Michel Neyret condamné à deux ans et demi de prison ferme pour corruption
L'ancien numéro 2 de la PJ de Lyon avait été jugé en mai par le tribunal correctionnel de Paris avec huit autres prévenus.
C'est une page qui se referme pour Michel Neyret. L'ex-numéro 2 de la PJ de Lyon a été condamné à deux ans et demi de prison ferme pour corruption, mardi 5 juillet, par le tribunal correctionnel de Paris. L'ancien limier avait été jugé en mai avec huit autres prévenus pour avoir fourni des informations confidentielles à des membres du milieu lyonnais, présentés comme des "indics", en échange d'avantages, de cadeaux et d'argent liquide, et pour avoir prélevé sa dîme sur des saisies de stupéfiants afin de rétribuer des informateurs.
Cette peine est légèrement moins sévère que les réquisitions du parquet, qui avait demandé quatre ans de prison, dont deux et demi ferme. Le tribunal a estimé qu'il n'était pas nécessaire d'assortir sa condamnation d'un sursis, le risque de récidive étant nul. Le "super-flic" déchu, qui a déjà effectué huit mois de détention provisoire dans ce dossier, ne retournera pas derrière les barreaux car sa peine est aménageable. Poursuivi pour huit délits, l'ex-star de l'antigang encourait jusqu'à dix ans de prison. Il s'est dit soulagé à la sortie du tribunal. "C'est la fin d'une dure épreuve qui a marqué ma vie pendant cinq, maintenant je vais pouvoir revivre une vie différente", a-t-il déclaré devant les journalistes. Il d'ores et déjà annoncé qu'il ne ferait pas appel.
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— Catherine Fournier (@cathfournier) 5 juillet 2016
"Un électron libre" dans la police
Si la peine prononcée par le tribunal permet d'éviter à Michel Neyret un retour par la case prison, les attendus du jugement, qui soulignent la "gravité des faits reprochés", n'en sont pas moins sévères avec l'ancien policier à la carrière brillante. "Vous sembliez avoir perdu toute notion de toute limite légale" et adopté "un mode de fonctionnement où la fin justifie les moyens", a déclaré le président du tribunal au prévenu, debout, les bras croisés, la mine contrite.
Le jugement a validé en ce sens la thèse de l'accusation. A la question centrale qui a animé ce procès – l'affaire Neyret est-elle le produit d'un système révolu ou la dérive d'un seul homme ? –, les procureures Annabelle Philippe et Aude Puret, avaient apporté leur réponse, cinglante : "Ce procès n'est pas celui de la police judiciaire, mais celui de la philosophie particulière de Michel Neyret."
Les faits reprochés à Michel Neyret courent sur une courte période, allant de février à septembre 2011. Mais, selon l'accusation, ils constituent l'aboutissement d'une "méthode Neyret", celle d'un "électron libre" dans la police, fixant ses propres règles dans la gestion de ses informateurs, n'hésitant pas à "violer la loi" pour obtenir des résultats, puis pour satisfaire son "intérêt personnel".
Une "escroquerie à l'amitié"
Pendant les débats, l'ancienne star de la police a reconnu avoir commis des "erreurs", notamment dans sa relation avec les deux cousins Gilles Bénichou et Stéphane Alzraa, figure de la jewish connection lyonnaise et de la fraude à la taxe carbone. Une délinquance financière à laquelle Michel Neyret, trente-deux ans de carrière et une Légion d'honneur, regrette de s'être frotté.
Pour sa défense, l'ancien patron de la BRI de Lyon, aguerri aux affaires de stupéfiants, a dit avoir péché par inexpérience face à des "escrocs professionnels qui ont inventé pour lui l'escroquerie à l'amitié". Mais son avocat Gabriel Versini-Bullara l'a assuré lors de sa plaidoirie, Michel Neyret n'avait qu'un objectif : "Noyauter ce groupuscule pour faire une belle affaire, avec le but premier de toujours servir l'Etat."
Nicole Neyret également condamnée
La compagne de l'ancien policier, Nicole Neyret, jugée pour avoir profité des largesses des "amigos" de son mari, a, elle, été condamnée à huit mois de prison avec sursis. Le tribunal a estimé qu'elle n'était "pas seulement une épouse sous influence".
La justice a apprécié différemment les situations de trois anciens subordonnés de Michel Neyret, qui étaient soupçonnés de l'avoir aidé en détournant des scellés de drogue. Le capitaine Jean-Paul Marty est ainsi condamné à trois mois avec sursis, tandis que le commandant Gilles Guillotin et le commissaire Christophe Gavat sont relaxés.
Les corrupteurs de Michel Neyret actuellement en fuite, Stéphane Alzraa et Gilles Bénichou, sont lourdement condamnés. Le premier écope de deux ans de prison ferme et 250 000 euros d'amende, le second de cinq ans ferme et 100 000 euros d'amende. Un mandat d'arrêt a été émis à leur encontre. Quant à l'avocat lyonnais David Metaxas, qui était jugé pour recel de violation du secret professionnel, il a été relaxé. Idem pour Cyril Astruc, une autre figure de la fraude à la taxe carbone.
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