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Dépakine : "Pour la première fois, l'inertie des autorités de santé a été reconnue"

Francetv info s'est entretenu avec la présidente d'une association qui lutte depuis cinq ans pour la reconnaissance du lien entre des cas de malformations congénitales et la prise de cet antiépileptique pendant la grossesse. 

Article rédigé par Kocila Makdeche - Propos recueillis par
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
La Dépakine aurait été prescrite à plus de 10 000 femmes enceintes entre 2007 et 2014, affirme "Le Canard enchaîné" dans son édition du 10 août 2016. (MAXPPP)

"Entre 425 et 450." Ce sont le nombre d'enfants nés avec des malformations congénitales dues à la prise de Dépakine par des femmes pendant leur grossesse, selon une estimation de l'Inspection générale des affaires sociales (Igas).

Le rapport, rendu public mardi 23 février, pointe du doigt le lien entre la prise de la molécule antiépileptique valprate (dont Dépakine est la version commercialisée par le laboratoire Sanofi) et ces malformations. Marine Martin, dont les deux enfants sont eux-mêmes handicapés, a créé une association, l'Apesacpour venir en aide à ces familles. Francetv info a recueilli sa réaction après la publication du rapport.

Francetv info : Comment avez-vous accueilli ce rapport de l'Igas ?

Marine Martin : Il y a des choses qui sont positives. Pour la première fois, le manquement d'information de la part du laboratoire Sanofi a été reconnu, tout comme l'inertie dont ont fait preuve les autorités de santé.

Il y a cependant des points sur lesquels je ne suis pas d'accord, comme les dates retenues par ce rapport pour procéder au recensement. Seuls les troubles autistiques survenus après 2000 sont évoqués, alors que d'après les documents de pharmacovigilance dont je dispose, les premiers cas sont plus anciens.

Le rapport évoque 425 à 450 cas de malformations en France. Vous en évoquez plutôt un chiffre de 1 051. Comment expliquer cette différence ?

Le rapport de l'Igas se base sur les premières données de pharmacovigilance, mais peu de médecins ont fait remonter les liens qui existent entre la prise de Dépakine et les malformations des enfants.

Dans mon association, les données collectées ne sont pas basées sur les rapports des médecins, mais sur les témoignages des familles. Au total, 578 familles m'ont contactée, avec un, deux, trois ou parfois quatre enfants atteints.

Pour ma part, je pense que ce sont des dizaines de milliers d'enfants qui sont touchés. Nous savons, aujourd'hui, que les risques d'avoir un enfant handicapé sont de 30 à 40% pour une femme qui utilise de la Dépakine. L'épilepsie est une maladie très répandue et ce médicament est prescrit depuis cinquante ans.

Quelles sont vos attentes après la publication de ce rapport ?

D'abord qu'un réel travail de recensement des victimes soit réalisé et pour cela, j'espère pouvoir travailler avec les autorités. J'ai établi des fiches extrêmement précises et je suis en mesure de fournir les noms et les adresses de ces familles au ministère de la Santé, qui va d'ailleurs me recevoir la semaine prochaine.

A terme, je souhaite qu'un centre puisse être ouvert en France spécifiquement pour les enfants atteints par ces handicaps. Je demande aussi qu'un fonds d'indemnisation soit mis en place, comme cela a été le cas pour le Mediator. Je ne veux pas que toutes ces familles se perdent dans les procédures judiciaires qui peuvent durer des dizaines d'années.

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