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Opération d'un bébé in utero : "C'est un espoir qui n'existait pas jusque-là pour ces formes graves" de malformation, explique l'un des artisans de cette première médicale

Yves Ville, chef du service obstétrique à l'hôpital Necker, a participé à l'opération in utero d'un bébé atteint d'une malformation grave. Il raconte à franceinfo, ce vendredi, le succès de cette première mondiale.
Article rédigé par franceinfo
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Hôpital Necker, Paris, avril 2023. (MAGALI COHEN / HANS LUCAS)

C'est un enfant, né le 16 octobre 2022, atteint d'une malformation anévrismale de la veine de Galien, que le chef du service obstétrique à l'hôpital Necker a opéré in utero, cinq semaines avant sa naissance. "C'est un espoir qui n'existait pas jusque-là pour ces formes graves" de malformation a déclaré Yves Ville.

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Franceinfo : Comment s'est passée cette opération ?

Yves Ville : C'est la première. D'habitude, c'est une opération qui est faite après la naissance, mais les enfants qui en bénéficient sont souvent en très mauvais état ; en particulier leur cerveau et leur fonction cardiaque. Nous avons réalisé cette opération in utero, nous avons eu un abord direct [une voie d'abord est une voie d'accès chirurgical à un organe ou à une région anatomique donnée] de cette malformation vasculaire qui prive le cerveau de sang et donc d'oxygène et qui occasionne une surcharge cardiaque, souvent insupportable par le fœtus ou le nouveau-né. Nous avons réduit considérablement la taille de cette malformation vasculaire et ce petit a été stabilisé et a pu attendre cinq semaines dans le ventre de sa mère pour naître à terme. Aujourd'hui, à 8 mois, il est guéri.

Quel moment était délicat ?

La technique n'était pas compliquée, mais cette tumeur est enfouie en plein milieu du cerveau donc ce qui était délicat, était de calculer la longueur des filaments de platine qu'il allait falloir rentrer dans cette tumeur pour la ralentir sans l'obstruer. Pour cela, nous avons eu une collaboration avec Harvard qui réfléchissait au même problème.

Qu'est-ce qui vous a poussé à tenter cette opération ?

Depuis des années, cette malformation est bien connue, mais rare puisqu'elle concerne une grossesse sur 50 000. Quand cette malformation s'emballe, nous ne pouvons rien faire. Jusque-là, il n'y avait rien qui puisse être tenté. Nous avions la crainte qu'un abord direct par une aiguille in utero cause une hémorragie cérébrale massive. Mais en réfléchissant au matériel et à la technique, je pense que nous avons trouvé une voie qui permette de le faire dans de bonnes conditions et qui offre un espoir qui n'existait pas jusque-là pour ces formes graves.

Qu'ont dit les parents face au risque ?

Le risque de la malformation était de mourir ou d'avoir des séquelles très graves dans 90% des cas. Quant aux risques de l'intervention, nous pouvions les expliquer, notamment celui de l'hémorragie de cette tumeur. Étant donné les risques à ne rien faire, la famille a pris cette décision courageuse.

Cela ouvre une voie d'abord de ces malformations vasculaires qui jusque-là était impossible. C'est un message d'espoir pour des situations qui nous frustrent et qui sont le drame des parents depuis des années.

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