à défendre la démocratie et les institutions démocratiques. C’est une célébration démocratique", explique ce dernier.

2 000 personnes placées en détention en 2023

La lecture est totalement inversée de la part des opposants à Lula. Et ils sont nombreux au sein du Congrès. "Ce pourrait être une grande occasion pour soigner les blessures d’un pays si polarisé. Mais ce n’est pas l’objectif du gouvernement. Il veut renforcer cette polarisation. Le seul fait de commémorer cette date est une provocation et non une tentative de construire les ponts dont le Brésil a besoin", explique l’ancien candidat ultralibéral à la présidentielle, Felipe D’Avila, qui fait partie des opposants.

Réunifier le pays est pourtant l’un des objectifs de Lula. Mais ces liens seront très compliqués à retisser et c’est là que l’on voit les ravages profonds des attaques de l’an dernier. Car pour l’immense majorité des nostalgiques du 8 janvier 2023, la démocratie n’est pas la solution. L’enquête gigantesque de la Cour suprême démontre que les attaques étaient destinées à créer un chaos social pour permettre à l’armée de prendre le pouvoir. Plus de 2 000 personnes ont été placées en détention depuis un an : 400 perquisitions, 61 personnes inculpées, cinq anciens ministres et six des anciens assistants de Jair Bolsonaro sont visés par la Justice. Tous les chemins mènent à l’ancien président brésilien, seule figure politique encore capable aujourd’hui de faire le poids face à Lula.

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