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De grands bijoutiers soupçonnés de financer la junte en Birmanie via des achats de rubis

De célèbres joailliers internationaux financent indirectement la dictature militaire en Birmanie : c’est l’accusation lancée par l’ONG Global Witness.

Article rédigé par franceinfo
Radio France
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Des mineurs travaille dans une mine du Mogok, le 24 novembre 2016. (YE AUNG THU / AFP)

Le rapport de Global Witness, publié mercredi 15 décembre, est long de soixante-dix pages et il est très étayé. L’ONG britannique a enquêté à la frontière de la Birmanie, ce pays d’Asie du Sud-Est de 54 millions d’habitants, tenu par les militaires depuis un coup d’Etat en février dernier. Le rapport raconte comment l’exploitation des pierres précieuses, les rubis, les jades, principale richesse du pays, a redémarré depuis le putsch.

Officiellement, il n’y a plus aucune extraction depuis plus d’un an, et les mines sont fermées. Mais en réalité, si l’on en croit les nombreux témoignages recueillis par l’ONG, des dizaines de milliers de personnes ont été autorisées à reprendre l’extraction. En particulier dans la région de Mogok, au centre du pays, qui concentre 90% des ressources en pierres précieuses. La zone avait été surnommée "la vallée des rubis" par le romancier Joseph Kessel, c’était le titre de l’un de ces livres. Ces personnes travaillent individuellement, dans des conditions très précaires, et se voient contraintes de verser aux militaires une bonne partie de leurs revenus. Appelons cela des impôts ou des pots de vin, mais cela revient au même : cela veut dire qu’au bout du compte, l’argent de l’exploitation va dans la poche de la dictature militaire et particulièrement de son chef, le général Aung Ming Hlaing, dont la famille contrôle d’ailleurs les grands conglomérats miniers du pays.  

Bulgari et Van Cleef and Arpels sur la sellette

Le rapport montre du doigt certains grands joailliers, notamment Pragnell, une firme britannique, Van Cleef and Arpels, filiale du suisse Richemont, et Bulgari, propriété du français LVMH. L’ONG les soupçonne de continuer à s’approvisionner en rubis sur le marché birman et donc de financer la dictature, même si encore une fois officiellement, il n’y a plus marché puisque les mines sont censées être fermées. C’est un vieux sujet : les liens des joailliers et bijoutiers internationaux avec le régime birman sont dénoncés depuis longtemps. La controverse avait baissé d’intensité quand la Birmanie a connu un apaisement démocratique, elle a repris depuis le coup d’Etat militaire. Global Witness affirme avoir sollicité les trente plus grands joailliers mondiaux. Et six d’entre eux seulement (comme Tiffanys ou Cartier) affirment avoir pris des dispositions strictes pour ne plus se fournir en Birmanie même indirectement. Tous les autres, dit le rapport, ne donnent pas de garanties sur un système de contrôle adéquat de la provenance des pierres. La défense habituelle de ces grandes firmes est de dire que l’origine exacte des pierres et leur date précise d’extraction sont impossibles à démontrer, tant elles passent entre les mains de nombreux intermédiaires.     

Le premier producteur de rubis au monde

Il faut dire qu’il est tentant pour les joailliers de se fournir en Birmanie: c’est le premier producteur au monde de pierres précieuses, rubis et jade, mais aussi saphirs ou diamants. Pour les rubis, le seul vrai concurrent de la Birmanie est le Mozambique en Afrique. La ressource pour le pouvoir birman est évaluée entre 350 et 415 millions d’euros. L’ONG britannique appelle donc à un boycott international total des pierres en provenance de Birmanie. En tout cas, à titre individuel, si vous avez les moyens d’offrir un bijou à Noël, il faut peut-être s’interroger sur l’origine des pierres.  

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