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Covid-19 : pourquoi les meetings électoraux sont exclus des mesures sanitaires annoncées par le gouvernement

L'exécutif a annoncé lundi la mise en place de jauges pour les grands événements culturels et sportifs, mais pas pour les meetings politiques. La raison de cette mesure qui fait grincer des dents de nombreux artistes ? Les réunions politiques sont protégées par la Constitution.

Article rédigé par Antoine Comte
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 8min
Des partisans d'Eric Zemmour pendant son premier meeting de campagne, le 5 décembre 2021 à Villepinte (Seine-Saint-Denis). (POLYVIOS ANEMOYANNIS / HANS LUCAS / AFP)

C'est un peu comme si l'histoire se répétait inlassablement depuis deux ans. Lundi 27 décembre, 19h15, c'est la douche froide pour le milieu culturel et sportif. "Pour freiner Omicron, les grands rassemblements seront limités à une jauge de 2 000 personnes maximum en intérieur, et de 5 000 personnes maximum en extérieur", a annoncé le Premier ministre Jean Castex, devant la presse et à l'issue d'un Conseil des ministres consacré à la lutte contre la reprise de l'épidémie de Covid-19 liée au variant Omicron.

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A partir du lundi 3 janvier 2022 et pour une durée de trois semaines minimum, tous les organisateurs de grands événements culturels et sportifs en France devront donc se soumettre à ces nouvelles règles. Ces mesures, très difficiles à digérer pour le milieu artistique et sportif, ne s'appliquent pas en revanche aux meetings politiques. "Les activités politiques et électorales sont soumises à des dispositions spécifiques dans notre droit constitutionnel, qui leur assurent une protection plus forte", s'est justifié le chef du gouvernement lors de cette même conférence de presse. Mais la pilule a bien du mal à passer auprès notamment du monde culturel.

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Du côté des candidats à la présidentielle, les avis divergent. Si, à gauche, la socialiste Anne Hidalgo demandait déjà des pass sanitaires et le port du masque dans ses meetings et si le candidat écologiste Yannick Jadot a annoncé qu'il ne ferait désormais que des petits rassemblements pour éviter les risques, à droite, chez Valérie Pécresse, il y a deux écoles. Certains de ses soutiens appellent à la responsabilité tandis que d'autres espèrent que la candidate LR maintiendra ses meetings. A l'extrême droite, Eric Zemmour a décidé de ne rien changer. Il souhaite continuer à organiser ses grandes réunions politiques, comme à Villepinte début décembre, avec pass sanitaires et masques recommandés. Tout comme Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon, qui ont déjà annoncé leurs prochains grands meetings.

Décision injuste et déconnectée des réalités ou condition nécessaire au bon fonctionnement de la démocratie à moins de quatre mois de l'élection présidentielle ? Franceinfo vous explique pourquoi les meetings politiques font office d'exception.

Parce que les activités politiques et électorales sont protégées par la Constitution

L'élection présidentielle des 10 et 24 avril 2022 est dans toutes les têtes et Jean Castex semblait conscient, lors de sa conférence de presse, lundi, que le sujet des jauges pour les prochains meetings politiques des candidats reviendrait sur le tapis. "L'exercice du culte d'une part et les activités politiques et électorales d'autre part sont soumis à des dispositions spécifiques dans notre droit constitutionnel qui leur assurent une protection encore plus forte"a expliqué le Premier ministre.

Pour justifier la non-limitation des jauges à 2 000 personnes en intérieur et à 5 000 personnes en extérieur dans les meetings politiques, le chef du gouvernement s'appuie sur l'article 58 de la Constitution. "Le Conseil constitutionnel veille à la régularité de l'élection du président de la République. Il examine les réclamations et proclame les résultats du scrutin", peut-on lire sur le site internet des Sages.

Parce que trois dispositions juridiques ont été prises depuis le début de la pandémie

Dès le mois de mai 2020, le Conseil constitutionnel a décidé de dispenser les organisateurs de réunions politiques de l'obligation de la présentation d'un pass sanitaire par l'ensemble de leurs participants. Cette jurisprudence établit en effet "que l'organisation des meetings ne peut être concernée par la loi d'urgence sanitaire"Une exemption confirmée ensuite le 5 août 2021 et dans le projet de loi de vigilance sanitaire du 9 novembre, rappelant que "les bureaux de vote, réunions et activités politiques procèdent de la liberté de réunion, qui est une liberté fondamentale garantie par la Constitution".

C'est donc bien au nom de "l'exercice de la démocratie", selon les mots de Jean Castex, que "cette activité fondamentale" n'est pas soumise aux mêmes restrictions que l'ensemble des autres grands événements rassemblant du public en France. "La participation de tous les citoyens à la vie politique de la Nation est l'un des principes fondateurs de notre République", avait également écrit le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin aux partis politiques en septembre dernier, rappelle Le JDD.

Parce qu'il est interdit de refuser l'entrée dans un meeting à un participant 

Exiger un pass sanitaire à l'entrée d'un théâtre ou d'un cinéma, la loi l'impose. Demander la même chose pour une réunion publique est recommandé mais pas du tout obligatoire. "La présentation du pass sanitaire ne peut être exigée pour l'accès aux bureaux de vote ou à des réunions et activités politiques", rappelle le Conseil constitutionnel. Il est donc impossible, pour les organisateurs de meetings politiques, de recaler un participant pour ce motif.

S'il le souhaite, ce dernier a même la possibilité de se pourvoir en justice contre le candidat qui réclamerait, comme conditions d'accès à son meeting, un schéma vaccinal complet, un test négatif ou une attestation de rétablissement de la maladie. Un comportement puni d'un an de prison et de 45 000 euros d'amende.

Parce qu'il n'existe pas (encore) de législation propre aux meetings politiques en temps de pandémie

Si une commission doit se réunir prochainement autour du ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin "pour nous accorder avec toutes les forces politiques sur des règles qui soient évidemment protectrices par rapport à la situation sanitaire mais qui tiennent compte de la spécificité de cette activité", selon Jean Castex, une loi peut-elle soumettre l'entrée dans un meeting politique aux mêmes conditions que celles demandées dans un lieu culturel ou sportif ? Oui, à certaines conditions, répond dans Le JDD Jean-Philippe Derosier, professeur de droit public à l'université de Lille. "Les juges n'ont jamais estimé que l'exigence d'un pass sanitaire pour pénétrer dans certains lieux recevant du public était contraire à la Constitution", explique-t-il.

Autrement dit, si l'augmentation du nombre de contaminations au Covid-19 se poursuit et si par conséquent les hôpitaux se retrouvent saturés, le législateur pourrait estimer que d'imposer le pass sanitaire dans les réunions politiques est une question de santé publique. S'il sera impossible de l'exiger dans les bureaux de vote quoi qu'il arrive, un pass valide pourrait alors, en cas de nouvelle législation, être demandé dans le cadre de "réunions dans des lieux fermés, accueillant un nombre important de personnes ou dans des zones marquées par une circulation très active du virus", se projette Jean-Philippe Derosier.

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