L'Union européenne va strictement réglementer les géants du numérique
Le sommet européen de Bruxelles ne s'est pas concentré seulement sur la guerre en Ukraine et ses conséquences. Il a aussi vu l’annonce d’une législation très novatrice pour mettre fin à certaines pratiques des Gafam, les grandes entreprises du numérique.
C'est un texte important parce qu'il va avoir un impact sur nos vies quotidiennes, un peu comme l'ouverture du rail à la concurrence. Il a fallu un an et demi de négociations pour que ce texte voit le jour. Google, Apple, Facebook Meta, Amazon, Microsoft n'en voulaient pas, parce que ce texte baptisé DMA, pour Digital Markets Act, encadre strictement les activités de ces géants en fixant de nouvelles règles du jeu. C'est sans précédent dans le monde.
Together with strong competition enforcement our #DMA regulation means competitive digital markets for consumers and businesses. Large gatekeepers must comply with well-defined things to do - and things they can not do.
— Margrethe Vestager (@vestager) March 25, 2022
So happy with this agreement:
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C'est sans doute l'un des actes de régulation économique du marché les plus significatifs des 30 dernières années. Et c'était l'une des priorités affichées de la présidence française du Conseil de l'Union Européenne. Le DMA doit encore être ratifié par les 27 pays européens mais ce sera sans doute une formalité : tout le monde est d'accord.
La philosophie générale est la suivante : les géants du numérique doivent cesser de faire leurs petites affaires entre eux, de bloquer les consommateurs dans un marché captif, et de porter atteinte à la concurrence. Il s'agit finalement de donner plus de choix et de liberté au public, un peu comme en matière de banques, d'énergie, d'opérateurs téléphoniques ou de transports. Toutes les entreprises dont la valeur marchande dépasse les 75 milliards d'euros seront concernées. Donc ça peut également toucher des firmes comme TikTok ou la centrale de réservation Booking.
Un impact concret pour les consommateurs
Ce texte concerne tous les consommateurs. Par exemple, si vous avez un iPhone ou un iPad et que vous voulez télécharger une application, aujourd'hui vous devez le faire par l'AppStore, le système d'Apple. Demain c'est fini, fin du marché captif.
Autre exemple : vous voulez communiquer par le réseau WhatsApp, propriété de Meta (Facebook). Aujourd'hui, vous ne pouvez échanger qu'avec des personnes inscrites aussi sur WhatsApp. Demain, l'interface devra pouvoir s'opérer avec d'autres réseaux de messagerie, Signal, Telegram.
Enfin, vous ne pourrez plus recevoir sans votre consentement des publicités ciblées, via Google ou Facebook. Et ces géants ne pourront plus utiliser les données générées sur leur site par des entreprises clientes pour mieux les concurrencer. Exemple : vous allez sur le site d'Amazon, vous cherchez un ventilateur. Vous avez plusieurs propositions de marques tierces. À la connexion suivante, Amazon vous propose son propre ventilateur Amazon. Ce qui va être encadré. Le principe : cesser de fausser la concurrence. Et le texte prévoit des sanctions énormes en cas d'infraction : jusqu'à 10%, voire 20% des ventes mondiales de l'entreprise concernée.
Lobbying intense et contentieux à prévoir
Les Gafam ont tout fait pour empêcher cette législation avec un lobbying intense à Bruxelles pendant un an et demi. Apple affirme que ça va poser des problèmes de sécurité. Google ajoute que ça va limiter l'innovation. D'autres affirment que c'est un texte anti-américain qui va fait perdre des emplois aux États-Unis.
La crainte de tous ces géants, c'est surtout que d'autres pays emboîtent le pas à l'Union européenne et que ce type de régulation ne devienne la règle. Il faut donc s'attendre, dans les premiers temps, à beaucoup de contentieux commerciaux et à des recours juridiques en pagaille.
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