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Grève aux urgences : neuf chiffres pour comprendre une crise sociale sans précédent

Plus de 250 services d'urgences sont toujours en grève, malgré les annonces du gouvernement. 

Article rédigé par franceinfo
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Une ambulance et un fourgon de pompiers devant l'entrée des urgences de Nantes (Loire-Atlantique), le 16 mars 2017. (LOIC VENANCE / AFP)

Le traitement de la ministre de la Santé n'a pas suffi pour faire tomber la fièvre sociale. Deux-cent cinquante services des urgences étaient en grève le 9 septembre 2019, jour de l'annonce du plan pour la "refondation des services d'urgences" d'Agnès Buzyn. Dès le lendemain, le collectif Inter Urgences a décidé de maintenir la grève et a appelé l'ensemble des personnels hospitaliers à se mobiliser à l'instar des médecins urgentistes qui ont rejoint le mouvement jeudi 12. Voici neuf chiffres pour comprendre une crise qui se durcit.

6 mois de grève

Le mouvement de grève a débuté à l'hôpital Saint-Antoine, dans le 12e arrondissement de Paris, le 18 mars. Le personnel des urgences décide alors de se mettre en grève illimitée après une série d'agressions depuis le début de l'année. S'ils demandent la sécurisation des locaux, ils réclament également, pour l'ensemble de leur profession, la reconnaissance de la spécificité du travail aux urgences assortie d'une prime.

252 services touchés

Le collectif Inter Urgences recense depuis le début du conflit les services hospitaliers des urgences en grève. Ils sont 252 à la date du vendredi 13 septembre, soit environ la moitié des urgences en France, selon le collectif. Partout sur le territoire, les urgentistes rejoignent le mouvement, à l'instar du service d'urgences du centre hospitalier de Martigues où l'ensemble de l'hôpital est en grève depuis le 2 juillet, tout en assurant leur mission de soigner la population.

21 millions de patients

C'est une tendance lourde observée dans tous les services des urgences. Le nombre annuel de passages progresse chaque année de 3,5% en moyenne. Au total, les structures publiques et privées ont accueilli 21 millions de patients en 2016, contre 10,1 millions en 1996, selon les données de la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees).

Evolution du nombre de passages annuels aux urgences depuis 1996. (DREES)

Cette évolution est liée à de nombreux facteurs, comme la suppression de lits dans d'autres services, allongeant ainsi l'attente des patients aux urgences avant une hospitalisation, ou le nombre insuffisant de médecins généralistes dans certaines zones.

1 300 médecins généralistes en moins

La France comptait 102 600 médecins généralistes en 2018, soit 1 300 de moins que dix ans auparavant. Cette tendance a des conséquences directes sur les urgences, dans un contexte où la population vieillit. "Il ne faut pas culpabiliser les patients qui viennent aux urgences, analyse Christophe Prud'homme, porte-parole de l'Association des médecins urgentistes de France (Amuf). Beaucoup cherchent un médecin traitant. Et quand ils en ont un, celui-ci n'est parfois pas disponible."

30 000 personnes sans lit cet été

Le syndicat Samu-Urgences de France recense le nombre de patients restés sur des brancards la nuit, faute de lit pour être hospitalisés. Résultat : au moins 29 549 personnes ont été "mal traitées" depuis le 1er juillet dernier, estime le syndicat, qui se base sur les déclarations quotidiennes de personnels des services d'urgences. "Nous ne pouvons, nous ne devons plus accepter la maltraitance des patients", justifie le Samu-Urgences de France. Et d'assurer que la surcharge des urgences est "responsable" d'une surmortalité des patients.

30 minutes ou plus pour aller aux urgences

Fin 2015, près de 4 millions de personnes habitaient à plus de 30 minutes d'un service d'urgences ou d'un service mobile d'urgence et de réanimation (Smur), selon un rapport de la Drees de 2017 consacré aux déserts médicaux. Les zones pour lesquelles les soins urgents sont les moins accessibles sont souvent situées en moyenne montagne ou dans un environnement où les déplacements sont difficiles.

Un bon maillage des urgences est pourtant vital pour les populations. La question des petites structures avait d'ailleurs interpellé les auteurs d'un rapport d'information du Sénat en 2017. "En raison de l'organisation actuelle du financement des services d'urgencesla faiblesse de leur activité entraîne des suppressions de crédits mécaniques qui remettent en question leur survie", soulignaient les élus.

Plus de 3 000 agressions

En 2017, 3 486 agressions ont été signalées dans des services d'urgences par 7,71% des établissements (3 323 atteintes aux personnes et 434 aux biens), selon l'Observatoire national des violences en milieu de santé (ONVS). Soit 16% du nombre total des faits relevés en milieu hospitalier.

Si les enquêtes menées les deux années précédentes ne portaient pas sur le même nombre d'établissements, les chiffres traduisent malgré tout une augmentation des violences, avec 2 354 agressions aux urgences signalées en 2016 (6,23% d'établissements) et 2 162 en 2015 (5,94% des établissements).

Une série d'agressions est d'ailleurs à l'origine de la grève à l'hôpital parisien de Saint-Antoine, mi-mars, avant d'essaimer dans toute la France. Les agressions, "c'est tous les jours, résumait Yann Flecher, infirmier et représentant CGT. Il faut plus de sécurité dans les services d’urgences".

100 000 lits supprimés en 20 ans

Christophe Prudhomme, porte-parole de l'Association des médecins urgentistes de France (Amuf), a dénoncé dans Le Parisien la fermeture de 100 000 lits en deux décennies : "Nous, ce qu'on veut, c'est que le président s'engage à ce qu'il n'y ait plus aucune fermeture de lits, ni de service." Même son de cloche pour le collectif Inter Urgences dans son communiqué daté du 11 septembre.

S'il est impossible d'obtenir des chiffres officiels sur la fermeture de lits de la part du ministère de la Santé, Agnès Buzyn a affirmé lors de son discours du 9 septembre que "si des fermetures de lits de médecine doivent être réinterrogées, elles le seront. Il est parfaitement concevable de créer des unités d’hospitalisation de post-urgence médicale et gériatrique, et donc de rouvrir des lits."

300 euros

Le personnel des services des urgences en grève réclame une revalorisation de leurs métiers avec l'octroi, immédiat et pour l'ensemble des personnels hospitaliers, de 300 euros net mensuels. Cette somme correspond à l'augmentation de 80 points de l'indice de la fonction publique hospitalière. 

Selon Christophe Prudhomme, porte-parole de l’Association des médecins urgentistes de France, interrogé à la mi-juin sur franceinfo, "nous avons les infirmières les plus mal payées d'Europe. Pour les mettre au niveau de la moyenne européenne, il faudrait qu'elles soient augmentées d'un minimum de 400 euros. Ne parlons pas des aides-soignantes qui sont payées une misère."

10 000 créations de postes

La CGT exige la création de 10 000 postes pour tours les personnels hospitaliers hors médecins, soit une augmentation de 25% des effectifs actuels. Ce rattrapage des effectifs à hauteur des besoins remonté service par service est incontournable, selon le collectif Inter Urgences. 

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